Chapitre les enjeux de l'ouverture internationale

CHAPITRE : DU COMMERCE INTERNATIONAL A LA MONDIALISATION



SECTION I : ANALYSE THEORIQUE DU COMMERCE INTERNATIONAL

I ) L’ANALYSE TRADITIONNELLE DU COMMERCE INTERNATIONAL

INTRODUCTION : L'HISTOIRE OFFICIELLE DU CAPITALISME

Ha-Joon Chang.écrit que :

Selon ce que j'appelle " l'histoire officielle du capitalisme ", et qui nourrit le débat sur le développement et la mondialisation, le monde s'est développé au cours des derniers siècles de la façon suivante.

  • A partir du XVIIIe siècle, on assiste à la réussite industrielle du " laisser-faire ". La Grande-Bretagne prouve la supériorité de l'économie de marché et du libre-échange en devançant la France, dirigiste, son principal concurrent à l'époque, et en s'instituant comme le pouvoir économique mondial suprême. Une fois qu'elle eut abandonné la déplorable protection de son agriculture (la loi sur les blés) et les autres reliquats de mesures protectionnistes mercantilistes en 1846, elle fut en mesure de jouer le rôle d'architecte et de puissance tutélaire d'un nouvel ordre économique mondial " libéral ". Cet ordre mondial, mis au point vers 1870, était fondé sur une politique industrielle interne de " laisser-faire ", de faibles barrières pour les flux de marchandises, de capitaux et de main-d'oeuvre, et sur la stabilité macroéconomique, à la fois nationale et internationale, garantie par l'étalon-or et par le principe de l'équilibre budgétaire. Il s'ensuivit une période de prospérité sans précédent.

  • Malheureusement, si l'on en croit cette histoire, les choses se sont gâtées avec la Première Guerre mondiale. En réaction à l'instabilité qu'elle a provoquée dans le système politique et économique mondial, les pays ont recommencé à ériger des bar rières douanières. En 1930, les Etats-Unis abandonnent eux aussi le libre-échange et augmentent leurs droits de douane avec la loi scélérate Smoot-Hawley (2), que le célèbre économiste libéral Jagdish Bhagwati désigna comme " l'acte le plus éclatant et le plus dramatique de la sottise antilibérale " (Bhagwati, 1985, p. 22, note 10). Le système mondial de libre-échang+ prit fin en 1932, quand les Britanniques, jusque-là champions du libéralisme, succombèrent à la tentation et réintroduisirent des droits de douane. La contraction et l'instabilité de l'économie mondiale qui en résultèrent, puis la Seconde Guerre mondiale, détruisirent les derniers vestiges du premier ordre mondial libéral.

  • Après la Seconde Guerre mondiale, quelques progrès significatifs furent faits en matière de libéralisation+ des échanges par le biais des premières discussions du Gatt (l'Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce). Toutefois, les approches dirigistes du management de l'économie dominèrent malheureusement la scène politique jusque dans les années 70 dans le monde développé et jusqu'au début des années 80 dans les pays en développement+ (ainsi que dans les pays communistes jusqu'à leur effondrement en 1989). Selon Sachs et Warner (1995), de nombreux facteurs contribuèrent à la poursuite du protectionnisme+ et de l'interventionnisme dans les pays en développement (p. 11-21). Il y avait les " mauvaises " théories, comme celle des " industries naissantes ", celle de la " grande poussée " (the Big Push) et le structuralisme latino-américain, sans parler de diverses théories marxiennes. Il y avait aussi les dividendes politiques du protectionnisme, tels que le besoin de construire une nation et celui d'" acheter " certains groupes d'intérêt. Enfin, il y avait les héritages du contrôle du temps de guerre, qui persistaient en temps de paix.

  • Par bonheur, dit-on, les politiques interventionnistes ont été largement abandonnées dans le monde depuis les années 80 avec l'essor du néolibéralisme, qui a mis l'accent sur les vertus du gouvernement modeste, des politiques de " laisser-faire " et de l'ouverture internationale. A la fin des années 70, notamment dans les pays en développement, la croissance économique a commencé à chanceler dans tous les pays, en dehors de l'Asie de l'Est et du Sud-Est, où l'on pratiquait déjà les " bonnes " politiques économiques (économie de marché et libre-échange). Cet échec de la croissance, qui s'est fréquemment manifesté par des crises économiques au début des années 80, montrait les limites de l'interventionnisme et du dirigisme+ à l'ancienne. En conséquence, de nombreux pays en développement ont choisi de réorienter leur politique dans un sens néolibéral.

  • Lorsqu'ils se combinent avec la mise en place de nouvelles institutions de gouvernance+ comme l'OMC, ces changements de politique au niveau national forment un nouveau système économique mondial, comparable par sa prospérité - potentielle, du moins - au premier " âge d'or " du libéralisme (1870-1914). Renato Ruggiero, le premier directeur général de l'OMC, soutient que, grâce à ce nouvel ordre mondial, nous pouvons désormais " éradiquer la pauvreté dans le monde dès les débuts du siècle prochain (le XXIe) - une utopie il y a seulement quelques décennies, mais une réelle possibilité aujourd'hui " (1998, p. 131).

A ) LE MERCANTILISME

1 - LE CONTEXTE ECONOMIQUE ET SOCIAL :

Constat : Les mercantilistes vivent dans un monde économique qui ne connaît pas de croissance économique durable.

Conséquences : Ils en sont donc conduits à conclure que le stock de richesses dans le monde est constant, c’est-à-dire qu’il a été déterminé une fois pour toutes par Dieu et qu’il ne pourra évoluer.

2 - L’ECHANGE INTERNATIONAL, UN JEU A SOMME NULLE :

répercussions théoriques : Dès lors, cela va influencer la vision que les mercantilistes ont du commerce international. Ils en sont amenés à conclure que l’échange international est un jeu à somme nulle, que ce que gagnent les uns est forcément perdu par les autres. Les pays se livrent donc une guerre économique.

3 - L’ ECONOMIQUE INFEODE AU POLITIQUE :

Mesures de politique économique pronées : Chaque pays va alors chercher à :

· développer ses exportations en favorisant son industrie nationale ( exemple : les manufactures royales de Colbert ) tout en essayant d’importer le moins possible afin d’obtenir un excédent commercial.

· Le pays connaîtra alors une entrée d’or qui épuisera le stock d’or de ses partenaires,

· le pays gagnera alors en puissance politique, le roi pourra alors financer son armée et conquérir de nouveaux territoires.

Conclusion : On se rend donc bien compte que l’objectif du mercantilisme n’a pas une finalité économique mais politique, ce qui démontre qu’à cette époque l’économie n’occupe pas la place qu’elle occupera à partir de Smith.

B ) LES THEORIES CLASSIQUES DE L’ECHANGE

INTRODUCTION

La théorie classique de l’échange introduite par Smith rompt avec la théorie mercantiliste.

a - le contexte économique et social.

Constat : En effet, elle se situe dans un autre cadre économique : c’est une période de boulversements économiques (cf la révolution industrielles)

Répercussions : Smith envisage pour la première fois la possibilité d’une croissance économique durable et auto entretenue.

b - l’échange international, un jeu à somme positive :

Conséquences : Dès lors, l’échange international devient un jeu à somme positive, non plus nulle. En effet, chacun des 2 partenaires, en se spécialisant, va bénéficier d’une amélioration de son bien-être.

