chapitre accumulation du capital progrès technique et croissance

CHAPITRE I – INVESTISSEMENT, PROGRES
TECHNIQUE ET INNOVATIONS


PARTIE I : PROGRES TECHNIQUE ET INNOVATION

SECTION I - DEFINITIONS ET MESURE DU PROGRES TECHNIQUE

I – DEFINITIONS :
A - LE PROGRES TECHNIQUE ( 15 p 65)

Il peut être défini comme l’ensemble des modifications qui affectent les procédés de production et la nature des biens réalisés permettant ainsi :
· soit de desserrer des goulets d’étranglement limitant la production : au XIX° siècle, le développement des chemins de fer a permis d’écouler une production en particulier agricole qui sans cela ne l’aurait pu.
· soit de produire des marchandises nouvelles ou de meilleure qualité (ex : le CD ou la photocopieuse)
· soit d’augmenter les gains de productivité des facteurs de production grâce à l’introduction de nouveaux procédés, des machines plus performantes
Remarque : les trois objectifs peuvent être recherchés simultanément, ils ne sont distingués que pour mieux caractériser le terme

B – LA DISTINCTION INVENTION - INNOVATION

Contrairement à ce que l’on pourrait penser, les termes invention et innovation ne sont pas synonymes :
1– DEFINITION DE L’INVENTION

« L’invention, est la découverte d’un principe nouveau ou d’un produit nouveau qui ne sont pas toujours susceptibles d’applications pratiques» .On considère généralement que l’invention se décompose en deux phases :
· la recherche fondamentale qui a pour objectif de dégager les lois qui régissent les phénomènes qu’étudie la science : par exemple la théorie de la relativité d’Einstein
· la recherche appliquée : qui elle vise un but déterminé en s’appuyant sur les résultats de la recherche fondamentale : les inventeurs cherchent alors à mettre au point des procédés de production ou des objets nouveaux qui pourraient être introduits dans le processus productif.

2 – L’INNOVATION

L’innovation correspondrait à la mise en application d’un principe théorique ou d’une idée nouvelle » (cf. l’ex de la photocopie ). L’innovation va donc permettre de rendre économiquement viable l’invention, ce qui nécessite de développer , c’est-à-dire de perfectionner les prototypes initiaux , puis de les commercialiser dans le modèle définitif. On se situe donc au niveau de la recherche et développement (R et D)


C - LES DIFFERENTS TYPES D’INNOVATION

1- LES 5 TYPES D’INNOVATION RECENSEES PAR SCHUMPETER .

Schumpeter qui est le premier économiste à s’être réellement intéressé à l’innovation distingue 5 grandes catégories d’innovation :
· la fabrication d’un bien nouveau : automobile , ordinateurs
· l’introduction d’une nouvelle méthode de production : l’usine mécanisée ,l’usine robotisée , le taylorisme , le fordisme , le toyotisme
· de nouvelles formes d’organisation : la fusion des sociétés , création de joint-ventures
· de nouvelles sources d’approvisionnement : le pétrole dans le golfe persique , le gaz à Groningue
· l’ouverture d’un nouveau débouché pour un produit donné par la découverte de nouvelles routes commerciales ou de nouveaux marchés pour les achats et les ventes

2 – INNOVATIONS DE PRODUITS ET DE PROCEDES

Les économistes ont aussi été conduits à distinguer deux types d’innovation technologique, recherchant des objectifs différents .

- les innovations de produits : correspondent à l’introduction de nouveaux biens ou services sur le marché , ont pour objectif de trouver de nouveaux débouchés pour l’entreprise , en créant un nouveau marché , sur lequel elle dispose d’une position de monopole ( par la détention d’un brevet ) , ce qui lui permet d’augmenter ses marges et donc sa rentabilité . A plus long terme, l’entreprise, quand le brevet sera tombé dans le public , conservera l’image de marque d’innovateur grâce aux ressources accumulées par l’innovation , elle pourra financer la R-D qui lui permettra de lancer de nouvelles innovations .

- les innovations de procédés ou process, a contrario, visent à introduire de nouvelles méthodes de production recherchent la réduction des coûts de production par un accroissement des gains de productivité . L’entreprise peut alors augmenter ses profits afin d’investir ou/et baisser ses prix afin d’augmenter ses parts de marché . L’innovation de process vise aussi à améliorer la qualité des produits afin d’accroître la compétitivité qualité de l’entreprise .

Remarque : En réalité , les innovations de produits et de process ne sont pas aussi contradictoires qu’on pourrait le penser . Ainsi , par exemple :
- l’amélioration des techniques de production engendre généralement une amélioration de la qualité des produits et peut rendre rentable le lancement de nouveaux biens qui ne l’aurait pas été sans cela .
- Ford a appliqué simultanément et en complémentarité l’introduction d’une nouvelle méthode de production et l’apparition d’un nouveau bien : la Ford T . Sans le fordisme , la Ford T n’aurait pas été rentable ; sans la Ford T , le fordisme n’aurait eu que peu d’utilité ( les Ferrari sont produites à petite échelle)

3 – INNOVATION INCREMENTALE – INNOVATION RADICALE

On distingue aussi :
- les innovations incrémentales , mineures ou progressives visent à apporter des améliorations techniques ou économiques dans la production de biens ou de techniques déjà existantes : le show-view ou le PDC pour le magnétoscope . Par cette innovation , l’entreprise cherche à accroître sa part de marché , mais la concurrence n’en sera pas bouleversée . Les entreprises vont donc , face à la multiplication de nouvelles innovations , développaient une stratégie de veille technologique qui vise à acquérir des informations sur l’évolution des techniques , des produits afin de ne pas être dépassé par la concurrence .

- les innovations radicales ou majeures provoquent une rupture , un saut qualitatif dans les techniques permettant de lancer de nouveaux produits ou techniques , donc de nouveaux marchés qui auparavant n’existaient pas : l’invention de l’automobile , de l’avion à réaction , de l’ordinateur qui permet de bouleverser la concurrence , mais qui en contrepartie comporte un risque d’échec important pour l’entreprise , qui peut conduire celle-ci à refuser cette innovation , IBM a refusé le brevet de la photocopieuse , considérée comme a priori non rentable .

Constat : On sait ainsi que :
- 53 %des entreprises, soit près de 9 innovantes sur 10 ont mis sur le marché un produit nouveau ou présentant de substantielles améliorions technologiques
- Mais , elles ne sont que 45 % à avoir mis en oeuvre des procédés technologiques nouveaux .
- Ainsi les entreprises industrielles améliorent plus souvent des produits et des processus existant qu’elles ne réalisent de véritables premières ( introduction de produits ou de procédés entièrement nouveaux pour le marché ).

II - LA MESURE : LA PRODUCTIVITE (5 p 39 et chapitre introductif)


Définition : La productivité se définit comme le rapport entre une production et les facteurs de production nécessaires pour assurer sa réalisation. On cherche par cela à mesurer l’efficacité du ou des facteurs de production utilisés. On distingue différents types de productivité :

- la productivité d’un facteur de production : travail ou capital .

- la productivité physique du travail = quantités produites
effectifs

Mais au cours du temps la durée de travail peut varier, ce qui va fausser les calculs. On va alors mettre en place un indicateur plus précis :

- la productivité horaire du travail= quantité produite
effectifs x durée moyenne du travail

Mais on est confronté à d’ autres difficultés :
- il est difficile de comparer des tonnes de charbon et des quantités de voitures : la productivité physique ne permet pas de réaliser des comparaisons sectorielles .
- De même, au cours du temps les biens se transforment : une Renault 12 n’est pas comparable avec une Renault Mégane .
- On calcule alors une productivité en valeur pour laquelle on va retenir non pas la valeur de la production ( chiffre d’affaire ) mais la valeur ajoutée(c'est-à-dire la valeur réellement créée) . En effet, les entreprises pour réaliser leur production utilisent des consommations intermédiaires qu’elle n’ont pas réalisées :

- la productivité en valeur du travail : valeur ajoutée
effectifs employés

- la productivité horaire en valeur du travail : valeur ajoutée
effectifs . durée moyenne du travail

Remarque : comme l’indique P Combemale et A Parienty : « l’approfondissement de la division du travail aboutit à une telle interdépendance dans le temps et dans l’espace que la notion de productivité partielle ou apparente d’un facteur de production perd beaucoup de sa signification . » En effet , les gains de productivité du travail observés dans l’industrie automobile résultent-ils d’une efficacité plus grande des travailleurs ou bien de l’introduction de la robotisation et de nouvelles méthodes de production ? Il faudrait alors calculer une productivité globale des facteurs , mais se pose de nombreuses difficultés quant à la mesure de cette notion . Comment rendre homogène le travail et le capital ? Comment prendre en compte des éléments aussi divers que les rapports humains , la norme , la culture , ... ?
On peut malgré tout calculer une
productivité globale des facteurs = Valeur de la production
Valeur des facteurs de production utilisées

Les sources d’accroissement de la productivité (7 p 40) : Une fois résolus les problèmes de mesure de la productivité , il nous faut étudier les mécanismes qui en sont à l’origine . Deux mécanismes peuvent jouer :
- les économies d’échelle : plus la quantité produite augmente, plus le coût moyen diminue. Pour réaliser des économies d’échelle, l’entreprise cherche à augmenter les quantités produites pour bénéficier notamment d’un meilleur étalement des coûts fixes.
- l’augmentation de la productivité peut , en revanche , être obtenue sans pour autant accroître l’échelle de production , c’est-à-dire les quantités produites . Augmenter la productivité consiste ainsi à produire davantage avec la même quantité de facteurs ou bien à produire autant avec une moindre quantité de facteurs . Quels sont alors les effets de la productivité sur l’emploi ? (8 p 41)

III - HISTORIQUE DE L’EVOLUTION DU PROGRES TECHNIQUE ET DE LA PRODUCTIVITE

A - LE PROGRES TECHNIQUE

constat : on observe une accélération de l’histoire concernant le progrès technique

En effet , « on compte d’abord en millions d’années , puis en millénaires , enfin en décennies » . L’exemple de l’informatique est particulièrement représentatif .
Une seconde façon de mesurer l’accélération de l’histoire est de prendre en compte les temps séparant l’invention de l’innovation , c’est-à-dire l’application industrielle de l’invention : « 112 pour la photographie , 56 pour le téléphone , 10 ans pour la télé , 3 ans pour le transistor ,il tourne autour d’un an pour la majorité des innovations actuelles ». On constate ainsi que le nombre d’ann »es nécessaire pour qu’une innovation touche 25% de la population US a été de :
- 46 ans pour l’électricité introduite en 1873
- 55 ans pour l’automobile introduite en 1896
- 26 ans pour la télé qui arrive sur le marché en 1926
- 16 ans pour le micro-ordinateur qui date de 1975
- et seulement 7 ans pour internet.

Ce phénomène n’est pas sans posé des difficultés aux entreprises :
- En effet , la recherche est de plus en plus coûteuse ; le risque d’échec de plus en plus élevé , soit parce que l’innovation ne débouche pas sur la production , soit parce qu’un concurrent a déjà lancé le brevet , la rentabilité est donc très incertaine .
- Elle l’est d’autant plus que le renouvellement des produits n’a cessé de s’accélérer et donc que la durée de vie des biens diminue .L’entreprise peut alors éprouver des difficultés à rentabiliser sa production sur des séries suffisamment longues .
- Pour éviter ces inconvénients , l’entreprise est obligée de trouver de nouveaux débouchés en exportant ou en s’installant à l’étranger , ce qui est aussi coûteux et risqué .Pourtant les entreprises sont condamnées à innover pour ne pas être dépassées par la concurrence .

B - LA PRODUCTIVITE (6 p 40)

Constat Quand on étudie la productivité du travail, on constate que les travailleurs sont beaucoup plus efficaces qu’ils ne l’étaient au XIX° siècle . En 160 ans , la productivité du travail a été multipliée par 13 , ce qui semble bien être le signe du passage d’un mode de croissance extensif à un mode de croissance intensif . Mais ce chiffre à lui tout seul ne permet pas de mesurer l’évolution de la productivité :

Remarque 1 : le rythme de productivité a énormément varié en fonction des périodes . On peut distinguer 5 périodes :
- 1830- 1890 : la productivité augmente faiblement : 1% par an , c’est le signe d’un mode de croissance encore largement extensif .
- la première rupture s’opère dans les années 1890 , quand on passe à un mode de croissance réellement intensif : entre 1890 et 1930 , les gains de productivité progressent deux fois plus vite que dans la période précédente .
- la deuxième cassure résulte de l’entrée en crise et de la guerre : pendant 20 ans , les gains de productivité vont se rapprocher de ceux obtenus au XIX° siècle . Mais ceci ne semble pas principalement du à une moindre efficacité du travail , la cause serait plutôt à chercher du côté de l’affaiblissement du rythme de croissance de la production , du à l’effondrement des débouchés pendant la crise .
- la quatrième période se caractérise , au contraire , par une accélération sans précédent des gains de productivité , qui , pendant 30 ans (30 glorieuses) , vont augmenter au rythme de 5 % par an .
- la cinquième période s’ouvre-t-elle aussi par une cassure : l’entrée en crise (73 et le choc pétrolier) et l’affaiblissement des rythmes de croissance font que les gains de productivité ne progressent plus qu’au rythme de 2% par an .

