l'immigration et le marché du travail

THEME


DOSSIER DOCUMENTAIRE :

Document 1 : voir graphique en cours
SOURCE : Immigration , prochain stimulant de la croissance ? , Le Monde , 20 juin 2000

Document 2 :cliquez sur : http://jaysesbeauxfortsblogs.over-blog.org/article-4733203.html
Source : INSEE, recensements

Document 3 :
L'immigration comme soutien à la croissance ?
«La croissance équilibrée de notre production est également subordonnée à des progrès dans la politique de gestion de l'immigration », expliquait R Prodi. Et de prôner la lutte contre l'immigration clandestine bien sûr mais aussi l'ouverture à une immigration de « main-d'œuvre ». Le remède peut paraître incongru, en des temps où hausse continue du chômage et croissance économique en berne restent le lot commun de la plupart des pays européens. Depuis trois ans, le que s'est avivé. En septembre 2000, un rapport de l'Organisation des Nations unies (ONU) sur les « migrations de remplacement » jetait le trouble. L'ONU y décrivait plusieurs scénarios dont les plus ambitieux évaluaient le besoin d'immigration pour l'Europe à 1,4 milliard de personnes entre 1995 et 2050, dont 94 millions pour la France. Ces analyses jugées peu réalistes dès leur publication ont toutefois installé l'idée que l'Europe aurait besoin de recourir massivement à la main-d'œuvre étrangère pour pallier son déficit démographique. Pour Jean-Pierre Garson, chef de la division des migrations internationales à l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), un tel raisonnement se heurte à de nombreuses limites. « Si dans un premier temps les migrations ont un effet immédiat sur l'âge et la composition de la population, ce bénéfice s'estompe ensuite car il faut prendre en compte un certain nombre de facteurs comme le coût social de l'immigration, les retours éventuels, l'alignement du taux de fécondité des immigrés avec celui des nationaux ou encore leur vieillissement. » En mettant bout à bout ces différentes contraintes, le recours massif à l'immigration n'apparaît donc pas comme la méthode miracle pour compenser les effets du vieillissement de la population. En novembre 2002, le Commissariat intitulé « Immigration, marché du travail et intégration », enfonce un peu plus le clou. « // faut lutter contre l'idée selon laquelle en France l'immigration est une solution au problème des retraites et du vieillissement», explique François Héran, directeur de l'Institut national des études démographiques (INED), principal auteur du document. Si elle ne peut escompter combler le déficit de ses caisses de retraite en ouvrant massivement ses frontières, les experts du Plan estiment cependant que la France a néanmoins besoin d'immigration pour équilibrer le marché du travail, notamment après le départ en retraite des générations du baby-boom. L'adaptabilité de la main-d'œuvre aux besoins du marché n'est pourtant pas là aussi chose aisée. Tout d'abord comment prévoir précisément les pénuries et l'ampleur des besoins en force de travail immigrée? Quand bien même on y réussirait, remarque Jean-Pierre Garson de l'OCDE, « les pays risquent alors de se livrer à une concurrence entre eux et devront arriver non seulement à attirer certains des profils les plus demandés mais aussi à les garder ». Par ailleurs, il est très difficile de mettre en place des politiques sélectives qui répondent aux besoins immédiats du marché du travail. Enfin il est illusoire de penser qu'il est possible de maîtriser toutes les entrées et notammentt celles concernant les familles et les flux d'immigration illégale. A l'inverse, les sorties de migrants sont elles aussi difficilement prévisibles. Autant de limites qui risquent de peser sur l'efficacité des flux migratoires à des fins d'emploi. Pour ce qui est de la contribution éventuelle à la croissance, l'autre levier sur lequel l'immigration peut jouer un rôle est celui de la demande. Pour El Mouhoub Mouhoud, professeur et directeur du centre d'économie de Paris-Nord à l'uni- versité Paris-XIII, «l'arrivée de migrants peut avoir un effet positif sur la croissance du pays d'accueil via un effet de demande ». D'autre part, poursuit ce chercheur, « dans la mesure où la zone euro n'est pas une zone homogène, certains pays membres d'Europe du Sud ne pouvant plus utiliser l'instrument de change pour rester compétitifs ont recours à l'immigration comme mode d'ajustement alternatif». Le Portugal a ainsi ouvert ses frontières aux migrants venus des pays •d'Europe centrale et orientale (PECO), notamment d'Ukraine, qui fournissent une main-d'œuvre diplômée bon marché. Avec 70 000 Ukrainiens, souvent reconvertis dans le bâtiment, il s'agit là de la plus importante communauté étrangère dans ce pays.
Source : C Rollot, la main d’œuvre étrangère ne garantit pas la croissance.le monde, nov 2003.