Conclusion : On voit bien ici que s’impose la logique libérale chère à Smith : chacun des deux partenaires n’échange que s’il y trouve son intérêt. C’est l’extension au niveau international de la vision contractualiste et individualiste que Smith a développé au niveau individuel, puis national.

c - la suppression des politiques mercantilistes :

Mesures de plitiques économiques pronées : Il faut alors tout faire pour que les échanges puissent être réalisés le plus facilement possible, en particulier Smith est favorable à la suppression des barrières douanières et des protections que les mercantilistes avaient accumulées ( suppression des privilèges des différentes compagnies des Indes )

1° ) LA THEORIE DES AVANTAGES ABSOLUS D’ADAM SMITH (1 p256)

a - une analyse individualiste :

l’exemple de référence : Smith part de l’exemple d’un chef de famille : « la maxime de tout chef de famille prudent est de ne jamais essayer de faire chez soi ce qu’il lui coûtera moins cher à acheter qu’à faire (... ) Il n’y en a pas un qui ne voit qu’il y va de son intérêt d’employer son industrie toute entière dans le genre de travail dans lequel il a quelque avantage sur ses voisins et d’acheter toutes les autres choses dont il peut avoir besoin avec une partie du produit de cette industrie » .

postulat de base en résultant : Smith s’inscrit donc dans le cadre d’un homo oeconomicus égoiste et rationnel qui ne recherche que son intérêt matériel

b - la société résultant de l’agrégation des comportements individuels :

le principe : Smith va alors passer du niveau micro-économique au niveau macro-économique en agrégeant les comportements individuels ( cf. le raisonnement de la main invisible ) : « ce qui est prudence dans la conduite de chaque famille en particulier, ne peur être folie dans celle d’un grand empire. Si un pays étranger peut nous fournir une marchandise à meilleur marché que nous ne sommes en l’état de l’établir nous-mêmes il vaut mieux que nous la lui achetions avec quelque partie du produit de notre propre industrie employée dans le genre dans lequel nous avons quelque avantage. »

Exemple de compréhension : Smith prend alors l’exemple de la production de vin de Bordeaux en Ecosse afin de démontrer que la protection serait peut-être possible mais non rentable, car :

· la France dispose d’un climat, de terrains propices à la production de vin qui lui confère un avantage absolu dans le vin.

· Dès lors l’Ecosse a intérêt à se spécialiser dans la production de biens dont elle dispose d’avantages absolus ( ex : le saumon ), à ouvrir ses frontières, à importer du vin et à exporter du saumon,

· ce qui améliorera le bien-être des français et des écossais(jeu à somme positive).

c - les limites de la théorie de Smith :

Mais la théorie de Smith, pour moderne qu’elle soit, n’est pas sans inconvénient. En effet :

- elle est très limitée puisqu’elle ne concerne que les productions pour lequel les pays disposent d’un avantage absolu d’origine naturelle. Dès lors, le pays ne disposant d’aucun avantage ne peut échanger, ce qui limite le développement du commerce.

- Smith lui-même se contredit quand il écrit : « l’avantage qu’a un artisan sur son voisin qui exerce un autre métier n’est qu’un avantage acquis et cependant tous les deux trouvent plus de bénéfice à acheter l’un de l’autre que de faire eux-mêmes ce qui ne concerne pas leur aptitude particulière. » Dans l’exemple de l’Ecosse, l’avantage absolu est d’origine naturelle ; dans celui de l’artisan, il est acquis ; la différence est essentielle. En effet, le pays ne dispose alors d’un avantage absolu que parce qu’il s’est spécialisé ; un autre pays pourrait très bien faire la même chose en protégeant son industrie.

CONCLUSION : la théorie de Smith est très moderne car elle est la première à rompre avec la conception mercantiliste de l’échange à somme nulle, mais elle reste très frustre et peu approfondie.

2° ) LA THEORIE DES COUTS COMPARATIFS DE RICARDO (1p256)

a - les hypothèses de base du modèle de RICARDO :

Cette théorie est basée sur 6 hypothèses qui doivent toutes être vérifiées simultanément pour que l’analyse de Ricardo demeure valable

· Hypothèse n° 1 :Principe de la libre circulation à l’intérieur de chaque pays : il n’existe aucune entrave au libre déplacement des marchandises et des facteurs de production ( capital et travail )

· Hypothèse n°2 : à l’échelle internationale, les marchandises se déplacent librement. Par contre, les facteurs de production sont immobiles.(3 p 494)

Remarque : Comme l’écrit R.Sandretto, « ces 2 hypothèses reprises également par les théoriciens néo-classiques sont très importantes ; elles fondent la spécificité du commerce international, ce sont elles qui expliquent en quoi les échanges internationaux diffèrent des échanges intérieurs. » En particulier, dès lors que les facteurs de production sont mobiles de pays à pays, toutes l’analyse de Ricardo( mais aussi celle d’HOS ) est remise en cause.

· Hypothèse n°3 : dans chaque pays, les marchés de biens et de facteurs sont soumis à la concurrence pure et parfaite.

· Hypothèse n°4 : Ricardo retient la loi de la valeur travail, ce qui signifie que bien que les entreprises utilisent du travail et du capital simultanément, les marchandises s’échangent en proportion des quantités de travail nécessaires à leur fabrication ( le capital étant du travail accumulé ).

· Hypothèse n°5 : quel que soit le bien considéré, sa production est supposée exiger la mise en oeuvre de facteurs ( travail, capital, ressources naturelles ) dans des proportions fixes. Pour produire un bien, une seule technique est disponible à un moment donné et dans un pays donné ( il n'y a pas de possibilité de substitution entre facteurs : exemple on ne peut remplacer du travail par du capital).

· Hypothèse n°6 : la production s’effectue à coût ou à rendements d’échelle constants, c’est-à-dire que le pays ne dispose d’aucun avantage à produire à grande série plutôt qu’en petite.

b- l’exemple de la GB et du Portugal :

Ricardo prend l’exemple du Portugal et de la Grande-Bretagne qui ne produisent que 2 biens : du vin et du drap.

Rappel de la logique smithienne : Si l’on prend la logique smithienne :

· le Portugal dispose par rapport à la Grande-Bretagne d’un avantage absolu dans les 2 productions puisqu’il lui faut moins d’heures de travail pour produire du vin ( 80 contre 120) et du drap ( 90 contre 100 ). Smith en conclurait que les 2 pays n’échangeraient pas puisque le Portugal dispose d’un avantage absolu dans les 2 cas.

L’apport de Ricardo : Ricardo va, au contraire s’efforcer de démontrer que les deux pays vont échanger et qu’ils vont tous les 2 y trouver un avantage :

· Si chaque pays désire produire une unité de chaque bien , les coûts de production mondiaux en situation autarcique sont de :120 + 100 +80 +90 = 390 heures de travail . Si le Portugal consacrait sur son territoire toute la production mondiale , les coûts de production deviendraient : ( 2x 80 ) + ( 2 x 90 ) = 340 heures. On observe donc une nette amélioration , mais cette solution est impossible pour 2 raisons :

- le Portugal n’aurait aucun intérêt à échanger avec l’Angleterre qui ne lui apporterait rien , puisqu’elle n’a aucun avantage absolu

- les facteurs de production étant immobiles , le Portugal ne peut importer la main d’œuvre anglaise

- Ricardo va alors démontrer toute l’intérêt d’une spécialisation

· En effet, en Grande-Bretagne le rapport d’échange interne qD / qV = 120 / 100 = 1,2, ce qui signifie que pour obtenir une unité de vin, le marchand de drap anglais doit offrir 1,2 unités de drap ( puisqu’il faut plus de temps pour produire du vin que du drap et que derrière les biens ce sont les quantités de travail que l’on échange ).

· au Portugal, le rapport d’échange interne qD/ qV = 80/90= 0,89. Dès lors, le marchand de drap portugais pour obtenir une unité de vin est obligé de donner 0,89 unités de drap.

Conséquences : les coûts comparatifs entre les deux pays sont donc différents , si l’on compare pour chaque production , les coûts des 2 pays , on constate que :

· l’Angleterre est moins désavantagée dans la production de draps : 90 / 100 = 90 %

· que dans la production de vin : 80 / 120 = 66 %

· l’Angleterre possède donc un avantage comparatif dans le drap, le Portugal dans le vin et c’est de cette différence des avantages comparatifs que va résulter l’échange entre les deux pays.

· En effet, le marchand de drap anglais a intérêt à exporter sa production vers le Portugal puisque au lieu d’obtenir une unité de vin contre 1,2 unités de drap, il obtient 1 unité de vin contre 0,89 unités de drap. Les Anglais vont donc se spécialiser dans la production de drap et abandonner la production de vin.