Remarque 2 : comme nous l’avons dit précédemment, il peut être très utile de calculer en plus de la productivité du travail , la productivité horaire du travail . En effet , depuis 160 ans la durée du travail a énormément baissé . La productivité horaire du travail ( multipliée par 25 ) progresse donc beaucoup plus vite que la productivité du travail ( x 13 )

Remarque 3 : la productivité apparente du travail est un indicateur insuffisant pour mesurer l’efficacité productive ; il paraît alors intéressant de mesurer la productivité globale des facteurs . En effet , les innovations s’étant multipliées : « la reprise de la croissance économique , à partir des années 1890 , et surtout celle des 30 Glorieuses se sont accompagnées - dérivent en fait- d’une très forte accélération du rythme du progrès technique » . La rupture que l’on observe depuis 1973 semble moins due à une diminution du progrès technique qu’à une réduction du rythme de croissance du PIB .

Remarque 4 : Selon P Morin l’économie française serait passée d’une économie en rattrapage à une économie de frontière :



SECTION II - LES DETERMINANTS DU PROGRES TECHNIQUE

I - LE ROLE DE L’OFFRE

A - LA THEORIE DES DROITS DE PROPRIETE DE D.NORTH .

un constat : D.North constate que les premiers pays à avoir connu une croissance économique réelle sont la GB et les Pays-Bas .

les explications :
- Il est alors amené à se demander pour quelles raisons, la France et l’Espagne, qui étaient alors des puissances politiques de premier plan n’ont pas connu d’augmentation durable du niveau de vie de leur population .
- A cela il répond : « les anciennes provinces espagnoles et la GB étaient alors les deux nations européennes les plus en avance dans la définition d’un système d’institution et de droit de propriété permettant d’exploiter de façon efficace les motivations individuelles pour assurer l’orientation des capitaux et des énergies vers les activités socialement les plus utiles . »
- En effet, « la croissance économique trouve fondamentalement sa source dans l’abaissement de l’ensemble des coûts de fonctionnement de la société. Autrement dit il ne suffit pas qu’un marché existe pour que de nouvelles possibilités de débouchés et d’économies d’échelle apparaissent , ou encore qu’une invention vienne révolutionner la technologie , pour que ces éléments se transforment en un surplus de croissance .
- De quoi dépend alors leur motivation ? De l’importance des gains que la saisie de ces opportunités leur procurera par rapport à la situation qui était la leur avant de les exploiter. Et de quoi dépendent ces gains ? De deux choses :
· des coûts que les agents économiques encourent dans leur processus de réalisation des opportunités ouvertes ;
· mais aussi du système de droits de propriété qui détermine de quelle façon s’effectue au sein du corps social, le partage des gains de productivité dégagé par l’initiative des innovateurs ( ...)

les liens entre les droits de propriété et la croissance économique :
Une société sera d’autant plus « innovatrice » et portée à la croissance que son système de droits de propriété définira de façon précise les droits d’exclusivité de chacun , qu’elle en assurera la protection effective et que , par-là , en réduisant le degré d’incertitude qui pèse sur les possibilités de gains supplémentaires offerts par l’innovation , elle contribuera à maximiser la rentabilité personnelle des activités de l’innovateur ( faisant que toutes choses égales par ailleurs , plus d’individus qu’auparavant sont désormais prêts à prendre des risques pour acquérir ces gains , le coût d’accès à ces gains diminue . »
( H.Lepage) .

Le rôle de l’Etat :
- selon les théoriciens du droit de propriété afin de favoriser l’innovation, l’Etat doit intervenir, mais seulement: en créant des conditions favorables à l’innovation, par exemple le droit des brevets.
- Par contre, l’augmentation des impôts et des prélèvements divers en réduisant le gain de l’innovateur va freiner son incitation à innover et par-là, la croissance économique que pourrait connaître le pays . H.Lepage traduit cela par : « plus la divergence est grande entre le gain personnel de l’innovateur et son apport social, moins l’individu est motivé pour courir les risques associés à l’effort d’innovation, la société se prive ainsi de gains dont elle aurait pu bénéficier si elle s’était montrée plus généreuse dans le partage de la plus-value ( en faveur des innovateurs ) » .
- Cette théorie peut permettre de justifier des inégalités de répartition très importantes, car elle accroît l’efficacité économique et donc à terme le bien-être de toutes les classes de la population.

B - LE ROLE DE L’ENTREPRENEUR DANS L’ANALYSE DE SCHUMPETER. (16 p 65 et 8 -9 p 432)

Explication du rôle de l’entrepreneur : Schumpeter attribue le rôle le plus glorieux à l’entrepreneur qui est pour lui le véritable héros de l’évolution économique. Il est animé par des motivations individuelles de réussite : le profit est à la fois le but et l’instrument de mesure de sa réussite :
- le but, car c’est lui qui motive l’entrepreneur à lancer ses innovations, alors qu’il court un risque non négligeable d’échouer
- l’instrument de mesure, le profit étant issu de l’innovation qui a réussi sur le marché, l’entrepreneur fait donc d’autant plus de profit qu’il est supérieur à la moyenne dans l’art d’effectuer des combinaisons économiques par des innovations de processus de production ou par la découverte de produits nouveaux, faciles à vendre chers.
Critique de l’analyse marxiste des classes : contrairement à ce que dit Marx, selon Schumpeter les entrepreneurs ne constituent pas une classe sociale, ils sont au contraire isolés.
L’opposition entre l’entrepreneur et le gestionnaire :
- « le rôle de l’entrepreneur consiste à réformer ou à révolutionner la routine de production (... ) ; pour surmonter les résistances du milieu, des aptitudes sont nécessaires qui n’existent que sur une faible fraction de la population et qui caractérise à la fois le type et la fonction d’entrepreneur » ( Schumpeter ).
- En effet, on peut constater avec Schumpeter, que la majorité des entrepreneurs ne sont pas des entrepreneurs mais des gestionnaires qui ont pour but de gérer leurs entreprises de manière routinière dans une économie de concurrence pure et parfaite.
- Au contraire, dans l’analyse de Schumpeter, l’entrepreneur est l’individu qui va venir bouleverser les conditions de concurrence, donc qui va remettre en cause des conditions acquises. Il se heurte alors à une certaine hostilité des autres entrepreneurs. La position de l’entrepreneur dans le système économique schumpétérien est donc ambigu :
+ il est à la fois la source de la croissance économique par ses innovations
+ mais en même temps c’est souvent un solitaire incompris de ses contemporains : « les bouleversements techniques perturbent l’activité économique (…)A court terme, la vague de progrès technique est surtout facteur d’instabilité ». Il arrive donc fréquemment que les innovations soient dans un premier temps rejeter, comme le montre le doc.14 p 96 « avec l’introduction de la machine, c’est tout l’équilibre du système corporatif qui s’écroule » . Ce qui conduit les ouvriers à détruire les machines qui pensent-ils leur prennent leur emploi.
Conclusion : Schumpeter , du fait de l’importance du rôle de l’entrepreneur dans le système capitaliste est pessimiste quant à l’avenir du capitalisme .
- En effet , il constate que « cette fonction sociale ( celle de l’entrepreneur ) est , dès à présent , en voie de perdre son importance et , elle est destinée à en perdre de plus en plus à une vitesse accélérée dans l’avenir » , ceci car : « l’innovation est elle-même ramenée à une routine .
- Le progrès technique devient toujours davantage l’affaire d’équipes de spécialistes entraînés qui travaillent sur commande et dont les méthodes leur permettent de prévoir les résultats pratiques de leur recherche ( ... ) . Ainsi le progrès économique tend à se dépersonnaliser et à s’automatiser, le travail des bureaux et des commissions tend à se substituer à l’action individuelle. ( ... ) L’unité industrielle géante parfaitement bureaucratisée n’élimine pas seulement en expropriant leurs possesseurs, les firmes de taille petite ou moyenne, mais, en fin de compte, elle élimine également l’entrepreneur et exproprie la bourgeoisie en tant que classe appelée à perdre, de par ce processus, non seulement son revenu mais encore ce qui est plus grave sa raison d’être. » .

C - UNE RELATIVISATION DE L’ANALYSE DE SCHUMPETER

1 - DEUX MODELES D’INNOVATION

On peut opposer deux modèles d’innovation :
- le modèle IBM
- le modèle Silicon Valley
qui permettent de relativiser le pessimisme de Schumpeter quant aux effets négatifs de la concentration du capital et à la disparition d’entrepreneurs dynamiques .


MODELE IBM
MODELE SILICON VALLEY
Type d’entreprise concernée
- grandes entreprises en situation de monopole ou d’oligopole dominant le marché
- PME- PMI innovantes
Raisons
- l’innovation est très coûteuse ; seule une entreprise disposant d’une taille importante sera capable de mobiliser des ressources financières suffisamment importantes pour lancer une recherche dont les résultats seront incertains , l‘entreprise y sera d’autant plus incitée que les coûts de recherche peuvent être considérés comme des coûts fixes ( constants quelles que soient les quantités produites ) , l’entreprise , du fait de sa grand taille , va pouvoir produire en grandes séries et bénéficier ainsi d’économies d’échelle qui lui permettront d’accroître ses profits ou de baisser ses prix
- les grandes entreprises sont des structures lourdes et bureaucratisées qui ne disposent pas de capacités d’adaptation suffisamment rapides pour suivre un marché en perpétuelle évolution . Au contraire , les PME qui disposent de structures légères , donc souples ( « small is beautiful » J.Schumacher ) vont pouvoir coller au marché et lancer des innovations qui répondront , en les anticipant , aux besoins du marché .
Ex : Apple .

En réalité , comme l’indique D.Guellec , les modèles IBM et Silicon Valley ne sont pas contradictoires mais complémentaires . En effet , : « il y aurait ainsi deux modèles d’entreprises innovatrices , jouant l’un sur la souplesse , l’autre sur les économies d’échelle » .Il n’en reste pas moins vrai que « la proportion des entreprises innovantes croit avec la taille des entreprises : de 30,5 % pour les plus petites à 90,5 % pour celles employant plus de 2000 personnes ». En effet , dans certains secteurs comme celui de l’automobile , une taille minimale ( dit taille critique ) est requise pour pouvoir lancer l’innovation , ce qui explique la concentration croissante de ce secteur .

2 - LA PRISE EN COMPTE DES FACTEURS SOCIO-ECONOMIQUES ( 22 à 24 p 68-69)

Un constat : J.Ibanes , à partir de l’exemple du coke , compare la France et la GB :
- il constate qu’en GB les entreprises vont très rapidement ( dès le début du XIX° ) abandonner les hauts fourneaux au charbon de bois et fondre leur minerai de fer en utilisant du coke .
- au contraire, en France, à la même époque, la grande majorité des entreprises continue d’utiliser le charbon de bois .

Les explications : Cela signifie-t-il qu’en France, il n’y ait pas eu d’entrepreneurs dynamiques capables d’innover? La réponse se trouve ailleurs :
- En effet, l’adoption du coke en GB semble avoir résulter principalement de l’existence de goulets d’étranglement : suite à l’épuisement des forêts , le prix du charbon de bois a fortement augmenté , incitant les entrepreneurs anglais à trouver un produit de substitution , donc à innover .
- Dans le même temps en France, les conditions économiques étaient radicalement différentes : le charbon d’extraction difficile était coûteux , son transport onéreux par manque de moyens de communication , alors que la production de fonte était disséminée sur le territoire ; les producteurs étaient souvent de grands propriétaires terriens qui disposaient de bois en grande quantité donc d’une matière première à faible coût ( d’autant plus que les salaires étaient faibles ) .
- De ce fait , les entrepreneurs français n’ont pas été incités à remplacer le charbon de bois par du coke , bien qu’ils ne soient pas moins performants . En effet, on constate que, dès que le besoin s’en est fait sentir, à partir de 1840, l’utilisation du coke s’est généralisée.
Conclusion : Schumpeter a trop insisté sur les caractéristiques individuelles de l’entrepreneur , n’a pas assez tenu compte du contexte socio-économique , mais aussi culturel ( dans certaines sociétés , le système de valeurs est un frein à l’innovation ) qui influencent les choix individuels. Ainsi l’exemple de la révolution MEIJI nous montre bien que celle ci ne s’est pas réalisée sur la base de valeurs individualistes mais tout au contraire s’est opérée dans le cadre d’une structure féodale.