Document 4 :
Le nouveau texte ne donne pas entière satisfaction aux chefs d'entreprise, aux associations et aux hommes politiques - y compris à l'intérieur du gouvernement -, qui ont réclamé, au nom d'intérêts divers, un assouplissement des quotas d'entrée, mais aussi des conditions d'attribution des permis de séjour et du statut de réfugié.
Après la régularisation massive de 690 000 clandestins en 2003, l'Italie compte 2,6 millions d'immigrés, soit 4,5 de la population totale. Ce pays, historiquement d'émigration, saura-t-il profiter de l'expérience de ses voisins et éviter leurs erreurs ? L'immigré n'est encore perçu que pour ce qu'il apporte à l'économie (entre 3,8 et 6 du produit intérieur brut, PIB, selon les sources), sans que son intégration sociale et professionnelle ne soit vraiment prise en compte.
Pour l'instant, les immigrés sont cantonnés dans les emplois les moins qualifiés et les plus pénibles que rerusent les Italiens. Mais dans un pays où le taux de natalité est l'un des plus faibles d'Europe, « il faudra arriver à 5 millions d'immigrés en 2010 pour faire face aux besoins du marché du travail », souligne-t-on à la CGIL, la plus importante centrale syndicale italienne. Selon les données de l'Institut national de la statistique (Istat), la population italienne n'a augmenté en 2003 que grâce aux naissances d'enfants d'immigrés.
L'insertion de ces travailleurs et de leurs familles dans la société tarde à être prise en compte par un Etat qui se défausse beaucoup sur
les ONG, notamment catholiques : « C'est un rôle que nous accepterions volontiers s'il s'agissait seulement de faire face à l'urgence, mais pas quand l'immigration s'installe dans la normalité», explique Mgr Vittorio Nozza, directeur de l'ONG Cantas. Pour l'autre grand acteur de l'intégration, la communauté de laïques catholiques Sant'Egidio, « l'intégration n'est pas un objectif électoral facile à proclamer ».
Face à l'incurie des pouvoirs publics en matière d'intégration, la société civile apporte des réponses qui ne suffisent pas toujours pour prévenir l'éventuelle frustration de la deuxième génération. Les associations caritatives sont ainsi les seules à dispenser des cours de langues, gages d'une intégration scolaire : réussie. L'éducation nationale n'a jamais reçu les moyens de faire face à ce défi, et les premiers signaux d'alarme sont là : échecs dans le secondaire, dérives vers la délinquance, etc. Certains redoutent déjà l'arrivée future de cette génération sur le marché du travail : « Le problème de la discrimination va se poser car ces jeunes n'accepteront pas d'exercer les métiers subalternes de leurs parents, ils auront les mêmes exigences que les jeunes italiens. M Ambrosini déclare : « si notre société ne réclame des immirés que pour leur confier les travaux les plus durs, elle se prépare un mauvais avenir »
Source : F Aizocovivi, l’immigration une carte gagnate pour l’Italie, le monde, 21-09-04.