· Au contraire, les marchands de vin portugais se rendent compte que, si, au Portugal, il faut donner 1 unité de vin pour obtenir 0,89 unités de drap, s’ils exportent leur production de vin vers la Grande-Bretagne, ils obtiendront 1,2 unités de drap contre 1 unité de vin. Ils améliorent donc leur bien-être. Les Portugais vont donc se spécialiser dans la production de vin et abandonner la production de drap.

· Chaque pays a donc intérêt à se spécialiser dans la production pour laquelle son coût comparatif est le plus faible : les deux pays seront gagnants à l’échange tant que le rapport d’échange international qDi /qVi sera compris entre les 2 rapports d’échange internes :

0,89 <>i /qVi <>

· Si le rapport d’échange est de 0,89, les marchands portugais n’y gagnent rien mais ne sont pas perdants. Par contre, les marchands anglais améliorent leur bien-être. La situation est inversée si le rapport d’échange est de 1,2.

· Par rapport à la situation d’autarcie étudiée au début , on constate que si l’Angleterre et le Portugal se spécialisent en fonction de leurs avantages comparatifs respectifs , les coûts de production mondiaux deviennent : (80 x 2 ) + ( 100 x 2 ) = 360 heures , soit un gain de 30 heures par rapport à la situation autarcique .

Limites de l’analyse de Ricardo : En réalité, dans la plupart des cas, le rapport d’échange international sera compris entre les 2 bornes. Mais Ricardo est incapable de le déterminer avec précision.

c - l’apport de J.S.MILL :

détermination du rapport d’échange international : Il sera déterminé comme l’a démontré John-Stuart Mill par la loi de l’offre et de la demande :

· si la Grande-Bretagne est plus demandeuse de vin que le Portugal de drap , le Portugal pourra imposer ses conditions et donc fixer un rapport d’échange international qui se rapprochera de 1,2 .

Conséquences : Selon J.S.Mill ,les pays pauvres sont les grands gagnants de l’échange international . En effet , ils se caractérisent :

- par des capacités de production généralement plus réduites que celles des pays riches , en raison de la faiblesse de leurs capacités d’investissement

- par une demande plus faible en raison de la faiblesse du revenu des ménages .

- Ainsi , les marchés dans lesquels sont spécialisés les pays pauvres se caractérisent par une sous-production déterminant une hausse des prix

- alors que ceux des pays riches connaissent une surproduction ( résultant de la forte capacité de production du pays riche et de la faible capacité d’absorption du pays pauvre) engendrant une baisse des prix .

Conclusion : La théorie traditionnelle de l’échange explique qu’

· à l’origine de la spécialisation se trouvent des différences entre les pays de coûts et de prix » .

· Si les pays échangent , c’est donc qu’ils sont complémentaires et que l’échange va apporter à chacun d’eux une amélioration de son bien-être .

· La théorie de Ricardo justifie donc une division internationale du travail ( par exemple entre pays du nord et du sud ) reposant sur la différence des avantages comparatifs .

d - la théorie de RICARDO , une analyse moins neutre qu’il n’y paraît :

Mais, la théorie de Ricardo n’est pas aussi neutre scientifiquement que l’on pourrait le penser . En effet , Ricardo n’est pas seulement un économiste , c’est aussi un bourgeois qui défend les intérêts de la bourgeoisie industrielle contre ceux de l’aristocratie terrienne :

· A l’époque où Ricardo explicite sa thèse , l’Angleterre vit sous la protection des corn laws qui ont pour objectif de défendre l’agriculture anglaise dominée par les aristocrates de la concurrence que leur imposent les pays européens . Ceci a pour résultat d’augmenter le prix des céréales anglaises , ce qui oblige les industriels anglais à accroître les salaires .

· Si au contraire les corn laws sont supprimés , les prix des céréales vont chuter grâce aux importations , ce qui diminuera le bien-être des producteurs agricoles , en particulier de l’aristocratie et au contraire améliorera celui des industriels qui auront pu baisser les salaires sans détériorer le pouvoir d’achat de leurs ouvriers .

Les véritables objectifs de la démonstration ricardienne :On voit donc que l’analyse de Ricardo a pour objectif de :

· justifier la suppression des corn laws qui interviendra après 1830 mais qu’elle n’est pas neutre politiquement et socialement : elle traduit la montée en puissance de la bourgeoisie industrielle au détriment de l’aristocratie agricole .

· De plus , l’analyse de Ricardo a pour objectif de justifier l’ouverture des frontières des partenaires de l ’Angleterre qui dispose à cette époque d’une avance technologique , donc de faire de la Grande-Bretagne l’atelier du monde , alors que les autres pays seraient quant à eux cantonnés à la production de biens agricoles , ce qui correspond à une spécialisation nettement moins porteuse .

Les répercussions négatives de l’analyse ricardienne : « l’idée selon laquelle le commerce est en tous temps et en tous lieux un facteur d’épanouissement est naïve théoriquement et fausse historiquement «(13 p 291) . En effet l’Angleterre a volontairement spécialisé sa colonie indienne dans la production de coton utile à l’industrie anglaise . Ceci a généré deux effets très négatifs d’après D.Cohen :

- « l’Inde qui était exportateur net de produits textiles au début du 18ème siècle voit sa base industrielle totalement détruite. (…)Conformément à la théorie Ricardienne, l’Inde se désindustrialise en contrepartie de l’industrialisation anglaise »

- « l’Inde qui était le grenier de l’Asie au début du 19ème siècle, se spécialise dans la culture de produits qui ne garantissent plus son alimentation, et doit par conséquent importer son alimentation de base. Il ne faut pas attendre longtemps pour que les famines viennent sanctionner cette spécialisation ».

C ) LA THEORIE NEO-CLASSIQUE : LA THEORIE DES DOTATIONS FACTORIELLES D’HECKSHER-OHLIN -SAMUELSON (HOS ) (1 p256)

1° ) LES HYPOTHESES FONDAMENTALES .

Le modèle d’HOS repose sur 2 hypothèses essentielles :

· Hypothèse n°1 : les facteurs de production n’ont aucune mobilité à l’échelon international , alors que les biens sont eux parfaitement mobiles ( cette hypothèse est reprise de Ricardo ) .

· Hypothèse n°2 : les technologies de production sont identiques d’un pays à l’autre , mais diffèrent selon les branches d’activité , c’est-à-dire que , quel que soit le pays , pour produire du blé il faut utiliser une proportion identique de travail , de capital et de ressources naturelles , mais que la production d’automobiles nécessite, elle , une utilisation de facteurs différente .

2° ) UNE SPECIALISATION EN FONCTION DES DOTATIONS FACTORIELLES .

les conséquences : Sur la base de ces 2 hypothèses , HOS vont démontrer que « chaque pays doit se spécialiser dans la production et l’exportation de biens qui utilisent intensément le facteur de production le plus abondant » :En effet :

· conformément à la loi de l’offre et de la demande , si un pays dispose abondamment de facteur travail et manque de capital , le coût du travail sera réduit alors que le coût du capital sera élevé ,

· le pays a donc intérêt à se spécialiser dans les productions nécessitant un usage intensif de travail qualifié de saving capital ( c’est-à-dire économisant du capital ) .

· l’échange international de marchandises se révèle donc être un échange de facteur abondant contre des facteurs rares

les limites de la théorie : La théorie d’HOS est une théorie statique , c’est-à-dire que :

· « la dotation en facteurs d’un pays va donc décider à tout jamais de sa place dans la Division Internationale du Travail » .

· Ainsi , chaque pays doit s’adapter passivement aux dotations factorielles dont il est muni .

· Les pays ayant des dotations factorielles identiques n’ont aucun intérêt à échanger . Comme chez Ricardo , c’est de la différence que naît l’échange puisque les disparités des coûts de production s’expliquent par les différences de dotations en facteurs de production .

3° ) UNE EGALISATION DE LA REMUNERATION DES FACTEURS .

le principe :Néanmoins HOS vont chercher à montrer comme l’écrit Sandretto que : « En dépit de l’immobilité internationale des facteurs de production , leur rémunération tendrait néanmoins à s’égaliser dans tous les pays sous l’influence du commerce international des marchandises »

explication du modèle :

- à l’origine le pays s’est spécialisé dans la production qui utilisait intensément le facteur le plus abondant donc le moins cher ; mais , suite à cette spécialisation , l’utilisation du facteur abondant va s’intensifier , ce qui à terme va augmenter son coût : le facteur devenant plus rare .