II - LE ROLE DE LA DEMANDE

Dans l’analyse keynésienne , le progrès technique est largement déterminé par l’augmentation et les transformations de la demande
- En effet, de nombreux exemples tendent à prouver qu’un ordre important d’innovations sont le résultat des demandes préalables à laquelle les innovateurs tentent d’apporter une réponse. On sait ainsi que Pasteur a commencé ses travaux sur les levures pour répondre à une demande de brasseurs de bière, que le premier ordinateur a été conçu pour répondre aux besoins de l’armée américaine qui voulait gérer ses stocks.
- On sait, de plus, qu’il existe une relation entre l’investissement et l’innovation : plus l’investissement est élevé, plus les innovations seront nombreuses . Or, c’est dans les périodes de forte croissance de la demande que les investissements progressent plus vite ( modèle de l’accélérateur ) et que les entreprises vont être incitées à lancer de nouveaux produits afin de répondre aux besoins des consommateurs .
SECTION III - LES CONSEQUENCES DU PROGRES TECHNIQUE .

I - LE PROGRES TECHNIQUE ET LES INNOVATIONS : LES GRANDS ABSENTS DES THEORIES TRADITIONNELLES DE LA CROISSANCE .

A - UNE CROISSANCE INEXPLICABLE (10 p 42)

Postulat de base : La tradition néo-classique se situe dans le cadre d’une économie de concurrence pure et parfaite :
- C’est-à-dire que les hypothèses du modèle de cpp sont respectées
· en particulier l’hypothèse d’homogénéité des biens ( tous les biens sont substituables )
· d’atomicité ( personne ne dispose d’une position suffisante pour pouvoir influencer le marché et fixer les prix) .
- Dans ce contexte, grâce à la concurrence , l’économie de marché débouche sur une situation optimale , c’est-à-dire qu’aucun producteur ne peut améliorer l’efficacité avec laquelle il produit .
- Ce postulat posé, la croissance ne peut résulter que d’une augmentation des quantités de facteur de production : capital et travail utilisés pour la réaliser. On parle alors de croissance extensive. En effet, la loi des rendements décroissants indique bien que la productivité marginale d’un facteur diminue à mesure que les quantités utilisées de ce facteur augmentent. A terme, la croissance économique va se réduire et l’on débouchera inéluctablement sur une économie stationnaire.

Les insuffisances du modèle néo-classique : On se rend bien compte que ce modèle n’est pas conforme à ce que l’on observe dans la réalité :
- En effet, comme l’a indiqué Schumpeter, ce qui est à l’origine de la croissance c’est l’innovation or l’innovation est la grande absente du modèle néo-classique qui est basé sur un état des techniques de production données
- La théorie néo-classique semble d’autant moins utilisable qu’elle postule la concurrence uniquement par les prix . Or, la stratégie des entrepreneurs est de se détacher de la concurrence par les prix en différenciant leur produit , en les rendant non substituables . Un moyen efficace pour y arriver est d’innover : l’entrepreneur dispose alors d’un brevet qui lui garantit pour une certaine durée une position de monopole ( rejet de l’hypothèse d’atomicité ) qui lui permet de fixer les prix .

Un constat : Les auteurs néo-classiques, en particulier Solow et Denison ont été amenés à prendre en compte le rôle du progrès technique. En effet, comme l’indique l’exemple français décrit par Carre, Dubois et Malinvaud :

· sur les 5,9 % de croissance annuelle moyenne qu’a connu le PIB français entre 1951 et 1973, 0,3% résulte des quantités d’emplois ,1,6% du facteur capital , reste un résidu inexpliqué de 3 % qui représente donc plus de la moitié du total
· pour la période 1990-1998 le taux de croissance annuel réel est de 1.6% : la contribution du travail représente 0 .69, celle du travail 0.14, le résidu 0.76 c'est-à-dire la moitié du total.
· La théorie traditionnelle est donc mise à mal.

B - LA NECESSAIRE PRISE EN COMPTE DU PROGRES TECHNIQUE

les solutions mises en œuvre par Solow :
- Solow va le premier constater que le résidu inexpliqué est le progrès technique ; mais comme l’écrit D.Charpentier: « Solow se garde bien de dire d’où vient le progrès technique . En particulier, il ne dépend pas d’investissements en recherche et développement, sinon ce serait admettre qu’il est lui-même issu du capital, donc renoncer à l’hypothèse centrale de la productivité marginale décroissante puisque la recherche permettrait d’accroître l’efficacité de l’investissement » .
- La prise en compte du progrès technique pose un second problème à l’analyse néo-classique : chaque facteur est rémunéré en fonction de sa productivité marginale , mais si la moitié de la croissance économique provient d’un résidu , le progrès technique qui tombe du ciel , qui doit percevoir la rémunération issue de ce résidu ?
- Pour expliquer la croissance économique , les théoriciens néo-classiques vont donc faire appel aux effets externes ( l’activité d’une entreprise a des conséquences sur autrui , sans que celle-ci n ait eu l’intention , en supposant que le progrès technique soit par le biais des effets externes à l’origine de rendements croissants à l’échelle collective . La solution n’est pas idéale , car on ne voit toujours pas d’où vient le progrès technique : au mieux il est incorporé au capital , c’est-à-dire qu’il est introduit par le biais des investissements : le progrès technique serait donc une fonction croissante de l’investissement . Par contre , elle permet de montrer quels sont les effets du progrès technique sur la croissance .
-

II - CYCLE DE CROISSANCE ET GRAPPES D’INNOVATIONS DANS l’ANALYSE SCHUMPETERIENNE (19 p 67 et1 à4 p428-429)

La vision schumpeterienne de la croissance : La dynamique économique vue par Schumpeter est très tourmentée , à l’opposé du modèle néo-classique d’équilibre de croissance et de concurrence impure et parfaite » .
En effet , Schumpeter a une vision cyclique de l’activité économique :il va reprendre l’apport de Kondratieff qui avait mis en évidence l’existence de mouvements longs de cycles d’une durée approximative de 50 ans . Schumpeter va être amené à distinguer 2 phases :
- la phase A ou phase d’expansion durant laquelle l’économie va s’écarter de l’équilibre initial . En effet , les innovations vont remettre en cause la structure du marché : les entreprises qui ont innové , par le lancement d’un nouveau produit ou d’un nouveau procédé , vont bénéficier d’une forte augmentation de la demande , vont accroître leur production , faire des profits supplémentaires . Ceci va avoir deux effets contradictoires mais complémentaires :

· le mécanisme de la destruction créatrice : l’innovation va conduire à l’obsolescence des anciens procédés ou des anciennes productions , ce qui va entraîner la disparition d’entreprises ou de pans entiers de l’économie , donc une augmentation du chômage ( aspect destruction ) . Mais , dans le même temps , de nouvelles entreprises , de nouveaux marchés apparaissent qui vont faire preuve de dynamisme , créer des emplois ( aspect créateur ) .
· les grappes d’innovation : Schumpeter a constaté que les innovations ne se produisent pas de manière continue dans le processus économique , mais de manière cyclique . Quand une entreprise introduit une innovation radicale ou majeure , celle-ci va être à l’origine de nouvelles innovations qui viennent en complément . On peut donc dire que les innovations s’engendrent les unes des autres par un processus de déséquilibre successif . Schumpeter est amené ainsi à distinguer plusieurs révolutions industrielles , caractérisées par des innovations fondamentales situées dans des branches qui vont servir de pôle d’entraînement tirant toute l’économie , suite à l’introduction d’une innovation majeure qui a été à l’origine d’un déséquilibre. Schumpeter distingue 3 révolutions qui se sont succédées. Chaque révolution est caractérisée par une augmentation des innovations

- la phase B : durant cette phase , il ne se produit plus que des innovations mineures ou incrémentales , le progrès technique se généralisant peu à peu , le dynamisme économique diminue , la croissance économique chute ,on rentre alors dans une phase de récession .

Relativisation de l’analyse de Schumpeter : Néanmoins, si les analyses de Schumpeter sont séduisantes , elles sont difficiles à confirmer :
- en particulier l’hypothèse de régularité des cycles est très fragile . En effet , on ne constate pas obligatoirement de cycle de progrès technique , en particulier de chute du progrès technique durant les phases de récession .
- Au contraire , l’auteur en vient à inverser la relation de causalité : ce n’est plus la crise qui favoriserait l’introduction du progrès technique , c’est au contraire le progrès technique qui en s’accélérant dévaloriserait les secteurs anciens et bouleverserait donc la structure de production .
- Aujourd’hui , la thèse de Schumpeter est considérée comme trop simpliste . En effet , si elle a mis en évidence le rôle du progrès technique , elle est considérée comme faisant preuve d’un déterminisme technologique moniste ( c’est-à-dire qu’elle fait appel à un seul facteur )en particulier elle sous-estime les conditions qui vont permettre l’émergence du progrès technique : le système de valeurs , les interventions publiques ( Schumpeter surestime le rôle de l’entrepreneur)

III - LES THEORIES DE LA CROISSANCE ENDOGENE : P ROMER (12 p 44)

La croissance endogène : une synthèse : « les théories nouvelles de la croissance ,dans un cadre d’équilibre général néo-classique ont reprise certaines idées de Schumpeter. » :
- de Schumpeter , elles retiennent « à la fois le rôle considérable du progrès technique dans la croissance de long terme et son caractère endogène » .
- des néo-classiques , elles retiennent les effets externes qui vont conduire à des apprentissages non intentionnels qui vont faire bénéficier la collectivité de rendements croissants et générer une croissance économique de long terme .

Selon Romer à long terme la croissance ne dépend pas du taux d’investissement, mais du progrès technique qui est d’autant plus intense que le nombre de chercheurs est élevé et que le stock de connaissances est important.

Le rôle des effets externes : Les effets externes passent par l’intermédiaire de plusieurs canaux :
- la R-D est la source de deux externalités essentielles :
· les chercheurs sont d’autant plus productifs que le stock des connaissances accumulées est déjà important ; chaque entreprise bénéficie donc gratuitement des efforts de recherche ayant débouché sur l’accumulation des connaissances menée par les agents économiques du pays : Isaac Newton disait « j’ai vu plus loin parce que j’étais assis sur les épaules de géant »
· le progrès technique représente un coût fixe . En effet , quelle que soit la production vendue , les dépenses engagées par l’entreprise afin d’innover seront identiques . Dès lors , plus l’entreprise bénéficie de débouchés croissants , plus les économies d’échelle dont elle bénéficiera seront importantes . L’entreprise en profitera certes pour augmenter ses profits , mais elle les répercutera aussi dans une baisse des prix . Les entreprises qui acquièrent des machines bénéficient donc « de l’intégralité de la technologie alors qu’ils n’en paient qu’une fraction du coût » ; Dans le cas d’un logiciel le coût de reproduction est quasiment inexistant (un cd rom)
- la pratique : « c’est alors l’apprentissage qui est le mécanisme de la productivité , l’augmentation du savoir dépend de l’investissement cumulé » . Dans un pays , les capacités d’innovation résultent non seulement de l’effort d’innovation réalisé par chaque entreprise , de la diffusion de l’innovation et des effets d’apprentissage qui en résultent, mais est aussi fonction des interactions qui existent entre les efforts de recherche menée par les différentes entreprises ou par l’Etat qui bénéficie gratuitement à l’ensemble de la collectivité.
- Le capital humain comme l’a théorisé E Lucas le capital humain va être à l’origine d’externalités positives.En effet les individus formés sont plus performants, font bénéficier ceux qui travaillent avec eux de leur savoir et contribuent donc à accroître la productivité. Il existe même un processus cumulatif de croissance : chacun est d’autant plus efficace , a une productivité élevée et des connaissances plus développées que le milieu dans lequel il évolue est lui-même d’un haut niveau en capital humain ,avec des personnes exigeantes.

Les théories de la croissance endogène appellent trois remarques essentielles :

Remarque 1 : les théories de la croissance endogène vont permettre de justifier un recours à l’intervention étatique qui a pourtant été fortement critiquée par les théories libérales car le progrès technique est un bien public ou collectif , cumulatif et non rival : la main invisible du marché ne suffit pas à assurer la croissance maximale à long terme (15 et 16 p 46):
- Le progrès technique est un bien non rival car contrairement aux produits économiques habituels il ny a pas de rivalité physique entre les usagers, la connaissance ne s’use pas physiquement , bien au contraire c’est le non usage d’une connaissance qui menace son existence. L’histoire des techniques a tendance à s’accélerer parce que chaque idée nouvelle apparaît d’autant plus facilement qu’elle s’appuie sur un stock important d’idées antérieures.
- Or, si on laisse le marché s’autoréguler , celui-ci passe par des phases de récession durant lesquelles le taux d’investissement et l’effort de R-D des entreprises sont réduits ( du fait de la faiblesse des débouchés anticipés par les entreprises , cf. Keynes ) . Ceci handicape la croissance potentielle future , car l’accumulation de connaissance stagne
- En effet , suite à la réduction de l’effort d’innovation des entreprises , le stock de connaissances et les effets d’apprentissage sont plus réduits , donc les innovations sont plus coûteuses , la croissance économique potentielle du pays sera plus réduite ( la croissance de demain est fonction de la croissance passée ) .