Document 5 :
Certains hasards sont étonnants. Mercredi 29 octobre, alors que le projet de loi sur l'immigration de Nicolas Sarkozy est définitivement adopté par le Parlement, le même jour est voté en séance plénière un avis du Conseil économique et social (CES) consacré aux « défis de l'immigration future » qui prend le contre-pied du ministre de l'intérieur. D'un côté, un texte centré sur le durcissement des conditions d'accueil et de séjour des étrangers, avec notamment l'allongement de trois à cinq ans des délais d'obtention de la carte de résident ; de l'autre, un rapport qui préconise, au contraire, d'« ouvrir les voies légales d'entrée », de «faciliter le renouvellement des titres de séjour temporaires » ou encore d'instaurer « un visa à durée définie » pour les étrangers en recherche d'emploi ou d'une formation professionnelle. Les conseillers vont jusqu'à défendre l'idée d'une « immigration maîtrisée et organisée » pour contribuer à la croissance, au développement de l'emploi, au financement des retraites et de la protection sociale.
Fort de ce postulat, le CES prône « la progression du solde migratoire au rythme de 10000 immigrants de plus chaque année à partir du solde initial d'environ 70 000 en 2002 ». Le débat n'est pas nouveau.. Que ce soit les craintes de se heurter à des pénuries de main-d'œuvre comme les epoirs de pouvoir atténuer les effets du vieillissement démographique, voire de faire rejaillir une croissance disparue, en tablant par exemple sur la baisse du coût de la main-d'œuvre dans les métiers pour lesquels on embaucherait des étrangers, tout concourt à présenter comme une des solutions d'avenir le recours à l'immigration de travail sélective.
Car c'est de cela qu'il s'agit ouvrir ses frontières aux bons immigrants « utiles », car correspondant aux profils recherchés tout en fermant le guichet à ceux qui ne le seraient pas. Même si l'analyse montre que les migrations de remplacement ne peuvent être qu'une solution partielle au déclin de la population totale et au manque de bras et que les effets sur la croissance sont difficilement quantifiables et très controversés, il reste que ces arguments sont utilisés par les gouvemants, qui les jugent recevables par leurs opinions publiques au regard d'une immigration qui reste un sujet brûlant. En France comme dans le reste de l'Europe. Oui, l'Europe est devenue aujourd'hui le premier continent d immigration du monde, devant les Etats-Unis et le Canada (1,4 million d entrées légales en 2000 ; 850 000 aux Etats-Unis et au Canada réunis) mais les étrangers n'y représentent que 5,1% de sa population totale. (…)
Non, ce ne sont pas les plus pauvres - qui partent comme par le passé • mais les classes moyennes, les diplômes plus mobiles, prêts à changer de pays au gré des opportunités. Pourtant. les proclamations des pays d'accueil n'illustrent pas ces changements, et en particulier la complexification des caractéristiques des migrants eux-mêmes. . Pourtant , traiter l'une sans l'autre est préjudiciable. Cette vision finalement assez étroite de l'immigration pose par ailleurs d'autres questions. Les nations européennes ont-elles le droit de parler de l'immigration uniquement sous l'angle « utilitaire » ? L ouverture ou non des frontières se résume-t-elle à une simple variable d ajustement démographique ou économique ? pour Catherine Wihtol de Wenden, directrice de recherches au Centre d'études et de recherches internationales «les migrations ne doivent pas être faites uniquement pour pallier les lacunes des pays riches ». Elles doivent aussi, selon elle, s'inscrire dans le cadre d'une politique plus global qui prendrait en compte les besoins économiques mais aussi l'intérêt des immigrants eux-mêmes et de celui des pays d'où ils viennent
Enfin, au-delà des questions liées à la fourniture de main-d'œuvre se posent aussi celle de l'intégration des immigrés non seulement sur le marché du travail, mais aussi dans la société qui les accueille. A cet égard, l'exemple en partie raté des effets secondaires de la vague d'immigration économique des « trente glorieuses » en France mérite au moins réflexion.
Source : A Beuve-Méry, Main d’œuvre immigrée : la potion magique ? in le monde, 4-11-2003