- Au contraire le facteur rare voit son utilisation diminuer puisque le pays importe les biens nécessitant son utilisation , le facteur rare devient alors plus abondant et donc moins coûteux .

Répercussions positives : Le développement des échanges internationaux réduit donc les différences de rareté relative ; il rend moins abondant le facteur pléthorique , atténue la rareté relative du facteur rare , de ce fait le libre-échange tend à réduire les disparités , de pays à pays , des rémunérations des facteurs . Sandretto peut en conclure : « ce théorème d’HOS implique que , sous l’effet du commerce international , les taux de profit deviennent égaux partout et que le pouvoir d’achat des travailleurs s’égalise dans tous les pays , aux Etats-Unis comme au Bangladesh ou en Ethiopie » , ce qui conduirait progressivement à un phénomène de convergence des économies .

4 – LE THEOREME DE STOLPER- SAMUELSON

Stolper avec Samuelson a complété la théorie d’HOS par le théorème suivant : si un pays instaure un tarif douanier sur l’importation des biens incorporant un facteur rare , cela conduit à augmenter le revenu relatif de ce facteur rare au détriment des facteurs abondants

Exemple de compréhension : en Angleterre au XVIII° siècle , la terre est un facteur rare , les propriétaires terriens sont alors protectionnistes , car le libre-échange abaisserait la rente foncière dont ils bénéficient ( la terre étant rare , sa rémunération est élevée ) . La protection du marché du blé va augmenter le revenu des propriétaires terriens au détriment des consommateurs et des industriels qui paient les produits agricoles à un prix plus élevé que s’ils étaient importés

Conséquences : le protectionnisme conduit à privilégier des intérêts particuliers de ceux qui bénéficient de la protection au détriment de l’intérêt général .

CONCLUSION :

Dès lors , la théorie d’HOS qui justifie la DIT traditionnelle ( les PVD du Sud sont spécialisés dans la production de biens utilisant beaucoup de main-d’œuvre ou des ressources naturelles abondantes alors que les pays du Nord se spécialisent dans les productions qui utilisent intensément le capital ) va montrer que contrairement aux affirmations des théoriciens de la dépendance ( cf. chapitre Tiers-Monde ) tous les pays et surtout les pays les plus pauvres sont gagnants à l’échange international .

Pour ceux qui veulent aller plus loin :

1. "LES FONDEMENTS THEORIQUES DES ECHANGES ET DES INVESTISSEMENTS INTERNATIONAUX "
Plan de cours d'Alexandre Minda 2ieme année d'IEP

2. sur le site web campus : deux présentations de Jean-Charles JACQUEMIN :

§ 01-Gains_de_l--'echange.ppt

§ 02-Theoremes.ppt

D : LA VERIFICATION EMPIRIQUE : LE PARADOXE DE LEONTIEFF

Léontieff (ou Léontiev) a cherché , à partir de l’exemple américain , à vérifier la validité de la thèse de HOS .

Hypothèses :Il s’attendait à ce que :

· les Etats-Unis , qui sont un pays développé et qui disposent donc de quantités importantes de capital , se spécialisent dans les productions utilisant intensément le capital et économisant le travail qui est un facteur rare et coûteux .

· Au contraire , les EU devraient importer des biens utilisant intensément le travail .

Constat : or dans l’étude qu’il a mené en 1947 , Léontieff constate que les EU exportent des produits qui en moyenne incorporent beaucoup moins de capital et plus de travail que n’en requièrent leurs importations .

Paradoxe : ce paradoxe de Léontieff semble donc contredire la loi d’HOS puisque l’économie américaine , notablement mieux pourvu en capital qu’en travail devrait en principe exporter des biens intensifs en capital .

Explications : Léontieff va alors s’efforcer de donner une interprétation qui a pour objectif de sauvegarder la théorie d’HOS . Ainsi les EU seraient en réalité relativement riches en travail parce qu’à équipement égal le travailleur américain du fait d’une meilleure organisation du travail , d’une meilleure qualification , ... serait trois fois plus productif que le travailleur étranger . Les EU compteraient donc en 57 , non pas 65 millions de travailleurs mais 195 millions ( 65x3 ) de travailleurs équivalents étrangers .

Critiques de l’analyse : L’analyse de Léontieff est plus que surprenante . En effet , il est étonnant d’appeler paradoxe un exemple qui montre que la théorie est fausse .

II ) LES ANALYSES CONTEMPORAINES DU COMMERCE INTERNATIONAL .(1 p 256)

A ) LA CONTROVERSE DES ECHANGES INTRABRANCHES ( 1 p 256)

1° )LES FAITS

Critique des analyses traditionnelles du commerce international :

· Les théories de Ricardo et d’HOS conduisent à considérer que plus les pays ont des dotations factorielles différentes , plus leurs spécialisations seront complémentaires et donc plus les échanges croisés seront élevés . Le commerce attendu est donc un commerce de type Nord-Sud .

· Or , à partir des années 60 , les économistes ont constaté que de forts courants d’échange croisés de produits similaires entre pays présentant des caractéristiques proches du point de vue des dotations factorielles se développaient . L’exemple le plus représentatif est celui du marché commun : « il est devenu rapidement évident que la première phase d’intégration européenne , le marché commun se faisait sur le mode de l’intrabranche plutôt que sur celui de l’interbranche . L’intégration économique n’avait pas pour corollaire la spécialisation .L’enjeu théorique de ce problème empirique est important puisque les théories traditionnelles de la spécialisation visent à expliquer l’interbranche . » Il semble donc qu’une part croissante des échanges ne puisse être expliquée par les théories s’appuyant sur les dotations factorielles .

Conséquences :L’on en vient alors à distinguer 2 types de commerce :

- un commerce de type Nord-Sud entre pays économiquement éloignés basé sur l’interbranche qui s’explique par les différences de dotations factorielles .(14 p 291)

- un commerce entre pays développés basé sur l’intrabranche qui s’explique par la similarité

Conclusion : On peut considérer que :

· le commerce bilatéral ( entre 2 pays ) sera dominé par l’interbranche si les 2 pays ont des dotations factorielles différentes et donc des spécialisations complémentaires .

· Au contraire , plus les dotations factorielles seront proches , plus la part de l’échange intrabranche sera élevée .

2° ) LES EXPLICATIONS

a ) LA THEORIE DE LA DEMANDE REPRESENTATIVE DE LINDER

a1 - un constat :

Linder part d’un constat : le commerce se développe entre des pays qui n’ont pas de différences significatives dans leurs dotations factorielles .

a2 - une logique de la demande :

l’opposition de deux logiques :Ceci ne conduit pourtant pas Linder à rejeter la notion d’avantage comparatif mais plutôt à fonder les avantages comparatifs sur de nouvelles bases .

- Ricardo et HOS ont développé une logique de l’offre

- contrairement à Linder qui , étant un économiste keynésien , va partir de la demande .

Conséquences : Ainsi pour expliquer le développement de l’échange présentant des caractéristiques similaires du point de vue des dotations factorielles , il va démontrer que l’avantage comparatif trouve son origine dans l’importance de la demande interne du produit exporté .

- En effet , un bien est susceptible d’être exporté que s’il est d ’abord l’objet d’une forte demande interne . Le grand marché intérieur ( USA , Japon , EEE ) produit l’avantage comparatif parce que l’incitation à l’innovation y est plus forte , parce que les débouchés y sont assurés ( cf. modèle de l’accélérateur ) .

- De plus , grâce au développement de la production résultant de la taille du marché , le pays bénéficiera d’économies d’échelle qui lui permettront de diminuer ses coûts de production et donc ses prix .

La stratégie à appliquer selon Linder : elle est alors la suivante :

· lancer le produit nouveau sur un marché intérieur, dynamique , innovateur à revenu élevé .