Il apparaît alors nécessaire de :
- réguler le marché , en particulier l’Etat peut mettre en place des politiques contracycliques d’investissement et de R-D qui permettent de compenser la réduction de l’effort des entreprises et donc d’accroître la croissance future .
- L’exemple américain est à cet égard représentatif : la révolution conservatrice menée au début des années 80 s’est traduite par des coupes drastiques dans les budgets publics américains , en particulier dans ceux d’infrastructure , d’éducation et de formation . Or comme l’écrivent P.Combemale et A.Parienty : « lorsqu’une partie de la population devient analphabète , et que les routes deviennent impraticables , on découvre l’utilité des dépenses publiques . Plus précisément , on montre que des interventions publiques bien ciblées s’avèrent très efficaces , y compris lorsqu’on tient compte de leur financement par prélèvements obligatoires »

Remarque 2 : Si la recherche fondamentale relève du secteur public afin que chacun puisse librement accéder à ses résultats, le changement technique, selon P Romer sera d’autant plus intense que :
- les innovateurs en espèrent un profit élevé, le progrès technique ne tombe pas du ciel , il est produit et son niveau de production dépend de la rémunération attendue sous forme de droits de propriété, donc de rente de monopole ce qui implique une concurrence imparfaite.
- Or selon Romer(cf aussi l’ex 5 p 71)le marché ne rémunère pas suffisamment les externalités de connaissances générées par le progrès technique. La rente privée que perçoit l’innovateur (les droits issus du brevet) est bien inférieure aux bénéfices sociaux que la population en retire (ex : la découverte d’un nouveau vaccin) . Le marché qui ne rémunère pas assez les innovateurs risque alors de freiner l’effort de R et D par rapport à ce qu’il devrait être pour assurer une croissance économique plus forte.
- La responsabilité de l’Etat est alors selon Romer de veiller à une fiscalité compensatrice (moindre taxation des bénéfices issus de l’innovation), de ne pas décourager les innovateurs sous prétexte de lutte contre les pratiques anticoncurrentielles et de mettre en place des infrastructures (en particulier juridiques) qui encouragent la R et D.

Remarque 3 : on peut opposer deux modèles :
- le premier qui se traduit par un cercle vertueux : le stock de connaissances accumulé par le pays est important : les entreprises bénéficient donc d’un capital de savoir-faire de départ élevé , d’effets d’apprentissage qui vont rendre leurs efforts de R-D plus faciles et moins coûteux . Elles vont donc être incitées à innover , ce qui va à nouveau accroître le stock de connaissances et générait des effets d’apprentissage . Ainsi , on sait que les pays qui innovent le plus aujourd’hui sont des pays qui bénéficient déjà d’un capital d’innovation élevé : les PDEM , en particulier les Etats-Unis et le Japon .
- le second qui se traduit par un cercle vicieux va concerner au contraire les PVD qui n’ont pas de tradition innovatrice , pas de formation spécialisée dans la recherche . Les effets d’apprentissage et le stock de départ sont donc réduits , l’effort de R-D sera donc d’autant plus coûteux et incertain , alors que les entreprises ne sont pas assurées de la rentabilité de leur découverte : les débouchés sont réduits .

conséquences : Dès lors , l’effort de R-D des PVD est faible , ce qui accroît l’écart entre les PDEM et les PVDet donc le différentiel de croissance, et finalement creuse les inégalités .

Solutions : Certains auteurs sont alors favorables à un transfert de technologie des pays riches vers les PVD afin de constituer un capital de connaissances au départ ; d’autres leur répondent qu’il faut encore que ces technologies soient adaptées au pays(cf thèse des technologies appropriées : chapitre mondialisation)

SECTION IV - UNE COMPARAISON INTERNATIONALE .

I - UN EFFORT DE RD INEGAL (ex 2 p 45)

l’effort de RD est très inégalement réparti :

- typologie pour l’année 70 :
· France et Japon aux alentours de 1,8 % du PIB ,
· Allemagne : 2,1 % du PIB , EU : 2,1% du PIB

- périodisation :
· première période : 70-79 : la part des dépenses de RD stagne au Japon et en France autour de 1,8 , se stabilise en Allemagne autour de 2,2 , chute aux USA de 2,8 à 2,3 %
· deuxième période : 79-85 : en France , il progresse de 1,8 à 2,3 ( +0,5 point), au Japon de 1,8 à 2,6 ( +0,8 point ) , en Allemagne de 2,2 à 2,8 ( +0,6) et aux EU la tendance inverse puisque la part regagne 0,5 point .On observe donc dans tous les pays une forte augmentation de l’effort de recherche qui traduit le développement de la concurrence par l’innovation .
· troisième période : 85-90 : l’effort se stabilise aux USA et en Allemagne autour de 2,8 , le Japon après une pause durant l’année 85 poursuit ses efforts et dépasse les EU et l’Allemagne ( 2,9 ) . Quant en France , elle poursuit ses efforts mais reste en retard : son effort est seulement de 2,4% du PIB .
· quatrième période durant les années 90 : la France accroit son effort et rattrappe le japon (3 % du PIB EN 98), l’effort de recherche aux USA se stabilise à 2.8 % , mais chute en Allemagne (à 2.3%) et au RU ( 1.8%)
· En 2001, le RU consacre 1.9% de son PIB à la R et D, la France2.2, l’Allemagne 2.5, les USA 2.8, le Japon 3.1, la suède 4.3.



- taille du pays :Il faut néanmoins tenir compte de la taille du pays :

la France consacre 3 % de son PIB à la R et D , ce qui représente 28 milliards de dollars en PPA, les USA qui ne consacrent que 2.8 % dépensent 226.6 milliards de dollars en PPA soit 11 fois plus que les dépenses françaises .
· Or ce qui est important pour mesurer la compétitivité d’innovation d’un pays et donc sa capacité concurrentielle, ceux sont finalement les sommes qu’il peut mobiliser beaucoup plus que l’effort qu’il réalise .
· Cela se traduit d’ailleurs en nombre de chercheurs : la Suède malgré un effort de recherche par rapport au PIB très élevé ( plus de 4 % du PIB) n’est capable d’aligner que 29 000 chercheurs c’est à dire plus de deux fois moins que l’Italie (76 000 ) qui pourtant ne consacre que 1,1 % de son PIB à la recherche


II - LES REPERCUSSIONS DE CETTE INEGALITE DANS L’EFFORT DE RECHERCHE

Périodisation :
- En 70 :
· les EU représentent à aux seuls les trois quarts des dépôts de brevets sur le marché américain qui est le marché sur lequel la concurrence est la plus forte .
· Tous les autres pays sont à la traîne , en particulier la France qui dépose seulement 3 brevets sur 100 .

- Entre 70 et aujourd’hui :
· la part des brevets déposée par les Américains s’effondre puisqu’elle passe des trois quarts à la moitié ,
· la perte américaine ne profite pas à la France et à l’Allemagne dont les parts stagnent (respectivement 3 et 8 %) .
· Par contre le Japon voit sa postions augmenter très fortement puisque sa part est multipliée par 5 en 20 ans , ce qui traduit bien la très forte augmentation de l’effort de recherche de ce pays .
· plus inquiétant encore en 2001 la France dépose moins de brevets sur le marché US que Taiwan (4456 contre 6545) alors qu’en 1981 la France en déposait 2281 et Taiwan seulement 87.

Remarque :L’OCDE propose un indicateur alternatif, appelé le « nombre de familles triadiques », qui correspond à des brevets déposés simultanément auprès des principaux offices de brevets : Office européen des brevets (OEB), Office de brevets japonais (JPO) et USPTO. Ces brevets sont donc le plus souvent des brevets de grande valeur



- Ceci se traduit , si l’on établit un test de la puissance technologique des grandes entreprises par le fait que :
· les 4 premières sont japonaises ,
· les quatre suivantes américaines ,
· la première européenne est douzième ( Philips ) ,
· la première allemande vingtième ,
· la première française (Thomson ) quarante-huitième .

- Néanmoins :
· les USA conservent une suprématie dans la recherche qui se traduit par un taux de couverture de la balance des paiements technologiques très élevé : 394 % ,
· c’est à dire plus de 3,5 fois plus fort que celui des japonais.
· Surtout au cours des années 90 le dynamisme de la recherche américaine a été telle que l’avance technologique dont bénéficie ce pays s’est accrue.

Conclusion : La situation de l‘Europe est inquiétante puisque la France , l’Allemagne et L’Italie ont une balance des paiements technologiques déficitaires (leur taux de couverture étant inférieur à 1OO %)




III - LES EXPLICATIONS

A - UNE STRUCTURE DE RECHERCHE DIFFERENTE

1 - le financement de la recherche

On peut opposer 3 modèles :
- le modèle européen : la part de la recherche financée par
· les administrations publiques est réduite comparée à ses partenaires 67.3% , mais elle est dominée par l’investissement civil ( 59.8 % pour le public civil, 7.5% pour le public militaire)
· la part des entreprises ne représente que 33%
- les EU , l’investissement :
· financé par le public représente 82 % du total, mais la part du militaire est forte( 20% du total) ,
· les entreprises ne financent que20 % du total
- Au Japon : la part financée par :
· les entreprises est plus élevée qu’aux USA (26% au lieu de 20%)
· celle financée par les administrations représente 74 % du total le japon se différenciant par une recherche militaire quasiment inexistante : 1 % .

2 – le financement de la R et D

Le financement de la R et D est très différent de celui de la recherche fondamentale car on se situe au niveau des innovations de marché, la part du financement opérée par les entreprises va donc augmenter . On peut opposer trois modèles :
- la part de la R et D financée par les entreprises est supérieure à 70 % : Japon et Finland
- la part de la R et D financée par les entreprises est comprise entre 60 et 70 % : Allemagne, Suède , USA.
- La part financée de la R et D financée par les entreprises est inférieur à 52% : France et RU.


B - DES MODELES DIFFERENTS .

1 - le modèle américain

Le paradoxe Américain :
- En apparence les EU sont un modèle de pays libéral .En réalité , l’intervention de l’Etat , en particulier par le biais de la recherche militaire , est considérable .L’Etat va donc orienter l’effort de recherche mené par les entreprises ( cf. le programme pour aller sur la lune de Kennedy , programme guerre des étoiles de Reagan, le rôle du pentagone dans le lancement d’internet )
- Néanmoins , ceci n’empêche pas que les entreprises exercent un rôle important dans la recherche , en particulier dans son orientation . Alors qu’en France , les chercheurs se consacrent principalement à la recherche fondamentale qui ne comporte pas véritablement de débouchés économiques , aux EU , les chercheurs en particulier dans les universités sont associés aux entreprises , créent des entreprises et font de la R-D qui débouche sur la production de biens innovants .

2 - le modèle japonais

Dans les années 50 , les Japonais copient l’occident ; dans les années 60 , ils améliorent les produits occidentaux par des innovations mineures ; à partir des années 70 , les innovations incrémentales se sont développées . La force du Japon repose donc sur 4 points
- un effort de formation de la main-d’œuvre très important
- comme pour l’Allemagne , une des chances du Japon a été de se voir interdire après la guerre de 39-45 de mener des recherches militaires qui , étant secrètes n’irriguent pas le tissu économique ( handicap de la France et des EU). Le Japon a pu alors se concentrer sur la recherche civile et déposer des brevets profitant directement aux entreprises
- un effort de R-D résultant d’un taux d’épargne très élevé
- le MITI : le Ministère de l’Industrie va coordonner l’action de recherche des entreprises en orientant l’effort de recherche vers les marchés qui sont les plus porteurs , c’est-à-dire que le MITI ne se substitue pas aux entreprises , mais qu’il vient en complément des entreprises en gouvernant par ce que l’on a appelé l’administration guidance qui est basée sur des mesures incitatives .