Document 6 :
En 1959, Fidel Castro prend le pouvoir à Cuba. Des centaines de milliers de réfugiés déferlent sur Miami. Le taux de chômage de la Floride grimpe brusquement, mais se dégonfle en quelques mois. Aujourd'hui, la communauté cubaine est un facteur-clé de la prospérité de la Floride. En 1962, l'Algérie devient indépendante, et les pieds-noirs traversent la Méditerranée par centaines de milliers. Curieusement, le nombre des chômeurs métropolitains frémit à peine. Dans les mois qui suivent, la croissance s'accélère. Il est admis, comme l'explique Jean-Didier Lecaillon, professeur de sciences économiques à Paris-XII, qu' un « courant migratoire contribue à la croissance du pays d'accueil». Mais Jean-Didier Lecaillon nuance aussitôt son propos en expliquant que « des tensions à court terme peuvent toutefois surgir sur le front du chômage ». L'immigration risque-t-elle d'alimenter les statistiques du chômage ? Telle est la question qui taraude aujourd'hui le gouvernement : face à la pénurie de main-d'œuvre - qualifiée et non qualifiée - qui semble pénaliser l'activité des entreprises, est-il imaginable d'alléger les freins à l'immigration ? La question est à la fois économique - quel serait l'impact de centaines de milliers de nouveaux entrants sur les chiffres du chômage — et politique : l'opinion
publique comprendrait-elle un encouragement à l'immigration quand le pays compte 2,5 millions de chômeurs? La décision (politique) est d'autant plus difficile à prendre que le Front national et la violence du débat sur l’immigration ont bloqué toute réflexion sereine. Y compris au plan académique. Pour Thomas Coutrot, chercheur au CERC-Association (Conseil de l'emploi, des revenus et de la cohésion sociale), «l'immigration est un moyen de flexibiliser le marché du travail. Malgré deux millions et demi de chômeurs, il y a pénurie de main-d'œuvre. Pourquoi ? Parce que les chômeurs nationaux renâclent à occuper des emplois précaires, mal payés, et qui obligent à des temps de transport importants. Des immigrés fraîchement arrivés seraient à coup sûr moins regardants ». Le recours à l’immigration permettrait alors de contourner le vrai problème : « Quelles mesures prendre pour rendre des emplois déqualifiés attractifs pour les nationaux au chômage?» Dans la mesure où le gouvernement n'est pas prêt à lancer un chantier d'envergure sur ce sujet complexe, il tente de prévoir les relations entre l'immigration et le chômage. Une étude sur ce sujet a été demandée par Martine Aubry, ministre de l'emploi et de la solidarité, à Hubert Jayet, professeur d'économie à l'université de Lille. Bien que le rapport ne soit pas encore public, les conclusions de Hubert Jayet semblent très positives : «Nos travaux économétriques n'ont pas mis en évidence d'effet significatif de l'immigration sur l'emploi et le chômage. »
Des études menées avec des méthodes statistiques rigoureuses en Europe et aux USA n’ont pas révélé d’impact non plus : « bien qu’il faille rester prudent, un courant migratoire fort ne bouleverserait pas non plus le salaire moyen. Peut-être enregistrerait-on une légère pression à la hausse pour les salaires des plus qualifiés et une pression à la baisse pour celui des non-qualifiés», précise Hubert
Jayet. Mais. là encore, le conditionnel est de rigueur , l'économétrie n étant pas une science exacte. Si 1’on admet qu'un courant migratoire puissant accélère la croissance du pays d'accueil et répond aux besoins de main-d'œuvre des entreprises - les immigrés trouvent de l'emploi et dépensent une partie de leur salaire pour reproduire leur force de travail, ce qui accroît la demande et a un effet d'entraînement positif sur l'économie générale -, la solution est évidemment à court terme. Car, en période de récession ou de croissance faible, la main-d'œuvre immigrée est souvent pénalisée la première par le chômage. Toutes les études l'ont montré, les immigrés ont été les premiers touchés par la montée du chômage au début des années 80. Une étude récente de l'Insee sur « L'emploi
des immigrés en 1999 » confirme que leur taux de chômage demeure supérieur à la moyenne nationale. La raison en est simple : les immigrés sont surreprésentés dans les catégories « employés » et « ouvriers », les plus touchées par le chômage.
Source : Y.Mamou , La main-d’œuvre étrangère n’aggrave pas systématiquement le chômage , Le Monde , op cité