· puis , dans un deuxième temps , quand le pays détient un avantage comparatif résultant de l’expérience qu’il a acquise , de son image de marque , de ses prix plus bas , ...il peut alors se lancer dans la conquête des marchés étrangers .

a 3 -une remise en cause de la DIT traditionnelle : la mise en évidence des échanges Nord-Nord :

On arrive alors au second grand apport de Linder : vers qui le pays va-t-il pouvoir exporter ?

Les motifs de l’exportation : Comme l’indique M.Byé « il ne l’exportera cependant que dans un pays susceptible de le consommer .

Les répercussions : Or la qualité et la nature des produits consommés dépendent du niveau de vie et donc très largement du niveau des salaires . Le produit ( qui correspond au niveau de vie interne du pays exportateur ) ne pourra donc être exporté que dans des pays à niveau de salaire comparable , donc à facteurs de production comparables .

Conclusion : elle est alors aux antipodes de celle expliquant l’échange international dans les théories de dotations factorielles :

- « l’identité des dotations en facteurs facilite donc le commerce qu’entrave au contraire leurs différences » .

- -le développement des échanges Nord-Nord comparativement à l’atonie relative des échanges Nord-Sud conduit à penser que la théorie de Linder est plus à même d’expliquer le commerce international contemporain que celles de Ricardo et d’HOS .

b ) LA DEMANDE DE DIFFERENCE DE B.LASSUDRIE-DUCHENE

Problème soulevé : B.. Lassudrie-Duchêne cherche à établir une synthèse des logiques de la similarité et de la disparité . En effet : « là où tout est semblable , il est inutile de rien échanger ; l’échange ne peut donc s’expliquer que par une différence quelconque » ( B.Lassudrie-Duchêne )

Constat: ainsi si les échanges intrabranches se développent entre pays présentant des dotations factorielles proches ( cf. Linder) il n’en reste pas moins que les produits ne sont pas rigoureusement identiques . Il présente un potentiel de différentiation résultant de leur image de marque , de leurs qualités spécifiques .

Explication :B .Lassudrie-Duchêne va alors expliquer le développement des échanges en disant :

· « qu’un bien exportable ( qui est donc largement banalisé dans le pays d’origine : cf Linder ) provoque une demande d’importation d’un bien différencié .Il est donc nécessaire qu’entre deux pays ayant tous deux des biens exportables , les produits similaires se croisent et les différences s’échangent » .

· En effet, le goût du consommateur pour la variété offre une part de marché à tout exportateur qui propose une spécification différenciée d’un même produit générique . Ceci résulte de la volonté du consommateur de se différencier en acquérant des produits ayant une image de marque valorisante .

· Ainsi même si la voiture est un produit générique , le consommateur qui recherche une image de marque sportive achètera une voiture italienne , celui qui désire obtenir une image british , achètera une voiture anglaise ( cf. les pubs Rover ) , celui qui veut imposer une image de respectabilité achètera une voiture allemande , ....

Conclusion : Lassudrie-Duchêne explique que le « commerce international répond à une logique d’exotisme » .

Limites : Néanmoins la logique de différenciation ne peut s’exprimer que dans les pays ayant un niveau de vie élevé : ce qui explique que l’échange intra-branche se fasse principalement entre les PDEM .

B ) LES THEORIES DU CYCLE DE VIE DU PRODUIT

1 °) LES THEORIES DE L’ECART TECHNOLOGIQUE : M.POSNER ET P.KRUGMAN

Posner part du principe ( déjà développé par Ricardo ) qu’une firme qui introduit un nouveau produit peut profiter d’un monopole provisoire à l’exportation jusqu’à ce que les brevets tombent et que des firmes imitatrices lancent un produit comparable à un prix plus faible .Selon Posner , c’est donc l’avance technologique caractérisant un pays qui conduit à déterminer les avantages comparatifs du pays .

Le déterminant du commerce international , selon Posner , réside alors dans l’écart technologique entre les pays :

· les pays en avance exportent des produits intensifs en nouvelles technologies

· les pays en retard sont spécialisés et exportent essentiellement voire uniquement des produits banalisés

L’analyse de Posner est intéressante car elle permet de dynamiser le modèle de Ricardo dans la mesure où les différences d’avantages comparatifs peuvent être expliqués par des écarts technologiques entre les partenaires participant à l’échange . Dès lors les avantages comparatifs ne tombent plus du ciel ; en contrepartie , les hypothèses de concurrence ne peuvent plus être appliquées .

Krugman va approfondir les intuitions de Posner . Il va différencier deux types de zones :

· les pays du Nord innovent , ce qui permet de développer de nouveaux produits pour lesquels le Nord dispose d’une situation de monopole et peut donc produire sur son territoire des biens de haute technologie à un prix élevé

· inversement , les pays du Sud ont des capacités d’innovation réduites . Dès lors , ils ne peuvent que copier les innovations réalisées au Nord , mais avec un décalage plus ou moins long .Ils fabriquent et exportent des produits banalisés à un prix réduit en raison de la concurrence .

Conclusion : Krugman en conclut que des innovations générant de nouvelles industries doivent émerger en permanence au Nord afin de maintenir le niveau de revenu de la zone , les hauts salaires du Nord reflétant la rente de monopole pour les nouvelles technologies . Le monopole technique du Nord étant continuellement errodé par les transferts technologiques vers le Sud ne peut être maintenu que par des innovations constantes sur de nouveaux produits ou procédés .Les capacités d’innovation et donc les efforts de recherche-développement jouent alors un rôle essentiel .

2° ) LA THEORIE DE VERNON

A partir de l’examen des firmes américaines des années 50-60 , R.Vernon montre qu’ « une production traverse généralement une série de phases : démarrage , croissance exponentielle , ralentissement et déclin , qui correspondent à l’introduction du produit sur le marché , à sa diffusion , à la maturation et à la sénescence » . Vernon développe son analyse en 2 temps

a - une analyse au niveau interne :

Dans un premier temps , il se situe dans le cadre d’un pays ( les USA ) et regarde comment évolue le produit au cours des différentes phases de sa vie :


NAISSANCE DU PRODUIT

PRODUIT EN CROISSANCE

PRODUIT A MATURITE

DECLIN DU PRODUIT

Caractéristiques de production

-innovations élevées

-techniques de production instables

-production intensive en travailleurs qualifiés pour élaborer le produit

- production à petite échelle , d’où coût unitaire de production important , prix de vente élevé

-le produit est mis au point , la technologie se stabilise , sauf quelques innovations mineures visant à le différencier

-intensité en capital devient forte pour répondre à l’augmentation de la demande

-production standardisée à grande échelle d’où réduction des coûts de production et baisse des prix

-banalisation de la technologie

- proportion de travailleurs non qualifiés s’accroît

-taille des unités de production augmente afin de bénéficier d’économies d’échelle pour réduire les prix

-l’obsolescence du produit se confirme

-l’intensité en travail non qualifié augmente

-pas d’investissements

Caractéristiques de la consommation

- seule une élite disposant de revenus élevés consomment le produit

-l’élasticité-prix de la demande est faible car pas de produits substituables

-à mesure que le prix diminue , il touche une partie croissante de la population qui cherche à imiter les leaders d’opinion qui ont lancé le produit

- les consommateurs deviennent plus exigeants sur la qualité , les performances du produit

-l’élasticité-prix augmente par l’apparition de substituts

-les leaders d’opinion se détournent du produit qui touche désormais essentiellement les populations à bas revenu

- la consommation arrive à saturation

-le produit se banalise , la demande est de plus en plus élastique par rapport au prix

-du fait de l’apparition de nouveaux produits qui commence à se généraliser , les quantités consommées diminuent

Structure du marché

-monopole temporaire pour la firme innovatrice

-nombre de firmes restreintes

-taille des entreprises dans la branche élevée

-structure oligopolistique se met en place car de nombreuses firmes sont attirées par des perspectives de profit élevé et imitent l’innovateur

- la concurrence s’effectue par la différenciation des produits , ce qui n’empêche pas une standardisation et une baisse des prix

- l’oligopole se stabilise

- le produit se banalise , la concurrence se porte de plus en plus sur les prix

-la taille des entreprises s’accroît donc afin de rechercher les économies d’échelle

- des efforts sont tentés pour prolonger le cycle de vie ( innovations mineures , publicité )