3 - le modèle européen

La recherche européenne est relativement peu performante (cf. l’informatique française) . Ceci résulte essentiellement de 2 tendances :
- chaque pays européen a voulu développer sa propre recherche , ses propres normes technologiques afin de bénéficier de champions nationaux qui pourraient être compétitifs sur le marché mondial . Ceci se traduit au niveau européen par des déséconomies d’échelle : plusieurs pays menant la même recherche et arrivant séparément au même résultat
- chaque pays a voulu être présent partout : les efforts de recherches ont donc été dilués . Or ,plus la taille est restreinte , plus l’effort de recherche doit être concentré , ce qui nécessite une spécialisation sur des créneaux .

conséquences : Face à cette situation d’échec relatif , 2 tendances peuvent être anticipées :
- le modèle anglais à l’époque de Thatcher ultra libéral : qui conduit à une retraite pure et simple : l’Etat diminuant son effort de recherche et le déléguant aux entreprises étrangères , ce qui à terme nuirait à la compétitivité du pays
- poursuivre les efforts de recherche , mais non plus au niveau national , au niveau européen , ce qui permettrait de mobiliser des capitaux beaucoup plus importants ( d’où économies d’échelle ) , d’éviter une concurrence inefficace , permettrait de lutter à armes égales avec les Américains , mais nécessiterait de la part de chaque pays un effort de spécialisation , c’est-à-dire l’abandon de certains créneaux , une division internationale de la recherche et de la production s’opérant au niveau européen .L’égoïsme de chaque pays conduit au pessimisme ; par contre , l’exemple d’Airbus ou le développement des accords entre firmes européennes, les mouvements de concentration permettent d’être plus optimistes .


IV - LA SITUATION SPECIFIQUE DES PVD

Comme nous l’avons vu dans la croissance endogène, les PVD ont accumulé un tel retard dans l’effort de recherche que l’innovation est très réduite et la croissance potentielle faible.
- Dès lors, il peut sembler utile d’opérer des transferts de technologie, c’est-à-dire que les pays du Nord vont à titre gracieux ( envoi de formateurs, assistance technique,... par l’Etat ) ou contre rémunération ( vente de brevets,... ) exporter vers les PVD les technologies qu’ils ont accumulé, permettant ainsi aux PVD de réaliser le saut technologique nécessaire au décollage et à la croissance endogène.
- Cette solution a été critiquée pendant longtemps ; un certain nombre de pays considérant que cela conduisait à une dépendance des PVD envers les PDEM et que ces technologies étaient de toutes façons non appropriées à la situation des PVD (cf. thèse des technologies appropriées).
- aujourd’hui, la situation semble s’être inversée : les PVD sont très demandeurs, en particulier se concurrencent pour attirer les multinationales et leur technologie .
- Il n’en reste pas moins que, malgré certaines réussites d’autant plus citées qu’elles sont rares, l’écart technologique n’a cessé de croître entre PVD et PDEM, les efforts de formation des PVD étant souvent contrariés par la fuite des cerveaux vers les pays riches. Le PNUD note ainsi : « entre 85 et 90, l’Afrique a perdu 60 000 cadres moyens et supérieurs. Entre 72 et 85, la Chine, la Corée, l’Inde et les Philippines ont envoyé aux USA 145 000 travailleurs dotés d’un bagage scientifique
- Néanmoins l’exemple japonais au 19ème siècle montre qu’il n’y a pas de fatalité au retard technologique . En effet le Japon , à commencer par emprunter des technologies aux pays européens , en important des machines qu’il copiait, ce qui lui a permis de connaître un décollage économique d’autant plus rapide qu’il a pu très rapidement avoir accès aux technologies les plus modernes , sans avoir à passer par les étapes qu’avaient connu les pays ayant décollé les premiers . Peu à peu le Japon a pu ainsi rattraper son retard opérer une remontée de filière : c’est à dire passer des filières les moins rentables (textile , etc.) aux filières dégageant le plus de valeur ajoutée (production de machines, etc.). Les NPI d’Asie sont aujourd’hui en train d’appliquer la même stratégie : La Corée du Sud consacre 3% de son PIB à la R et D et dépose 3763 brevets au USA en 2001( 18 seulement en 1981) c'est-à-dire beaucoup plus que l’Italie (1978 en 2001) et rattrappe la France (4456) et le RU (4356).
- Il faut cependant relativiser et insister sur le rôle relativement faible du progrès technique dans le décollage de la croissance des NPI qui amène P Krugman à écrire que « les dragons doivent leur richesse plus à leur transpirationqu’à leur inspiration ». Ceci peut être expliqué par la réticence des PDEM à diffuser leur technologie les plus modernes vers les dragons .



PARTIE II - DEFINITIONS ET MESURES DE L’INVESTISSEMENT

INTRODUCTION : DISTINCTION INVESTISSEMENT-CAPITAL ET ACCUMULATION.

Les trois termes ne sont pas synonymes :

· le capital est un stock, c’est-à-dire que :
- l’on se fixe à un instant donné du temps et qu’on dénombre les moyens de production que l’entreprise détient à cette date.
- Mais ce stock résulte des flux qui ont été réalisés durant les périodes précédentes.
-
· l’accumulation du capital :
- si le capital est un stock, l’investissement est un flux.
- Mais un investissement ne correspond pas forcément à une augmentation du stock de capital, ce qui correspond à la définition de l’accumulation du capital.

distinction investissements bruts des investissements nets :
· Les investissements bruts correspondent aux flux d’entrée du capital.
· mais au moment même où les entreprises introduisent de nouveaux moyens de production, elles détruisent du capital, qui est devenu obsolète ou usé, ce sont les déclassements ( les flux de sortie). L’investissement net sera alors la différence entre les flux d’entrée : l’investissement brut et les flux de sortie ( les déclassements ).
· Deux cas doivent alors être distingués :
· Tant que l’investissement net est positif, le stock de capital s’accroît, les entreprises accumulent du capital.
· Au contraire, si l’investissement net est négatif, soit parce que l’investissement brut est faible, soit parce que les déclassements sont élevés, alors les entreprises réduisent leur stock de capital.


SECTION I - DEFINITION ET MESURE DU CAPITAL.

INTRODUCTION : La richesse des nations selon la Banque mondiale

Les limites du PIB ont conduit des économistes et des organismes nationaux et internationaux à proposer d'autres indicateurs. La Banque mondiale a récemment présenté une évaluation de la richesse des nations en s'inspirant de la distinction entre flux et stock et des travaux sur la notion de développement soutenable. Elle propose un classement des pays selon leur stock de capitaux et non selon leur PIB. L'idée est que le capital physique ne constitue pas la seule composante de la richesse productive d'un pays. L'évaluation doit être complétée par la prise en compte de la richesse humaine et de la richesse naturelle. Pour évaluer ainsi la richesse d'une nation, on calcule la valeur de trois types de capitaux :
· les actifs naturels, soit la valeur de la terre, de l'eau, du bois, de l'or et d'autres matières premières ;
· les capitaux produits, soit la valeur des machines, des usines, des routes et des chemins de fer ;
· les ressources humaines, soit la valeur représentée par " la capacité productive des individus, appréhendée par les niveaux d'éducation et de nutrition ".
Selon l'évaluation de la Banque mondiale pour 192 pays, le capital physique représente seulement 16 % de la richesse totale, le capital naturel est plus important avec 20 % des richesses. Et le capital humain compte encore davantage puisqu'il représente jusqu'à 64 %. Toutefois, comme le montre le tableau, la composition varie selon les régions du monde.

La domination du capital humain est particulièrement marquée dans les pays à revenu élevé. Dans certains d'entre eux tels que le Japon, l'Allemagne ou bien encore la Suisse, il représente jusqu'à 80 % du capital total. A l'inverse en Afrique sub-saharienne, plus de la moitié de la richesse réside toujours dans les ressources naturelles.
Pour mesurer l'évolution de la richesse au cours du temps, la Banque mondiale utilise en outre un taux d'" épargne globale ". Les pays qui enregistrent les meilleurs résultats sont Hong-Kong, le Japon, la République de Corée et Singapour. A l'inverse, l'Afrique sub-saharienne tend à " désépargner " depuis la fin des années 70.

Le capital est un terme difficile à définir parce qu’il est polysémique, c’est-à-dire que l’on désigne sous un même nom des réalités différentes :

I - LE CAPITAL AU SENS FINANCIER DU TERME

En un premier sens on peut parler de capital financier :
· A l’origine, on appelle capital le principal d’une dette, c’est-à-dire la somme prêtée par opposition aux intérêts, qui, eux représentent la rémunération du prêteur.
· Par extension, on désigne sous le terme capital, tout placement d’argent, sous forme d’épargne, de valeurs mobilières, de propriété immobilière ; le capital, en ce sens, est un patrimoine ( stock de valeur en un instant donné du temps qui rapportera à son propriétaire un revenu, un flux ).

II - LE CAPITAL AU SENS TECHNIQUE DU TERME

Le capital peut être aussi pris au sens technique du terme : il désigne alors selon D.CLERC : «l’ensemble des moyens de production durables , c’est-à-dire dont la durée de vie anticipée est supérieure ou égale à un an , grâce auxquels une société accroît l’efficacité du travail de ses membres » .
On distinguera alors le capital productif et le capital improductif :
· Le capital peut être productif (c’est-à-dire qu’il sert directement dans des activités de production : machines, usines ) ;
· le capital peut être considéré comme improductif, c’est-à-dire qu’il ne sert pas à des opérations de production au sens strict ,il fournit à la collectivité des équipements sous forme d’infrastructures , qui la rendront plus efficaces (réseaux routiers , construction d’écoles , d’hôpitaux ) . On parlera alors de capital improductif, car il ne contribue pas directement à la production. On intégrera dans le capital improductif la construction de logements dont la durée de vie est longue

III - LE CAPITAL AU SENS COMPTABLE DU TERME .

Le capital peut avoir un sens comptable : on retiendra ici l’apport réalisé par différentes personnes sous la forme d’argent ou en nature ( brevets , terrains , immeubles ) qui serviront de capital de départ à l’entreprise . On parle alors de capital social : il est divisé en actions (société anonyme ) ou en parts sociales ( SARL , .... ) qui représentent chacune l’apport des propriétaires au capital de l’entreprise et qui sont donc un signe de propriété d’une partie de l’entreprise .

IV - LE CAPITAL HUMAIN .

Aujourd’hui, on considère que le capital accumulé par une nation ou une entreprise ne se limite plus à l’acquisition de biens de production . En effet , la compétitivité de l’entreprise repose en partie sur le stock de qualifications et de connaissances , c’est-à-dire sur le niveau d’éducation et d’expérience permettant aux travailleurs d’accroître l’efficacité du capital physique . On appelle ce stock de capital le capital humain ( cf. chapitre marché du travail ) .

CONCLUSION :

Le capital est donc une notion recouvrant sous un même nom des réalités très différentes . Pourtant elles semblent avoir , au moins , un point commun : « c’est que chaque fois , le capital engendre un plus : plus de production avec le capital technique , des bénéfices espérés avec le capital comptable , un intérêt ou un loyer avec le capital financier » (D.Clerc ) . Toute la question est alors de savoir si ce plus apporté par le capital résulte directement de la contribution du capital à la production ou bien s’il ne résulte que de la vertu que possède le capital de rendre le travail plus productif . On oppose ici 2 courants de pensée :

· le courant marxiste considère que seul le travail crée de la valeur . Le capital ne serait dans un sens que du travail passé accumulé qui rendrait le travail actuel plus productif . Marx peut alors en conclure , selon D.Clerc , « le capital rapporte au sens où un chien de chasse rapporte le gibier : il ne crée rien , mais il donne à son propriétaire le droit à une part de ce qu’a créé celui qui s’en est servi »
· le courant libéral ( classiques et néo-classiques ) considère que le capital est un facteur de production qui a contribué à la réalisation des biens et des services , il est donc normal que le capital reçoive une rémunération qui soit proportionnelle à la contribution qu’il a apportée . Ainsi , l’analyse néo-classique considère-t-elle que chaque facteur de production ( travail et capital ) est rémunéré en fonction de sa productivité marginale .


SECTION II - DEFINITION ET MESURE DE L’INVESTISSEMENT (1 p 56)

On peut définir l’investissement en fonction de plusieurs critères :
· en fonction de l’agent qui investit
· en fonction du type d’investissement réalisé



I - L’INVESTISSEMENT EN FONCTION DE L’AGENT

On peut distinguer trois types d’agent qui réaliseront des investissements différents :



TYPE D’AGENT
TYPE DE BIEN
OBJECTIF DE L’INVESTISSEMENT
- les entreprises
bâtiments , terrains , machines et matériels auquel on pourrait ajouter l’investissement immatériel
améliorer l’efficacité productive de l’entreprise
- les administrations privées ou publiques
les achats de bâtiments , terrains , gros matériel par les collectivités
réaliser des équipements collectifs afin de produire des services non marchands fournis gratuitement aux usagers ou à un prix inférieur de 50% à leur coût
- les ménages
achats de terrains et de logements
se loger tout en épargnant puisque la valeur du bien se conserve dans le long terme et que l’on pourra en tirer un revenu si on le loue

Le type d’agent joue donc un rôle essentiel dans la classification de l’investissement réalisé : ainsi
· Si une entreprise construit un immeuble , il sera comptabilisé dans l’investissement productif.
· Si c’est une administration , dans l’investissement collectif .
· Mais aussi , si une entreprise individuelle achète une voiture pour son activité ( ex : un boulanger pour livrer son pain ) , cela sera comptabilisé dans l’investissement productif .
· Au contraire , si le boulanger acquiert une voiture pour ses déplacements privés , cet achat sera comptabilisé comme une consommation durable .