Document 7 :
Après la crise économique en 1974, la France est passée d'une immigration de main d'oeuvre à une immigration de peuplement par le biais du regroupement familial (qui représente encore 60 % des entrées d'étrangers en 1994). Ce retournement de tendance a entraîné une féminisation de la population étrangère qui tend à équilibrer la répartition des sexes (40 % de femmes en 1990 contre 30 % dix ans plus tôt).
La population active étrangère (qui représente 6 % des actifs en France) était traditionnellement ouvrière et non qualifiée, elle subit donc de plein fouet le chômage. Mais ce premier phénomène ne doit pas masquer des changements professionnels qui sont ceux de l'ensemble de la société française : elle se féminise et se diversifie en direction des services. En 1975, 70 % des actifs d'origine maghrébine étaient des ouvriers non qualifiés (essentiellement dans les secteurs de la métallurgie, du textile, du bâtiment, de l'automobile et de l'agriculture). En 1990, ils sont moins de 40 %. Inversement, on observe le fort développement des professions intermédiaires : artisans, commerçants, employés, ouvriers qualifiés et même cadres et professions libérales. La structure professionnelle des étrangers se rapproche donc lentement de la structure de la population active française (Marie, 1994 ; Mucchielli, 1997).

. Comparaison d'indicateurs entre 1985 et 2000 cliquez sur : http://jaysesbeauxfortsblogs.over-blog.org/article-4733238.html

Source : INSEE, enquêtes Emploi 1985 et 2000.

Document 8 :
Au Royaume-Uni, par exemple, où le recours à la méthode du testing est depuis longtemps institutionnalisé, le test a révélé un taux de discrimination très élevé pour les étrangers. "Quand une personne appartenant à une minorité ethnique se présente la première à un emploi, on lui répond par exemple que la place est déjà prise. Quand en revanche, un Britannique de souche se présente, la place est encore vacante. L'expérience a été reconduite, il y a deux ans à peine, par deux chercheurs qui se sont fait passer pour des docteurs en médecine postulant à des emplois de haut niveau en milieu hospitalier. Ils ont envoyé des CV, les uns avec des noms à consonance anglo-saxonne, d'autres avec des noms à consonance indienne, et ont abouti au même résultat : dans 50 % des cas, il y a eu discrimination" (John Wrench, 1998).
Une récente étude du Bureau international du travail, menée notamment en Belgique, Allemagne, Espagne et aux Pays-Bas, met en oeuvre des méthodes de testing pour faire apparaître les discriminations raciales à l'embauche. Elle montre qu'aux trois principales étapes du recrutement, prise de contact, entretien et décision, les candidats issus de l'immigration ou de minorités ethniques subissent différentes formes de discrimination, ou du moins un traitement différent de celui réservé aux autres. Dans les quatre pays étudiés, le taux de discrimination envers les actifs issus de l'immigration ou de minorités ethniques est plus important dans les secteurs de services et dans les établissements de petite taille. Les conclusions de l'étude montrent que la première et plus commune forme de discrimination consiste, dès le premier stade, pour l'employeur, à éviter tout contact avec le postulant d'origine étrangère réelle ou supposée, le plus souvent en lui déclarant que l'emploi est déjà occupé, alors que le candidat autochtone est convié à un entretien. Au deuxième stade, lors de l'entretien, il est fréquent qu'on exige des candidats d'origine étrangère des qualifications supplémentaires non demandées aux autres. Au dernier stade, même lorsque les emplois sont offerts à des personnes issues de l'immigration ou de minorités ethniques, c'est souvent à des conditions moins intéressantes que celles offertes aux autres candidats.
Ceci étant, tous les pays n'utilisent pas la méthode du testing ; elle est certes récente dans différents pays européens comme l'Allemagne, la Belgique, le Danemark, ou encore l'Espagne, mais l'expérience n'est pas menée dans d'autres pays européens tels que la Suède ou la Norvège ou demeure au stade des associations militantes et non institutionnel comme en France (SOS Racisme multiplie les tests de discrimination à l'embauche et à l'entrée des discothèques). "L'ambiguïté du modèle français repose sur le caractère parfois formel du principe" d'égalité devant la loi de tous les citoyens, sans distinction d'origine, de race ou de religion "dont il se prévaut, lequel se retourne contre ceux-là mêmes qu'il est censé protéger lorsque ces catégorisations interdites sont de fait non seulement tolérées mais admises, et qu'elles imprègnent l'action institutionnelle et la vie quotidienne, car rien a priori ne permet de les déceler. Lorsque des différenciations à partir de couleur ou d'origine ethnique infiltrent les pratiques sociales, l'aveuglement est de continuer d'adopter des stratégies courantes qui finissent par masquer des préjudices réels. L'une des caractéristiques des nomenclatures officielles françaises est l'élimination presque totale de toute catégorisation ethnique ou raciale dont la collecte est pratiquement interdite" (F. Vourc'h, 1996). (….)
Les enfants issus de l'immigration mais pour la plupart nés en France, donc juridiquement français, sont sur le marché du travail dans une situation proche de celle des jeunes étrangers(4). Cette plus forte vulnérabilité sur le marché du travail de certains types de minorités ethniques - y compris de jeunes européens issus de ces minorités - qui ont de meilleures perspectives d'emploi que celles de leurs parents en raison de leur formation, de leur instruction et de manière générale de leur intégration à la société d'accueil - suggère sans le prouver qu'il existe une réalité extra-économique, donc non rationnelle au regard des exigences du marché du travail.
on ne peut ignorer qu'en même temps 40 % des jeunes actifs non européens de moins de 25 ans sont au chômage et que des centaines de milliers d'individus ne peuvent accéder à une multitude d'emplois, de postes, de responsabilités, de formations, qu'ils sont refusés à l'entrée de magasins, de discothèques, de stades, qu'ils se voient refuser un logement, qu'ils sont désignés comme inférieurs et peuvent inspirer une crainte basée uniquement sur leur couleur et leur nom. Aujourd'hui, différentes études montrent que certains patrons écartent des CV lorsque le nom, le prénom, la photo ou encore l'adresse laisse présager d'une appartenance à une minorité ethnique. L'attitude discriminante des employeurs (même non raciste a priori) paraît être une anticipation rationnelle (coût du risque) quant au racisme supposé des autres acteurs. L'attitude discriminante de l'employeur découle des pressions internes (salariés) et externes (clients). Il n'existe pas d'acteur unique qui puisse être désigné comme l'unique responsable des discriminations subies, mais c'est à travers le comportement des employeurs qu'elles se traduisent le plus directement. Ces situations sont le quotidien de plusieurs millions d'individus et le sentiment d'une société à deux vitesses se trouve renforcé chez eux. Ces individus réfutent le terme même d'intégration "parce qu'ils ne se sont jamais sentis désintégrés" et ce terme est avant tout pour eux la preuve que la société les pense différemment. Pour autant, ils se trouvent confrontés à diverses occasions à des discriminations raciales et doivent se battre parfois doublement parce qu'ils appartiennent à une minorité désignée socialement comme "suspecte". Ils ne peuvent rester insensibles à certaines réalités prouvant l'acheminement vers une banalisation de la différenciation systématique à leur égard. Ils aspirent à être jugés sur leurs propres compétences et comportements, et non pas sur leur hypothétique origine étrangère. Mais ils sont parallèlement attentifs à l'action publique envers "ces assimilés immigrés qui n'ont pas réussi à monter dans le train" avec lesquels ils partagent une part de culture et dont ils se sentent solidaires. (...)