- la structure de la branche se déstabilise

-sortie des grandes entreprises , apparition des petites entreprises

-le marché se trouve en surcapacité , suite à la baisse de la demande , le prix et la qualité des produits diminuent

b - l’analyse des échanges internationaux :

A ces différentes phases de cycle de vie du produit vont correspondre des flux d’échange internationaux entre le pays innovateur et ses partenaires . Vernon est alors amené à distinguer 3 catégories de pays :

- le pays leader: les EU ( années 50 ) se situe au sommet de la hiérarchie technologique ; les principales innovations émanent de lui

- les pays suiveurs précoces : les pays européens ( années 50 -60 )

- les pays imitateurs tardifs : les PVD

Vernon va alors distinguer 3 phases :


PHASE 1

PHASE 2

PHASE 3

Pays leader

Vernon utilise le principe de la demande représentative de Linder :

-l’apparition du nouveau produit répond à une attente exprimée par les consommateurs du pays d’origine

-le marché intérieur sert de marché test afin d’améliorer le produit

- seul le pays innovateur connaît une population assez élevée pour acheter le nouveau produit

Conclusion :durant cette phase , pas d’échange international , le bien est fabriqué et consommé dans le pays d’origine de l’innovation

le produit étant stabilisé et le prix diminuant , le producteur va chercher à étendre son marché en exportant vers les marchés des pays développés dont les niveaux de revenu sont les plus proches ( cf. Linder )

-la firme innovatrice qui est concurrencée sur son marché intérieur va essayer de profiter de son avance technologique pour prolonger son monopole temporaire sur les marchés étrangers

-le pays innovateur connaît donc un excédent de sa balance commerciale sur ce produit

-le pays leader qui supporte des coûts de production élevés va alors délocaliser la production en implantant des filiales dans les pays imitateurs précoces afin de bénéficier de coûts de production plus réduits et de mieux satisfaire la demande des pays suiveurs

- la balance commerciale voit son excédent diminuer , puis se transformer en déficit sur ce produit

Pays suiveur précoce


-les consommateurs des PDEM commencent à demander le produit , tout d’abord les leaders bénéficiant d’un revenu élevé , puis une partie croissante de la population

- la balance commerciale des pays est donc de plus en plus déficitaire sur ce produit

- les filiales du pays leader qui se sont implantées permettent de mieux répondre aux goûts des consommateurs à des prix plus bas , développent la demande

-le pays devient peu à peu exportateur , non seulement vers le pays leader mais aussi vers les PVD , dont les classes les plus aisées commencent à consommer

Pays imitateur tardif



-la balance commerciale du pays devient de plus en plus déficitaire à mesure que les classes aisées se convertissent au produit

Remarque : Dans un dernier temps , les pays imitateurs rapides vont eux aussi éprouver des difficultés à écouler leur production , car le produit étant devenu banal , les consommateurs se tournent vers de nouveaux biens , plus innovants .Les pays vont alors délocaliser leur production vers des PVD qui bénéficient de coûts de main-d’œuvre plus réduits et qui vont donc pouvoir rentabiliser la production , tout en baissant le prix de vente .

Conséquences : Dès lors , le pays innovateur et le pays imitateur précoce vont tous deux connaître un déficit de leur balance commerciale sur ce bien ,les PVD connaissant un excédent . Les entreprises qui produisent le bien dans les PVD peuvent être des filiales des grandes entreprises qui ont délocalisé leur production afin de réduire leurs coûts et/ou de se rapprocher des marchés de consommation .

Conclusion : La théorie de Vernon permet donc d’expliquer certaines formes du processus de multinationalisation .

3°) LE DEVELOPPEMENT EN VOL D’OIES SAUVAGES DE KANAME AKAMATSU

présentation du modèle : Cette théorie apparaît dans une certaine mesure comme une théorie du cycle de vie du produit adaptée aux PVD . K Akamatsu l’a forgé en s’appuyant sur le modèle suivi par le Japon. Il distingue 4 temps :

· dans un premier temps , le PVD n’exporte que des matières premières ;

- les importations en provenance des PDEM peuvent seules satisfaire sa demande intérieure de produits manufacturés.

- durant cette phase , le pays développe ses échanges avec des pays qui ont des structures économiques complémentaires de la sienne ( cf. HOS ) .

- On se situe donc dans le cadre de la DIT traditionnelle .

· dans un deuxième temps , la croissance de la demande domestique permet de rentabiliser la fabrication sur place de produits de consommation manufacturés qui sont , à l’origine , en fin de cycle de vie du produit .

- Pour ces biens , la production nationale se substitue aux importations .

- Mais , en contrepartie , les importations de biens d’équipement rendus nécessaires par le développement des industries de consommation se développent .

· dans un troisième temps , les producteurs locaux s’attaquent aux marchés des pays voisins .

- Les importations de matières premières en provenant de pays moins développés s’accroissent . On assiste donc à une expansion des échanges entre PVD .

- Durant cette phase le pays considéré entreprend une production de biens d’équipements qui se substitue aux importations en provenance des PDEM .

· durant une quatrième phase , le pays va exporter une partie de sa production de biens d’équipement vers les PVD qui , pour répondre à leur demande intérieure ou pour produire à moindre coût et réexporter des biens de consommation , ont besoin de machines .

Remarque : Cette théorie a connu un vif succès , car elle permet de mieux comprendre le développement de la zone asiatique :

- dans un premier temps , le Japon a produit puis exporté des biens de consommation bas de gamme ( le textile ) puis il s’est spécialisé sur des productions apportant une plus forte valeur ajoutée ( électronique grand public ) qu’il a exportées non seulement vers sa zone mais vers les PDEM .

- le Japon , au fur et à mesure de sons développement , a alors développé une industrie de biens d’équipement pour répondre à ses besoins domestiques . Il a par la suite exporté une partie de sa production vers des pays moins développés ( les 4 dragons du Sud-est ) vers lesquels il délocalisait la production de biens de consommation pour lesquels il n’était plus compétitif , suite à l’augmentation de ses coûts de main-d’œuvre .

- le schéma est en train de se reproduire avec les tigres vers lesquels le Japon , mais aussi les dragons délocalisent des productions nécessitant une main-d’œuvre faiblement rémunérée

III ) LA SPECIALISATION , UNE STRATEGIE DYNAMIQUE .

A ) VERS UNE NOUVELLE CONCEPTION DE LA SPECIALISATION

1° ) LES LIMITES DES ANALYSES TRADITIONNELLES DE L’ECHANGE INTERNATIONAL (16 p 292)

Critiques des analyses traditionnelles du commerce international : Comme l’indique Lafay , la théorie néo-classique de l’échange international basée sur les dotations factorielles présente 2 inconvénients majeurs :

· elle est déterministe , c’est-à-dire que chaque pays doit se spécialiser dans la production pour laquelle il a reçu des dotations factorielles ; par contre elle n’explique pas comment elles ont été constituées .

· elle est statique , c’est-à-dire que le pays , une fois qu’il a adopté une spécialisation en fonction de ses dotations factorielles doit s’y maintenir , quelle que soit l’évolution du commerce mondial .

Conclusion : Lafay peut alors en conclure : « on a l’impression que les avantages comparatifs tombent du ciel ; chaque nation doit se soumettre passivement aux exigences de la DIT et aucune stratégie active de spécialisation n’est concevable .

2° ) LA NECESSITE DE LA PRISE EN COMPTE DE NOUVEAUX FONDEMENTS

Critiques : Une telle approche néglige les deux dynamiques essentielles de l’échange :

- celle des entreprises à l’échelle multinationale,

- comme celle des nations dans l’espace économique mondial .

Explications :

· la dynamique des entreprises résulte de l’innovation : nouveaux produits , nouvelles méthodes de production qui permet à chacune d’entre elles de créer des avantages comparatifs micro-économiques en surclassant ses concurrents ( ... ) . Les avantages comparatifs sont perpétuellement créés et renouvelés . La possibilité d’extension multinationale permet de choisir la localisation de ces activités , sous la contrainte des coûts nationaux de production » ( cf. Vernon ) .