II - LES DIFFERENTS TYPES D’INVESTISSEMENT ET LEUR MESURE .

A ) LA DISTINCTION CAPITAL FIXE- CAPITAL CIRCULANT .

La distinction entre les deux types de capital s’opère en fonction de l’incorporation au produit :
· le capital circulant qui est détruit au cours du processus de production est incorporé totalement au produit . La comptabilité nationale comptabilise le capital circulant ( matières premières , ...) dans la rubrique consommations intermédiaires . Elle ne l’assimile donc pas à du capital puisque sa durée de vie est inférieure ou égale à un an .
· le capital fixe dont la durée de vie est supérieure à un an n’est que partiellement incorporé aux biens à la production des quels il a contribué au cours des différents processus de production . Le capital fixe ne s’use donc que progressivement .

B - LA DISTINCTION INVESTISSEMENT BRUT- INVESTISSEMENT NET .

Définition de l’amortissement du capital : L’investissement en capital fixe consiste en achats de biens qui ne sont pas détruits au cours du processus de production Il n’en reste pas moins :
· qu’à chaque processus le capital connaît une usure physique .
· Au cours du temps , il connaît aussi une obsolescence technique ( dépassé technologiquement ) .
· On peut donc dire que le capital perd de la valeur ( on appelle cela la consommation de capital fixe )
· les entreprises devront donc à un moment donné remplacer leur capital venant à échéance , on appelle cela l’amortissement du capital .

Ceci conduit à distinguer l’investissement brut de l’investissement net :
· l’investissement brut ou FBCF ( Formation Brute de Capital Fixe ) (2 p 56) désigne la valeur des biens durables qui sont acquis pour être utilisés pendant au moins un an dans le processus de production . Cet investissement ne se traduit pas obligatoirement par une augmentation du potentiel productif de l’entreprise équivalente aux nouveaux investissements . En effet , une partie de ceux-ci servent à remplacer les machines usées ou obsolètes . Ces investissements dits de remplacement correspondent aux amortissements , puisqu’ils sont achetés grâce aux sommes mises de côté par l’entreprise pour faire face à ces renouvellements
· l’investissement net ou FNCF désigne alors uniquement l’investissement nouveau permettant une augmentation du volume du capital technique de l’entreprise . Il exclu donc les amortissements :

FNCF = FBCF – amortissement

C – LA MESURE : LE TAUX D’INVESTISSEMENT BRUT OU NET


Il vise à mesurer l’effort d’investissement d’un pays, en particulier sa capacité à accroitre sa compétitivité et à répondre aux variations des commandes

Le taux d’investissement brut est le rapport entre l’investissement brut (la FBCF) et la valeur ajoutée :
FBCF x 100
PIB

Le taux d’investissement net :
FNCF x 100
PIN


C - LES DIFFERENTS TYPES D’INVESTISSEMENT PHYSIQUE .

On distingue trois types d’investissement qui répondent à des motivations différentes et ont des effets opposés sur l’emploi :


DEFINITION
MOTIVATION
EFFET SUR L’EMPLOI
- INVESTISSEMENT DE REMPLACEMENT
il correspond à l’amortissement , puisqu’il est acquis grâce aux sommes mises de côté par l’entreprise pour faire face au renouvellement du capital
Remplacer les machines usées ou victimes de l’obsolescence , tout en sachant qu’elles ne sont pas remplacées à l’identique , que généralement les machines neuves sont plus productives , intègrent du progrès technique
Pas d’effet évident
- INVESTISSEMENT DE CAPACITE
C’est un investissement destiné à accroître les capacités de production de l’entreprise
il a pour objectif de répondre à une augmentation de la demande que reçoivent les entreprises
Puisque qu’il consiste à rajouter de nouvelles machines à celles déjà existantes afin de produire plus , il se traduit généralement par des créations d’emploi
- INVESTISSEMENT DE PRODUCTIVITE
il vise à introduire des machines plus productives intégrant le progrès technique
les entreprises cherchent donc à bénéficier de gains de productivité et donc à produire à moindre coût
l’effet sur l’emploi est généralement négatif à court terme , car les entreprises cherchent ainsi à économiser de la main-d’œuvre


Remarque : La distinction entre ces différents types d’investissement est en partie factice . Un investissement combine généralement 2 caractéristiques :
· il vise à augmenter le potentiel productif de l’entreprise
· tout en introduisant des machines plus productives .

Constat :
- Evolution de l’investissement de capacité :
· On constate qu’au début des années 70 , l’investissement de capacité représente presque 50 % de l’investissement du total de l’investissement productif . En effet , la croissance économique est forte , supérieure à 5 % par an en moyenne . Les entreprises anticipent donc un accroissement de la demande et augmentent donc leurs capacités de production .
· Entre 74 et 81 , le taux de croissance de l’économie s’effondre , passant de 5 % à moins de 1% par an . La part des investissements de capacité diminue donc , elle se maintient à un niveau bas ( moins de 40% du total ) jusqu’en 87 , car la croissance économique est atone ( moins de 2 % par an ) .
· Entre 87 et 89 , la croissance remonte à 4 % par an , l’investissement de capacité voit donc sa part augmenter ( il revient donc aux alentours de 40% ) .
· Mais , dès 90 , le taux de croissance s’effondre , passant de 4 à moins de 1% , la part de l’investissement de capacité diminue à un niveau jamais atteint aux alentours de 15 % (12% en 1993)
· A la fin des années 90 la reprise de la croissance entraine une remontée de la part des investissements de capacité qui se situe aux alentours de 25% en 2000.
· Les années 2000 : mais un retournement de tendance s’opère au cours des années 2002-2005 : la faiblesse de la croissance détermine une chute de la part des investissements de capacité.

- Evolution de l’investissement de remplacement :
· La part de l’investissement de remplacement est plus ou moins stable sur la période (entre 25 et 28% du total) : elle augmente généralement quand les investissements résultant d’une période d’accumulation du capital forte arrivent à échéance et inversement .

- Evolution de l’investissement de productivité :
· L’investissement de productivité est le grand gagnant de la période. Excepté entre 87 et 89 , il a vu sa part augmenter fortement , passant de moins de 25 % à plus de 40% .Dans un contexte de faible croissance économique , les entreprises cherchent à gagner des parts de marché en produisant à plus faible coût que leurs concurrents , grâce aux gains de productivité résultant de l’investissement de productivité .

D - INVESTISSEMENT AUTONOME- INVESTISSEMENT INDUIT .

n L’investissement induit est généralement un investissement de capacité . En effet , c’est un investissement qui est motivé par l’accroissement constaté ou anticipé de la demande que reçoivent les entreprises . Cet investissement est donc largement déterminé par l’évolution de la croissance économique . Dans les périodes d’expansion , il est fort ; dans celles de récession , il est faible .

n L’investissement autonome : pour compenser les fluctuations d’investissement induits, sont lancés généralement par l’Etat des investissements autonomes qui eux sont indépendants des variations de la demande. Ils consistent généralement en des programmes d’investissements publics contracycliques , c’est-à-dire qui visent à aller à l’encontre des tendances naturelles de l’économie .On constate ainsi , que dans les années 70 les grandes entreprises nationales ont lancé des campagnes d’investissement afin de compenser la chute du taux d’investissement privé résultant de l’entrée en crise . L’investissement autonome répond généralement à des préoccupations de long terme ou structurelles ; ils visent ainsi à améliorer l’efficacité et la compétitivité de l’économie( investissement stratégique) , l’innovation ou à mettre en oeuvre des infrastructures ( politique de grands travaux ) .


E - DISTINCTION INVESTISSEMENT MATERIEL-INVESTISSEMENT IMMATERIEL (3 p 57)

Définition de l’investissement immatériel :
· Le Conseil National de l’Information Statistique définit donc « un investissement immatériel comme une dépense qui , bien qu’inscrite en charge d’exploitation, développe la capacité de production et valorise l’entreprise en s’accumulant sous la forme d’un capital amortissable sur une production future et en constituant une valeur patrimoniale cessible sur le marché » .
· Pour l’OCDE « l’investissement immatériel recouvre toutes les dépenses de long terme autres que l’achat d’actifs fixes que les entreprises consentent dans le but d’améliorer leurs résultats . » . On distingue 4 types d’investissement immatériel :
- la Recherche et le Développement ( R-D ) .
- les dépenses de formation de la main d’œuvre
- la publicité
- les dépenses de logiciel

Constat : Aujourd’hui encore , les investissements immatériels ne sont pas comptabilisés dans la FBCF ( sauf les logiciels, les dépenses de prospection minière, les œuvres littéraires et artistiques , ainsi que les dépenses militaires pouvant servir à des fins civils : cf. 2 p 56 ) qui prend essentiellement en compte les biens physiques . Ils sont considérés comme étant une dépense courante .

Evolution prévisible : Mais , une tendance récente conduit à les assimiler à des investissements , car ils sont considérés comme des dépenses consenties pour améliorer à terme les résultats de l’entreprise .

Raisons expliquant l’évolution : La prise en compte de l’investissement immatériel est d’autant plus nécessaire que (5 p 58):
· il influe sur l’efficacité de la production , sur le rythme de renouvellement des produits ou sur les ventes .
· Il apparaît donc comme un des éléments déterminants de la compétitivité-prix et hors-prix des entreprises.
· son taux de croissance a été beaucoup plus rapide que celui de la FBCF) : entre 74 et 99 , la valeur de l’investissement matériel a été multipliée par 5 , alors que celle de l’investissement immatériel l’a été par 13 . La part de l’investissement immatériel représente donc 50 % de l’investissement matériel , il n’en représentait que 21,2 % en 74 . De plus , dans l’industrie , l’immatériel représente 143% de l’investissement matériel , et jusqu’à 6 ou 7 fois plus dans certaines branches .
· on observe depuis plusieurs années une faible croissance , voire une diminution du taux d’investissement qui est basé sur la FBCF ( FBCF / PIB x 100 ) . Ceci ne signifie pas forcément que l’effort d’investissement des entreprises diminue . On peut en effet penser que les entreprises substituent en partie désormais à des investissements matériels des investissements immatériels .
Conclusion : Dès lors , l’inquiétante faiblesse de l’effort d’accumulation des pays développés depuis quelques années serait en partie fictif , puisqu’il résulterait principalement du développement de l’investissement immatériel .


PARTIE III : ACCUMULATION, INVESTISSEMENT ET CAPITAL :L’ANALYSE THEORIQUE DE L’INVESTISSEMENT

INTRODUCTION – L’OPPOSITION DES LOGIQUES NEO-CLASSIQUE ET KEYNESIENNE

La décision d’investissement est une décision complexe parce que :
· elle est prise à partir d’une réflexion anticipant l’évolution économique générale en particulier le dynamisme de la croissance, l’augmentation des commandes, donc la nécessité de réaliser des investissements de capacité pour répondre à l’accroissement des débouchés
· mais elle est aussi dépendante de la santé de l’entreprise : c'est-à-dire de sa capacité à dégager des profits mais aussi des contraintes financières qu’elle subie (le taux d’intérêt, sa capacité à s’endetter)

Nous allons voir dans un premier temps que deux grandes logiques s’opposent ( la réalité est plus complexe) :
- la logique keynésienne qui s’intéresse essentiellement (mais pas seulement) aux conditions de la demande
- la logique néo-classique qui considère que les variables de l’offre sont primordiales.


SECTION I - L’ANALYSE NEO-CLASSIQUE DE L’INVESTISSEMENT

I - LA RELATION INVESTISSEMENT -TAUX D’INTERET

On s’appuiera sur les connaissances issues des cours de première sur la monnaie et sur la régulation par le marché (loi de l’offre et de la demande)

A - LES DETERMINANTS DE L’OFFRE DE CAPITAL .

Postulat de base :
· L’offre de capital correspond à l’épargne : à revenu constant , une augmentation de l’effort d’épargne de la part des ménages nécessaire pour assurer l’accroissement des capacités de production requiert une réduction des dépenses de consommation .
· Or selon , les néo-classiques , les ménages sont caractérisés par la préférence pour le présent ( time preference ) qui les conduit à déprécier le futur : un ménage préférera toujours consommer aujourd’hui plutôt que de reporter sa consommation dans le futur .
· Pour que le ménage épargne , il faut qu’en contrepartie du coût psychologique que génère la renonciation à consommer aujourd’hui , ils reçoivent une rémunération qui leur permettra de consommer davantage demain .
· Cette rémunération est le taux d’intérêt réel ( les ménages n’étant pas victimes d’illusion monétaire ) .