Document 9 :
Or, depuis les années soixante, des travailleurs qualifiés émigrent également à partir de nombreux pays du Tiers monde à la recherche d'un travail dans les pays industrialisés du Nord, où ils passent souvent leur vie entière. C'est un phénomène qui a été violemment critiqué, surtout par les gouvernements des pays en développement concernés. Non seulement les migrations de travailleurs qualifiés apparaissent comme une forme de "transfert de technologie inversé" qui prive ces pays moins développés d'un facteur de croissance et de développement crucial et plus que nécessaire(1) ; mais apparaissent moins comme le résultat d'un fonctionnement à l'échelon mondial du mécanisme d'équilibre de l'offre et de la demande sur le marché des travailleurs qualifiés qu'une concurrence injuste exercée par les puissants pays industrialisés - et surtout les États-Unis - aux dépens des pays en développement(2).
À première vue, le développement de ces systèmes d'emploi des travailleurs qualifiés à l'échelon mondial peut être considéré comme une chance de voir injecter dans les pays en développement un influx de capital humain qui compense les pertes subies précédemment dans ce domaine(3). On peut, par ailleurs, prévoir que l'augmentation de la demande de main-d'oeuvre locale complémentaire de la part des multinationales stimulera les marchés du travail nationaux et que le transfert de know-how s'intensifiera, tout cela au profit des travailleurs locaux peu qualifiés. Or, la réalité montre que cela n'a pas eu lieu dans la plupart des cas et qu'en règle générale, le marché du travail interne des multinationales reste largement étanche par rapport à celui de leur pays d'accueil. Les efforts consentis par ces sociétés pour empêcher les transferts non voulus de technologie au bénéfice d'entreprises et de sites concurrents impliquent que la main-d'oeuvre nationale qualifiée s'est vue jusqu'ici donner peu d'accès aux activités "modernes" effectuées par les multinationales.