· il en est de même pour les nations : chaque nation peut faire évoluer sa dotation relative en facteurs de productions en fonction des innovations qu’elle réalise pour s’adapter ou devancer l’évolution de la demande mondiale . Les nations vont , en fonction de cette capacité d’adaptation , développer ou non leurs exportations et donc connaître des rythmes de croissance plus ou moins forts .

Conséquences : Dès lors , comme l’indiquent D.Taddei et B.Coriat , les tenants de la théorie de la compétitivité salariale qui considéraient que les pays devaient se spécialiser en fonction de leurs coûts de main-d’œuvre résultant des dotations factorielles se sont trompés : « il n’y a pas de corrélation significative entre les coûts salariaux et les parts de marché » . Ceci résulte en particulier du fait que les consommateurs ne s’intéressent pas seulement au prix mais aussi à la qualité du produit , que le coût du produit n’est pas seulement déterminé par le coût salarial , mais connaît d’amples variations en fonction du coût du capital et des consommations intermédiaires .

Conclusion : Lafay peut alors en conclure que:

· « la spécialisation d’une nation n’est pas le fruit d’une adaptation passive à des tendances spontanées , elle doit découler d’un effort permanent pour utiliser au mieux ses atouts dans un environnement en perpétuel mouvement .

· Seule l’innovation peut permettre à l’industrie française de créer des avantages comparatifs et de les renouveler continuellement , soit par le lancement de nouveaux produits , soit par l’adoption de processus de production plus efficaces .

· Et pour innover efficacement , il ne suffit pas de faire des efforts de R-D , il faut que les entreprises choisissent leurs cibles , en fonction de l’étude prospective du marché mondial , tant sur la demande que sur l’offre concurrente .

· Au lieu d’effectuer des efforts uniformes dans tous les domaines , les entrepreneurs ont pour mission de prendre des risques , de dépasser la concurrence sur certains créneaux et sur certaines filières plutôt que sur d’autres , bref de mettre au premier rang l’impératif de la spécialisation .

· Cela implique évidemment que l’on renonce à être présent dans certaines activités et donc que l’on abandonne les visions mythiques telle que la reconquête du marché intérieur :celles-ci n’ont de sens que dans une économie vouée à l’autarcie . Dans tous les pays qui ont choisi de s’ouvrir à la concurrence internationale , plus personne ne se pose la question de savoir s’il faut se spécialiser ; à partir du moment où l’on a préféré l’économie ouverte à l’autarcie , l’impératif de spécialisation l’emporte inéluctablement . »

B ) DE NOUVELLES FORMES DE COMPETITIVITE

1° ) LES DEUX TYPES DE COMPETITIVITE

Définition :: « la compétitivité est la capacité à maintenir et à accroître ses parts de marché » .

a - la compétitivité-prix :

Pendant très longtemps on a considéré que la seule source de compétitivité pour une entreprise ou un pays était la compétitivité-prix qui vise à produire à moindre coût afin de réduire les prix pour dépasser la concurrence et s’attirer les faveurs des consommateurs .

Les limites : Mais cette forme de compétitivité ne semble pas aujourd’hui être la forme dominante par laquelle luttent les entreprises les plus innovantes .

b - la compétitivité-qualité ou compétitivité hors-prix ou structurelle:

Il nous faut alors définir la compétitivité hors-prix ou structurelle qui est la capacité à imposer ses produits sur le marché indépendamment de leur prix .L’entreprise grâce à l’innovation , à l’amélioration de la qualité de ses produits , à son adaptation à la demande , à la qualité de ses services , ... peut gagner des parts de marché tout en maintenant des prix plus élevés que ceux de ses concurrents .Les entreprises bénéficient ainsi d’une meilleure rentabilité qui peut être à l’origine d’un cercle vertueux .

c - Conclusion :

Remarque : Néanmoins , compétitivité-prix et hors-prix ne s’opposent pas nécessairement pour 2 raisons :

· le consommateur opère son choix en se basant sur plusieurs critères : la qualité , l’innovation certes mais aussi le prix . Dans un contexte de concurrence très forte ( marché offreur ) , les entreprises se doivent non seulement d’offrir des produits de qualité , mais aux prix les plus compétitifs possibles .

· l’entreprise qui désire rentabiliser son innovation peut diminuer le prix de vente afin d’accroître la demande donc la production . Elle bénéficiera ainsi d’économies d’échelle qui lui permettront de diminuer son coût , d’améliorer sa rentabilité , donc de financer des efforts de recherche lui permettant de réaliser des innovations incrémentales ( différenciation des produits , ... ) ou majeures .

2° ) LE POLE DE COMPETITIVITE

Critique de la conception libérale :Comme l’indique C.Stoffaes , la conception libérale du commerce international est trop limitée . En effet , elle considère seulement que : « la compétitivité d’une nation repose sur la capacité de ses entreprises prises individuellement à être plus compétitives . Mais ces entreprises sont plongées dans un environnement national . La compétitivité n’est pas seulement l’affaire des entreprises ; elle comporte des éléments compétitifs , ce qui font un tissu industriel compétitif . »

Définition : dans cette perspective , les pôles de compétitivité jouent un rôle de structuration de l’appareil productif . En effet , ce sont « des ensembles d’entreprises qui ont acquis des positions dominantes dans la concurrence internationale et qui exercent des effets d’entraînement pour une grande variété d’activités productives » ( Aglietta ) .

Répercussions : elles peuvent s’exercer aussi bien vers l’aval que vers l’amont que latéralement entre les firmes :

· vers l’aval : les clients peuvent bénéficier :

- des gains de productivité acquis par les pôles grâce aux rendements d’échelle et surtout à l’apprentissage des facteurs qui influencent l’évolution de la demande .

- Ils bénéficient aussi de produits intermédiaires plus innovants , de meilleure qualité qui leur permettront de mieux satisfaire leurs clients .

· vers l’amont : en direction des fournisseurs et des sous-traitants car les pôles offrent :

- des débouchés réguliers et généralement croissants ( d’où économies d’échelle )

- et des incitations à innover .

· latéralement : entre les firmes composant le pôle par la diversification des produits , l’incitation à l’innovation , ils permettent de dynamiser la concurrence oligopolistique et donc la compétitivité du pôle .

Conclusion : Le pôle permet ainsi de constituer des filières de production qui améliorent la cohésion du tissu productif ( en développant les synergies ) et permettent ainsi de réduire la contrainte extérieure que subissent les pays .

3°) POLE DE COMPETITIVITE ET CONTRAINTE EXTERIEURE

a -définition de la contrainte extérieure :

définition : la notion de contrainte extérieure traduit la dépendance d’une économie à l’égard des autres économies et peut se définir par l’impossibilité pour certains pays de concilier une croissance forte et l’équilibre des échanges extérieurs » . Ainsi le pays ne pourrait pas connaître de décalage conjoncturel par rapport à ses concurrents ( c’est-à-dire un rythme de croissance plus fort que celui des autres pays avec lesquels il commerce ) , sous peine de voir ses importations progresser plus vite que ses exportations et voir son déficit commercial se creuser .

exemple :L’exemple typique est celui de la relance keynésienne menée en 1981 par la France qui , à propension à importer constante ( m = M / PIB ) s’est traduite mécaniquement par une poussée des importations alors que dans le même temps nos partenaires appliquaient des politiques de rigueur qui diminuaient leur propension à importer et donc nos exportations .

conclusion : Il semble dès lors que :

· sous peine de connaître un déficit commercial croissant , le pays doit s’interdire de mener des politiques de relance keynésienne , sous peine d’être confronté à la contrainte extérieure .