Conclusion : Ainsi , l’épargne est une fonction croissante du taux d’intérêt réel car pour que le ménage accepte de sacrifier une partie croissante de sa consommation d’aujourd’hui , il faut qu’il reçoive en dédommagement une rémunération croissante qui compense le coût psychologique de l’effort d’abstinence qu’il réalise .

B - LES DETERMINANTS DE LA DEMANDE DE CAPITAL .

Postulat de base : Les entreprises fixent la demande de capital en fonction d’une analyse coût-bénéfice ( elles sont rationnelles ) .Elles comparent donc:
· ce que leur coûte une unité supplémentaire de capital , c’est-à-dire le taux d’intérêt réel , qu’elles doivent rembourser si elles empruntent , qu’elles perdent ( coût d’opportunité ) si elles ne placent pas leur capital sur le marché financier .
· à ce que leur rapporte une unité supplémentaire de capital , c’est-à-dire la productivité marginale du capital . Sachant que les néo-classiques postulent l’existence de la loi des rendements décroissants , les entreprises ont une productivité marginale du capital décroissante quand le capital augmente .

Conclusion : P.Delfaud peut en conclure : les entrepreneurs ne vont accroître leur investissement que si la rémunération du capital s’abaisse , la demande de biens capitaux est donc une fonction décroissante du taux d’intérêt réel .

C - L’EQUILIBRE .

Détermination de l’équilibre :
· L’offre et la demande de capital sont déterminés par le taux d’intérêt réel .
· Offreurs et demandeurs de capitaux vont donc se rencontrer sur le marché des capitaux ; il en résultera un équilibre du marché du capital qui égalise l’offre et la demande de capital pour un taux d’intérêt réel d’équilibre .
· Ce taux d’intérêt réel d’équilibre présente la caractéristique d’égaliser le taux de préférence pour le présent des ménages et la productivité marginale du capital des entreprises . :

Remarque :
· Une fois que les ménages ont déterminé en fonction du taux d’intérêt réel leur niveau d’épargne , ils fixeront le niveau de consommation qui est un reliquat : la consommation = Revenu - Epargne .
· les entreprises prennent leurs décisions d’investissement en fonction du seul taux d’intérêt réel car les néo-classiques postulent qu’elles n’éprouvent aucune difficulté à écouler leur production . Ceci résulte de la loi de Say..


II - LA LOI DE SAY

Présentation de la loi de Say ou loi des débouchés : La loi de Say indique que l’offre crée sa propre demande et l’amène à son niveau . En effet , le niveau de production des entreprises est fixé sur le marché du travail en fonction du taux de salaire réel d’équilibre . Les entreprises vont donc réaliser une production qu’elles n’auront aucune difficulté à écouler puisque les revenus qu’elles auront distribués serviront à acquérir les biens qu’elles auront produits :
· la partie du revenu qui sera consommée fournit directement des débouchés aux entreprises
· la partie du revenu qui est épargnée fournit quant à elle des débouchés indirects

Conséquences de la loi de Say : l’épargne est automatiquement investie :
· On ne voit pas en effet pourquoi un ménage épargnerait s’il ne reçoit pas une rémunération sous forme d’intérêt , *
· on ne comprend pas pourquoi quelqu’un distribuerait une rémunération à l’épargnant s’il ne faisait pas une utilisation productive de l’épargne sous forme d’investissement .
Say explique cela en disant : « Il est bon de remarquer qu’un produit terminé offre dès cet instant un débouché à d’autres produits pour tout le montant de sa valeur . En effet , lorsque le dernier producteur a terminé un produit , son plus grand désir est de le vendre , pour que la valeur de ce produit ne chôme pas entre ces mains . Mais il n’est pas moins empressé de se défaire de cet argent que lui procure sa vente pour que la valeur de l’argent ne chôma pas non plus . » Dès lors , « l’argent ne remplit qu’un office passager dans ce double échange et , les échanges terminés , il se trouve qu’on a toujours payé des produits avec des produits » .

Conclusion : La monnaie n’est donc qu’un voile , qui n’influence pas l’activité économique .

III - LA THEORIE QUANTITATIVE DE LA MONNAIE .

Postulat de base : La théorie quantitative de la monnaie considère que la monnaie est un voile qui n’a aucune influence sur le volume de la production , ni sur les taux d’intérêt réels qui sont déterminés par les facteurs réels de l’économie . En effet , si l’on pose :
M V = P T
sachant que :
· M représente la masse monétaire en circulation ,
· V la vitesse de circulation de la monnaie , c’est-à-dire le nombre de fois où M est utilisé dans les échanges ( V supposé constante à court terme ) ,
· P le niveau général des prix
· T le niveau des transactions ( qui dépend du niveau de production ) .

Que se passe-t-il si l’on augmente la masse monétaire en circulation ?:

- D’après les auteurs néo-classiques , ceci n ’aura aucun effet sur le niveau des transactions , cela se répercutera complètement dans une augmentation proportionnelle des prix .
- Dès lors une politique d’expansion de la masse monétaire visant à augmenter la demande des ménages par distribution de revenus n’aura aucun effet sur la production .
- Elle engendrera certes une augmentation du salaire nominal , mais celle-ci étant compensée par l’augmentation des prix , le salaire réel demeure constant .
- Cela n’aura pas non plus d’effet dans la répartition entre épargne et consommation . En effet , l’augmentation de la masse monétaire va engendrer une augmentation de l’inflation que les prêteurs de capitaux ont anticipé , s’ils ne sont pas victimes d’illusion monétaire . Ils vont réagir par une augmentation du taux d’intérêt nominal compensant l’augmentation des prix , le taux d’intérêt réel demeurant alors constant , ainsi que le niveau d’épargne souhaité par les agents .

CONCLUSION

Dans une perspective néo-classique , la seule chose que les autorités publiques ont à faire afin de favoriser l’accumulation du capital est d’intervenir le moins possible . En effet , le système s’autorégule : les entreprises n’ont aucune difficulté à trouver des débouchés ( loi de Say ) . Si elles veulent accroître le niveau de leur investissement , il leur suffit d’accepter une augmentation du taux d’intérêt réel qui engendrera une augmentation du niveau d’épargne qui assurera l’équilibre du marché du capital. Mais on peut constater que La vérification empirique est assez décevante : le lien entre taux d’intérêt et investissement n’est pas très solide


SECTION II - L’ANALYSE KEYNESIENNE DE L’INVESTISSEMENT

I - UNE CRITIQUE DES CONCEPTIONS NEO- CLASSIQUES

L’analyse keynésienne de la monnaie, donc du taux d’intérêt, propose une démarche très différente de celle des néo-classiques .


Néo-Classiques
Keynésiens
conception de l’avenir
l’avenir est connu avec certitude car les individus rationnels (HO) disposent de toutes les informations possibles leur permettant d’agir sur le marché
le monde est dominé par l’incertitude face à l’avenir (8 p 60)

conséquences sur l’action des individus

les individus qui sont des homo oeconomicus rationnels et égoïstes n’ont alors qu’à optimiser leurs actions en fonction du cadre dans lequel il se situe


les individus vont alors essayer de recourir à diverses techniques de réduction de l’incertain qui doivent leur permettre de réduire les risques d’erreurs quant aux décisions telles l’investissement qui engage l’avenir .Mais la rationalité des individus est limitée ; ils vont alors adopter des comportements moutonniers qui les conduisent à se conformer à l’opinion dominante ou à supposer que l’avenir est une simple répétition du présent . Il n’en demeure pas moins que le risque d’erreur est important .


raisons de la détention de monnaie

Dès lors , la monnaie ne se présente que comme une technique qui permet de faciliter les échanges par rapport au troc ( motif d’encaisses- transactions ) .La monnaie n’est donc qu’un voile .

la détention de la monnaie va être déterminée par cette incertitude vis-à-vis de la monnaie . En effet , la monnaie présentant l’intérêt , par définition , d’être totalement liquide , l’individu va la détenir pour des raisons psychologiques :elle lui permet de se rassurer . Plus le risque d’erreur dans les calculs de l’individu sera fort , plus la détention de monnaie sera importante
Définition et rôle du taux d’intérêt
le taux d’intérêt dépend de la sphère réelle ; il a pour rôle d’inciter à la renonciation à la consommation en rémunérant l’épargne . Dans la logique néo-classique , il n’y a pas de thésaurisation car les individus n’y auraient aucun intérêt , étant donné que la monnaie n’est qu’un intermédiaire des échanges et n’est pas recherchée pour elle-même
contrairement aux néo-classiques , la monnaie n’est pas seulement un voile, du fait de la préférence pour la liquidité les individus vont détenir de la monnaie pour elle-même, le rôle du taux d’intérêt est alors de compenser le coût psychologique que l’individu subit quand il renonce à la liquidité en opérant un placement . Keynes considère donc que , contrairement aux classiques , le taux d’intérêt n’agit pas dans la sphère réelle ( il n’opère pas la répartition du revenu entre consommation et épargne ) mais dans la sphère monétaire ( il répartit ce qui est détenu sous forme liquide et sous forme de placement )

II – LE ROLE DE LA MONNAIE DANS L’ANALYSE KEYNESIENNE (cf. complément de cours n°1 et cours de première)

III - LA DECISION D’INVESTISSEMENT DE L’ENTREPRISE .

L’apport de Keynes dans ce domaine est plus réduit .
Postulat de base :
- selon Keynes la décision d’investissement des entreprises dépend de la comparaison entre l’efficacité marginale du capital ( en terme moderne , on parlerait de productivité marginale du capital ) et du taux d’intérêt du marché qui dépend lui-même de la préférence pour la liquidité des ménages et du niveau de l’offre de monnaie fixée par l’Etat .
- L’entreprise investira si l’efficacité marginale du capital est supérieure au taux d’intérêt du marché .
Répercussion des politiques monétaires :
- On voit bien ici l’influence des autorités monétaires sur la décision des entreprises . Si l’efficacité marginale du capital est réduite , les entreprises n’investiront que si le taux d’intérêt est faible ,
- les autorités monétaires doivent donc intervenir pour diminuer le taux d’intérêt en appliquant une politique monétaire expansive .

Conclusion :L’apport fondamental de Keynes ici est de montrer que :
· l’investissement ne résulte pas d’une offre de capital préexistante , accumulée sous forme d’épargne ,
· mais qu’au contraire c’est l’investissement qui engendre en tant que composante de la demande , l’épargne .


IV - LA DEMANDE EFFECTIVE , CAUSE ET CONSEQUENCE DE L’INVESTISSEMENT

A - LA DEMANDE EFFECTIVE DETERMINE L’INVESTISSEMENT : LE MODELE DE L’ACCELERATEUR (11 P 61)

Keynes, dans la théorie générale fait dépendre la décision d’investissement du rendement futur du capital investi , c’est-à-dire de son efficacité marginale . Harrod , qui est un de ses proches collaborateurs va s’efforcer de montrer dans une perspective keynésienne que la demande solvable anticipée par les entreprises ( la demande effective ) va , à court terme , déterminer la mise en oeuvre d’un volume de production et d’emploi , à capital constant . Dans le long terme la demande effective va influencer l’efficacité marginale du capital ( elle sera d’autant plus importante que la demande anticipée sera forte car les machines ne demeureront pas inutilisées ) . Dès lors , la décision d’investissement de l’entreprise résulte à la fois :
· de la comparaison entre l’efficacité marginale et le taux d’intérêt
· des prévisions des entreprises sur l’évolution de la demande effective

Présentation du modèle de l’accélérateur (cf. complément de cours n°2)

Conclusion :
- le modèle de l’accélérateur démontre donc que le niveau d’investissement des entreprises dépend , non pas du montant anticipé de la demande mais du montant des variations de la demande anticipée.
- L’investissement s’élèvera donc tant que la demande augmentera : c’est à dire que la variation de la demande anticipée sera positive. .
- A partir du moment où l’accroissement de la demande diminue ( c’est-à-dire que la demande augmente moins vite , non pas qu’elle baisse ) alors l’investissement chutera .
- Ce modèle montre aussi que le coefficient de capital étant supérieur à 1 , les fluctuations de l’investissement sont supérieures aux fluctuations de la demande

Croissance du PIB et de la FBCF des sociétés non financières 1978 - 2006 en France



Répercussions du modèle de l’accélérateur : Dans ce contexte, les variations de la demande exercent un rôle essentiel :
- une augmentation suffisante des salaires est essentielle pour que la demande solvable des ménages s’accroisse suffisamment pour maintenir l’incitation à investir des ménages : le partage de la valeur ajoutée ne doit pas être trop défavorable au travail :


- Une des raisons pouvant ainsi expliquer la forte chute du taux de croissance de la FBCF au début des années 90 est la forte chute de la part de la rémunération du travail dans la valeur ajoutée.