Cette situation a réveillé les critiques contre la fuite des cerveaux, qui semblaient avoir été étouffées par la mondialisation des marchés du travail. Des représentants de pays africains, notamment, se plaignent de ce que ces pays ont non seulement perdu un grand nombre de leurs ressortissants ayant bénéficié d'une formation universitaire depuis le début des années quatre-vingt au bénéfice de l'Europe occidentale et de l'Amérique du Nord, mais encore que ceux qui sont restés dans leur pays d'origine se trouvent privés de leur emploi du fait de la concurrence des experts étrangers. On estime que ces derniers ont remplacé de 80 000 à 100 000 Africains qualifiés au milieu des années quatre-vingt-dix, un chiffre qui vient s'ajouter aux 23 000 travailleurs qualifiés que l'Afrique perd annuellement au profit des pays industrialisés(4).
L'opinion qui prévaut très largement est que ce type d'émigration depuis les pays en développement a certainement nui aux pays d'origine des migrants en ce sens que le "transfert inverse de technologie" qu'elle provoque implique pour ces pays des coûts élevés que les pays industriels ne remboursent pas. Selon le Service de la recherche du Congrès des États-Unis, les pays en développement ont déboursé en moyenne environ 20 000 dollars pour la formation de chaque migrant qualifié au début des années soixante-dix. Comme ces départs privent les pays d'origine des revenus de leurs investissements alors que les pays industrialisés peuvent importer ces qualifications sans coût, la migration de main-d'oeuvre qualifiée revient à un transfert indirect de prospérité du Tiers monde au monde développé(13).

Ceux qui ne partagent pas ces vues(14) doivent néanmoins reconnaître que l'émigration de main-d'oeuvre qualifiée à partir d'un pays en développement désavantage la population laissée sur place dans la mesure où elle diminue les chances de développer de manière productive les facteurs de production complémentaires avec le capital humain, comme le travail manuel et le capital, et où elle élimine des revenus qui constituent la base de la demande intérieure et de l'imposition. Même en partant de l'hypothèse qu'une forte proportion des travailleurs qualifiés restant dans leur pays d'origine serait au chômage, la migration vers un autre pays contribuant dans ce cas à faire baisser le surplus d'offre de qualification (le "trop plein de cerveaux"), on doit objecter à cela que, dans les conditions qui règnent dans les pays en développement, la migration ne fait que perpétuer ce déséquilibre du marché du travail(15). Cela provient du fait que l'émigration, servant de soupape pour l'excès de main-d'oeuvre, vient alléger les pressions jouant contre la rigidité structurelle existant dans de nombreux pays du Tiers monde et responsable du manque de flexibilité du marché du travail. Cette absence de flexibilité implique qu'une diminution de l'émigration de travailleurs qualifiés n'entraîne pas l'intensification de la concurrence ni par conséquent la réduction des salaires nominaux auxquelles on pourrait s'attendre dans ce secteur du marché du travail. L'offre de main-d'oeuvre qualifiée reste donc excessive par rapport à son utilisation possible dans le pays, ce qui crée un cercle vicieux dans lequel le chômage des travailleurs qualifiés "impose" davantage d'émigration.

En conséquence, la migration de travailleurs qualifiés, non seulement perpétue les rigidités structurelles endémiques dans de nombreux pays du Tiers monde, mais encore entraîne une perte de croissance potentielle due à une perte en individus rationnels et novateurs capables de prendre des risques(16). On assiste donc à une stagnation du champ de l'innovation dans le monde des affaires, la société et les gouvernements de ces pays du Sud, et leur capacité à mettre en place des réformes reste peu élevée(17). L'"hétérogénéité structurelle" typique d'un grand nombre de pays du Tiers monde s'en trouve cimentée, et ce, en grande partie du fait de la fuite des cerveaux.
Source : Problèmes économiques, n° 2656 (15/03/2000), Page 73, Auteur : Heiko Körner.
Article original : "The" Brain Drain "from Developing Countries - an Enduring Problem."