- Mais, la demande est aussi influencée par la répartition du revenu des ménages entre consommation et épargne des ménages . Dans une perspective néo-classique :
· la consommation est vue comme une destruction de richesses qui n’exerce aucune influence sur la production et sur l’investissement , puisque c’est l’offre qui crée la demande ( loi de Say ) .
· Au contraire , il faut favoriser l’épargne ; en effet , plus le niveau d’épargne des ménages sera important , plus l’offre de capital sera forte , moins le taux d’intérêt sera élevé , ce qui favorisera l’investissement .

- Keynes va prendre le contre-pied de l’analyse néo-classique :
· En effet , pour Keynes , « l’épargne est le vilain de la pièce »( Schumpeter ) . Keynes écrit ainsi : « un acte d’épargne individuel signifie , pour ainsi dire , une décision de ne pas dîner aujourd’hui . Mais il n’implique pas nécessairement une décision de commander un dîner ou une paire de chaussures dans une semaine ou une année plus tard ou de consommer un article déterminé »
· Dès lors , toute décision des ménages qui contribue à une augmentation de l’épargne risque d’avoir des effets très négatifs : elle introduit une rupture durable dans le circuit dépenses-revenu . En effet , le ménage ne consomme pas aujourd’hui ; rien ne garantit à l’entreprise qu’il consommera demain , ce qui ne peut inciter l’entrepreneur à investir et augmenter sa production .En effet , plus l’épargne est élevée , moins la consommation sera forte , plus la demande anticipée sera faible , moins les entreprises seront incitées à investir dans le cadre du modèle de l’accélérateur .

Rappel : Il nous faut alors nous interroger sur les variables qui déterminent la répartition entre consommation et épargne :
- dans une perspective néo-classique , à revenu donné , les ménages vont déterminer le niveau d’épargne en fonction du taux d’intérêt réel , ce qui n’est pas épargné est consommé ; la consommation est donc un reliquat .
- au contraire , dans une perspective keynésienne , l’épargne n’est pas déterminée par le taux d’intérêt réel . En effet , le taux d’intérêt permet seulement d’assurer la répartition d’un niveau d’épargne donné entre les placements et la détention de monnaie . Keynes considère donc que la consommation et l’épargne sont fonction du revenu . En effet , selon Keynes , le niveau de consommation est une fonction croissante du niveau de revenu ; le ménage déterminant sa consommation en fonction de sa propension moyenne à consommer , qui est constante à court terme :
C= c.R donc c = C/R.
Où :
C= niveau de consommation ,
R = niveau de revenu ,
c=propension moyenne à consommer :

Une fois que le ménage a déterminé son niveau de consommation , par soustraction il fixera son niveau d’épargne :

R-C =R –c.R = R.( 1-c ) = R.s = E où s= propension moyenne à épargner

s = E/R . On a donc : c+s = 1 .

Conclusion : Dans la perspective keynésienne , ce n’est plus la consommation qui est un reliquat , c’est l’épargne .

Politiques économiques préconisées par Keynes : Keynes souhaite donc , pour favoriser l’investissement , que la demande anticipée croisse à un rythme élevé , ce qui nécessite une augmentation de plus en plus rapide de la consommation .
- Or Keynes établit une seconde loi de consommation : quand le revenu augmente , les dépenses de consommation augmentent mais à un rythme moins rapide que le revenu : la propension marginale à consommer :

DC/DR < dpi =" pI1" p="1)" dpy =" pY1" py0 =" DpI">1
1- c

donc :
DpY>DpI

Néanmoins si l’investissement supplémentaire est unique alors DpY diminue de période en période . En effet comme l’écrit D Clerc : « chaque fois qu’une dépense se transforme en revenu, une partie de ce revenu est épargnée (sDpY) ce qui réduit d’autant la dépense suivante. Jusqu’à ce que finalement le montant cumulé de l’épargne issu de ces flux successifs de revenu soit égal au montant de l’investissement initial : alors les fuites successives d’épargne compensent l’injection initiale et le circuit économique revient à l’équilibre »
Ceci montre bien que dans une perspective keynésienne c’est l’investissement qui crée l’épargne et l’amène à son niveau (pour paraphraser JB Say).

Répercussions du modèle du multiplicateur sur les politiques économiques :
- Toute la question est alors de savoir si dans une économie de marché , dans laquelle les décisions d’investissement relèvent des entreprises , il se trouvera toujours suffisamment d’entreprises pour renouveler l’apport initial d’investissement de période en période.
- On peut en douter , même dans le cas où l’es autorités monétaires mèneraient une politique monétaire expansive visant à diminuer le taux d’intérêt réel. Ceci conduit « Keynes , ce libéral éclairé , à aboutir à l’idée que , à l’avenir une assez large socialisation de l’investissement s’avérera le seul moyen d’assurer approximativement le plein emploi ». Keynes ,,justifie ainsi le développement de l’intervention étatique , en démontrant que les capacités d’autorégulation du marché sont illusoires , et donc que seul l’Etat est capable d’assurer un équilibre de plein-emploi .

Relativisation de l’intérêt du modèle : Néanmoins le modèle du multiplicateur n’est pas , comme Keynes le reconnaissait lui-même , adopté à toutes les situations . Deux exemples vont nous le montrer :
- le modèle du multiplicateur ne semble pas adapter à la situation des PVD , son application générerait de nombreux effets pervers . En effet dans les PVD les capacités de production du pays sont réduites et s’avèrent incapables de répondre à une forte augmentation de la demande . Toute politique de relance générerait des fuites . En particulier les ménages (surtout les plus aisés ) se tourneraient vers les pays étrangers (les PDEM) ce qui entraînerait un accroissement du déficit extérieur. A cela , on peut rétorquer que Keynes ne s’était pas intéressé à la situation des PVD .

- Mais même dans les PDEM le modèle du multiplicateur semble provoquer des effets pervers . En effet, à l’époque à laquelle Keynes écrit son célèbre ouvrage : la théorie générale,
· le taux d’ouverture des économies est réduit, généralement inférieur à 10 % . Les pays ne subissent donc pas de contraintes extérieures.

Rappel : taux d’ouverture d’une économie =
(exportation + importations) x 100
-------------------------------------
2 PIB

· Au contraire depuis le début des années 50 mais surtout depuis le début des années 80, avec la libéralisation des échanges internationaux les taux d’ouverture progressent rapidement et la contrainte extérieure « finit par jouer pleinement à partir des années 70 au moment précis où les pouvoirs publics auraient souhaité disposer de marges de manœuvre étendues pour faire face à l’augmentation simultanée de l’inflation et du chômage . (..)
· A cet égard l’exemple français de 1981-82 reste exemplaire : un gouvernement élu sur un programme de relance et donnant la priorité à la lutte contre le chômage, s’est trouvé dans l’impossibilité de poursuivre une politique expansionniste plus d’un an , en raison du déficit extérieur massif qu’elle engendrait » (J Genereux) .
· Keynes ne niait pas ce fait puisqu’il écrivait dés l’entre deux guerres : « dans un système ouvert en relations commerciales avec l’étranger, le multiplicateur de l’investissement supplémentaire contribuera en partie à relever l’emploi dans les pays étrangers, puisqu’une partie de la consommation additionnelle réduira l’excédent de notre balance extérieure; aussi bien lorsqu’on considère l’effet d’un accroissement de l’investissement sur le seul emploi intérieur, en tant que distinct de l’emploi mondial, il faut réduire la pleine valeur du multiplicateur ».
· Il n’en reste pas moins que nombre d’économistes et de gouvernements considèrent aujourd’hui que le multiplicateur n’est plus d’actualité . Ceci traduit le retour d’une logique de l’offre qui se substituerait à la logique de la demande qui avait été dominante durant les trente glorieuses . Le succès des modèles de la rentabilité économique, financière et de l’effet de levier en sont le meilleur signe .


III - LA NECESSAIRE PRISE EN COMPTE DES DETERMINANTS FINANCIERS DE L’INVESTISSEMENT (9 p 60)

INTRODUCTION

Malinvaud écrit : « Toutes les études économétriques sur l’investissement ont montré que le facteur le plus manifeste était celui connu sous le nom d’accélérateur : quand la production a eu tendance à augmenter rapidement , les investissements se sont élevés . Cette influence est si bien établie aujourd’hui que l’identifier dans chaque étude économétrique nouvelle apparaît comme une indispensable première étape nécessaire à déblayer le terrain en vue de dégager le rôle des autres facteurs qui sont moins aisément apparents (...) Cependant les non-économistes , qu’ils s’agissent d’hommes d’affaires ou de spécialistes de la gestion financière ont tendance , au contraire , à attribuer spontanément un grand rôle à la profitabilité. »


A - LA RENTABILITE ECONOMIQUE ( RE )

L’ entreprise , dont la motivation essentielle est l’appât du gain et qui est rationnelle , va prendre en compte la rentabilité de l’investissement avant de le réaliser . Elle va pour cela étudier la RE qui s’obtient de la façon suivante :

VAB = EBE + MS +T

où :
· EBE = Excédent Brut d’Exploitation
· MS : Masse Salariale ( salaire et cotisations )
· T : Taxes indirectes prélevées par l’Etat sur les entreprises

Donc : EBE = VAB - MS - T

La rentabilité économique brute va rapporter le EBE au stock de capital fixe détenu par l’entreprise ( K ) :
EBE
REB = ---------------
K

La REB sera donc d’autant plus importante que la productivité du capital ( VAB / K ) sera forte , et que la répartition de la VA sera favorable à l’entreprise , c’est-à-dire que le taux de marge sera élevé :

EBE x 100
Taux de marge = ---------------------
VAB


On peut aussi calculer une Rentabilité Economique Nette :
ENE
REN = ----------
K

Où : ENE =EBE - amortissement

Celle-ci est l’indicateur le plus approprié , puisqu’elle calcule ce qu’on peut appeler le taux de profit net , c’est-à-dire la part de la VA qui reste à l’entreprise une fois qu’elle a payé les salaires , les taxes et l’amortissement du capital .

Néanmoins la RE brute ou nette se révèle un indicateur insuffisant pour expliciter la prise de décision de l’entreprise . En effet , l’entreprise rapporte toujours le rendement de l’investissement ( RE ) à son coût ( le taux d’intérêt ) .
La RE intéresse l’entrepreneur , par contre ce qui motive l’actionnaire est la rentabilité de son apport mesuré par la Rentabilité Financière .

B - LA RENTABILITE FINANCIERE ( RF )

En effet , l’entreprise, afin de déterminer son niveau d’investissement , va prendre en compte le taux d’intérêt . On peut distinguer plusieurs cas :
- si l’entreprise ne fait pas de profit ou a accumulé des profits insuffisants pour autofinancer ses investissements , elle va être obligée d’emprunter auprès des banques ou sur le marché obligataire ( sachant qu’une entreprise dont la rentabilité est faible aura du mal à augmenter son capital social par émission d’actions sur le marché financier afin d’obtenir des fonds supplémentaires ) . Le taux d’intérêt réel ( taux d’intérêt nominal - taux d’inflation ) représente le coût de cet investissement que l’entreprise va comparer à ce que lui rapporte cet investissement ( la RE )
- si l’entreprise réalise des profits suffisants pour autofinancer ses investissements , encore faut-il que ce projet dégage le rendement le plus élevé , puisque l’entreprise peut soit investir en capital fixe , soit placer ses réserves sur le marché financier . Dès lors , l’entreprise va prendre en compte le taux d’intérêt réel qui représente le coût d’opportunité de l’investissement en capital fixe , c’est-à-dire ce que l’entreprise aurait gagné si elle avait placé ses capitaux sur le marché financier .

L’entreprise calcule alors une rentabilité financière qui prend en compte les facteurs financiers .
EBE - iD
RFB = -------------
K-D

ENE -iD
RFN = ------------
K-D
où :
· i : taux d’intérêt réel
· D : dettes accumulées par l’entreprise,
· K-D : fonds propres ( FP ) , c’est-à-dire le capital détenu en propriété par l’entreprise , résultant des apports successifs des actionnaires .

On peut transformer la RF pour faire apparaître la RE :
RE+ D (RE -i)
RFN = --
FP

La RF sera fonction du signe de l’effet de levier : RE- i

2 cas peuvent alors être distingués :

· si RE > i , alors on dit que l’effet de levier est positif , plus le levier ( D/FP) est élevé ( c’est-à-dire plus le degré d’endettement est fort ) , plus la RF sera importante . Dans ce cas-là , l’entreprise a intérêt à investir , à s’endetter si elle ne peut autofinancer la totalité de ses investissements .
· si RE<>

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