Document 10 :
Dans ce contexte, l'Europe pourrait se trouver en mauvaise posture avec une population déclinante et vieillissante. » De leur côté, les experts de l'OCDE, sans tenir compte des spécificités de la nouvelle économie, ont aussi mesuré les effets du vieillissement sur la croissance. «Le vieillissement pose un problème de partage de la richesse nationale, car il y a de moins en moins d'actifs pour assurer les revenus de la population totale, explique Nick Vanston, de la division dés études économiques. Nous avons calculé qu'à partir de 2010 le revenu moyen par habitant progressera deux fois moins vite en moyenne que par le passé. » Et, tout comme les démographes de l'ONU, ils estiment que l’immigration peut contribuer à réduire ces déséquilibres. «Le recours à l'immigration plus massive présente l'avantage d'avoir un impact immédiat et relativement important sur la population active en raison des caractéristiques plus Jeunes des nouveaux arrivants», peut-on lire dans la dernière livraison du rapport sur les migrations internationales. L'Europe peut-elle se passer de l'immigration ? Pour toutes les raisons précédemment évoquées, la réponse est vraisemblablement non.
Mieux vaut le savoir à un moment où la reprise économique ne peut qu'aviver les débats sur les besoins de main-d'œuvre étrangère. Avec quelques années d'avance, et le plein emploi, les Etats-Unis ont tranché. L'immigration, plus que jamais, épaule l'euphorie de l'économie américaine. L'Europe devrait y réfléchir à deux fois.


Evolution des flux d’immigrants en % et en évolution en points entre 1984-88 et1990-1995. cliquez sur : http://jaysesbeauxfortsblogs.over-blog.org/article-4733244.html
SOURCE : L.CARAMEL , L’immigration nourrit la dynamique démographique nécessaire à la croissance , Le Monde , 20 juin 2000



SUJETS : cliquez sur : http://jaysesbeauxfortsblogs.over-blog.org/article-4733254.html

Sujet 1 - Les PDEM sont confrontés à un vieillissement durable de leur population qui accroît les risques de pénurie de la main-d’œuvre . Dans le même temps , les pays du Sud qui connaissent une démographie dynamique sont confrontés à un excédent de main-d’œuvre . Vous vous demanderez dans quelle mesure les mouvements migratoires et les politiques qui les impulsent peuvent apporter un réponse aux défis auxquels le monde est confronté.

· En vous appuyant sur le dossier documentaire et sur le cours ( en particulier les chapitres croissance et démographie et travail ) , complétez le tableau suivant :

· Construisez un schéma fléchés exprimant les relations de causalité logique existant entre les différentes causes mises en évidence pour :
- les raisons expliquant le recours à l’immigration dans les PDEM
- les déterminants permettant de comprendre l’émigration dans les PVD
- Les réponses que l’immigration a pu apporter aux défis auxquels sont confrontés les PDEM
- Les apports de l’émigration aux difficultés auxquelles sont confrontées les PVD.
- Les effets limités de l’immigration sur les économies des PDEM
- Les répercussions négatives que peut avoir l’émigrations sur les économies des PVD

· En établissant les différents schémas il faut que vous pensiez que l’objectif est de les synthétiser afin de faire apparaître une progression logique du développement.

Sujet 2 - Confrontés au vieillissement démographique et à un risque de pénurie de main-d’œuvre , les PDEM envisagent de mettre en œuvre des politiques qui, rompant avec la stratégie dominante suivie depuis l’entrée en crise, feront appel à l’immigration . Vous-vous demanderez quelles stratégies d’intégration ces politiques qui, visent essentiellement des objectifs économiques,doivent-elles suivre afin de tirer les leçons des échecs du passé et de renforcer la cohésion sociale ?

· Complétez le tableau suivant , en vous appuyant sur les documents et les connaissances vues en première




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