· Mais la contrainte extérieure n’est pas seulement déterminée par le rythme de croissance du PIB ; elle est aussi fonction des coûts de production d’un pays . Celui-ci ne peut se permettre sous peine de voir sa compétitivité-prix diminuer et donc sa balance commerciale devenir déficitaire de voir son coût salarial ( et plus largement ses coûts de production ) progresser plus vite que celui de ses partenaires . Cela semble condamner une politique keynésienne par augmentation des salaires

· A plus long terme , l’accumulation des déficits par un pays qui rend sa balance commerciale structurellement déficitaire nécessitera des importations de capitaux croissantes qui aggraveront le déficit de la balance des capitaux et qui , à terme , entraîneront une méfiance des prêteurs qui exigeront du pays des taux d’intérêt plus élevés ou qui même refuseront tout nouveau emprunt , dès lors que le pays a buté sur sa contrainte de solvabilité .

b -le rôle du pôle de compétitivité sur la contrainte extérieure :

Les pôles de compétitivité permettent de desserrer ces contraintes extérieures :

· l’effet de structuration par la constitution de filières cohérentes rend le contenu en importation de la croissance moins élevé , permet de tirer les exportations , donc réduit le déficit commercial malgré l’existence d’un décalage conjoncturel . Durant les années 80 , un pays comme le Japon ou l’Allemagne pouvait se permettre de connaître une croissance économique plus forte qu’un pays comme la France .

· le pôle de compétitivité proposant des produits innovants , de qualité recherche une compétitivité hors-prix qui lui permet d’offrir à ses employés des revenus plus élevés que ceux de ses concurrents sans subir de perte de compétitivité remettant en cause sa viabilité . Ceci peut permettre d’engager un cercle vertueux : les salaires étant plus élevés , les individus sont plus motivés , plus qualifiés donc plus incités à innover ( théorie du salaire d’efficience ) , ce qui accroît encore la compétitivité hors-prix .

4° ) LES EXEMPLES

a ) L’exemple français

Constat : La France , malgré une amélioration notable depuis le milieu des années 80 , se caractérise par un certain nombre de faiblesses du point de vue de sa compétitivité :

· la France est peu spécialisée , c’est-à-dire qu’elle est présente sur beaucoup de marchés ( le slogan au début des années 80 était : il n’y a pas d’ industries condamnées , il ya seulement des technologies dépassées ) , sans bénéficier d’aucune avantage comparatif réel

· la France est mal spécialisée : n’ayant pas su opérer suffisamment tôt des choix sur des créneaux porteurs , la France ne dispose d’aucune position forte sur les marchés connaissant une demande mondiale dynamique ( cf. l’exemple de l’informatique l’échec de Bull lancé dans les années 60 par la politique gaullienne de champions nationaux)

· la France ne dispose pas véritablement de pôles de compétitivité structurés lui assurant une compétitivité hors-prix , les entreprises françaises étant concentrées sur des produits relativement banalisés sont très sensibles à la variation de leurs coûts de production et donc à leur compétitivité-prix

Conclusion : Le résultat de tout ceci est que l’économie française est très sensible à la contrainte extérieure. L’analyse que fait F.Milewski de l’amélioration du solde de la balance commerciale est à cet égard moins optimiste que ne le laisseraient penser les chiffres :

· Certes après 12 ans de déficit commercial( sauf 1986 ) la France a connu depuis 1992 un excédent croissant jusqu’au début des années 2000,

· mais celui-ci résultait au moins autant de l’atonie (faiblesse) de la croissance que l’on a pu observer durant les années 90 que de l’amélioration de la spécialisation .

· En effet , depuis 1982 , la France applique une politique de désinflation compétitive qui a permis de diminuer les coûts salariaux et donc d’améliorer la compétitivité-prix .

· Aujourd’hui , cette politique trouve ses limites , tous les pays européens l’appliquant simultanément elle n’a plus rien de compétitive , ce qui explique la dégradation de la balance commerciale depuis les années 2000 : l’économie française ayant mal résisté à la valorisation de l’euro, ses produits étant moins compétitifs du point de vue des prix. La forte dégradation de l’année 2005 est d’autant plus inquiétante qu’elle se situe dans un contexte de forte croissance du commerce mondial, les parts de marché détenues par l’économie française ont donc régressé.

· Par contre , elle freine la croissance économique potentielle , donc l’augmentation de la demande , donc la progression des importations ( à propension à importer constante ) .

· Une lecture attentive de l’amélioration de la balance commerciale conduit donc à penser que celui-ci résulte au moins en partie d’un décalage conjoncturel favorable à la France ( qui croît moins vite que ses partenaires, surtout que les USA ou le royaume uni ) plutôt que d’une amélioration sensible de sa compétitivité hors-prix ( même si celle réelle ne doit pas être sous-estimée ) .

Les conséquences : Dès lors « en 95 et 96 , on ne peut s’empêcher de mettre en parallèle le ralentissement économique et l’amplification de l’excédent ( ...) . Certes , se créent des capacités de financement extérieur qui pourront être autant de réserves pour le développement futur . Mais en attendant , l’économie française s’est installée en deçà de son potentiel d’activité . Le chômage élevé en découle . » ( F.Milewski ) . Cette conclusion reste malheureusement valable pour le debut des années 2000.

b ) L’Allemagne

Constat : Contrairement en France , l’Allemagne est un pays spécialisé depuis fort longtemps qui dispose donc de pôles de compétitivité très performants ( en particulier dans la machine-outil ) qui lui ont permis de structurer des filières cohérentes ( principalement la chimie et la mécanique ) .

Les limites de la spécialisation allemande : La situation de l’Allemagne paraît donc très enviable aux français , il n’en reste pas moins qu’aujourd’hui un certain nombre d’observateurs se demande dans quelle mesure l’Allemagne n’est pas un géant aux pieds d’argile . En effet :

· sa spécialisation manque de dynamisme ; elle n’a pas su s’adapter à l’évolution de la demande mondiale ; les points forts de l’Allemagne ont été constitués durant la seconde révolution industrielle basée sur la mécanique et la chimie . Il est donc normal que l’Allemagne excelle dans ses productions qui portent plus souvent sur des petites séries de produits spécialisés en faisant appel à une main-d’œuvre ouvrière très qualifiée .

· Mais l’Allemagne n’a pas su prendre le train de la troisième Révolution industrielle basée sur les technologies électroniques . Dès lors , sa spécialisation se révèle de plus en plus inadaptée à l’évolution du commerce mondial et les hauts salaires qu’elle verse à sa population ne sont plus compensés par la compétitivité hors-prix qui se dégrade .

·

· c ) Les Etats-Unis

Constat : On peut distinguer plusieurs phases :

· Entre 1945 et 1960 , les EU occupaient une position de leader qui résultait de leur avance technologique très importante par rapport à leurs concurrents européens et japonais ( cf. Vernon ) .

· A partir des années 60 , japonais et européens ont rattrapé leur retard et ont même sur certains domaines dépassé le maître américain .

· On s’est même demandé , à partir des années 70 , suite à la non-convertibilité or du dollar , puis dans les années 80 avec l’accroissement du déficit commercial dans quelle mesure les américains ne seraient pas en train d’abandonner leur leadership , ne connaîtraient pas une désindustrialisation qui les conduirait à une évolution telle que celle qu’a connu la GB depuis le XIX° siècle

· Or il semble depuis la fin des années 80 , que les américains confrontés au défi japonais ont su réagir , ont restructuré leurs industries , ont relancé leurs formidables capacités d’innovation et ont donc conforté leur leadership en particulier dans le domaine des industries en tique et plus largement ont réorienté leur processus productif vers le secteur quaternaire

d ) Le Japon

Présentation de La stratégie japonaise : elle est particulièrement intéressante : elle peut être assimilée à une stratégie de remontée des filières :

· dans un premier temps , les entreprises japonaises ont concentré leurs efforts sur des produits de consommation grand public pour lesquels elles pouvaient bénéficier d’économies d’échelle . Elles ont donc développé en particulier la photo , la hi-fi des produits moyens de gamme , bourrés d’électronique qui ont mis à mal les produits hauts de gamme mécaniques allemands .

· les entreprises japonaises ont pu alors constitué des pôles de compétitivité cohérents , caractérisés par une forte concurrence , une capacité d’innovation élevée qui leur ont permis de passer des produits moyens de gamme à des produits hauts de gamme et d’occuper une position dominante sur le marché .

· ces pôles de compétitivité ont ainsi servi de base pour investir les autres postes de la filière et , en particulier , forts de l’expérience acquis dans l’électronique de consommation , les entreprises japonaises ont développé des biens d’équipement basés non plus sur la mécanique ( Allemagne ) mais sur l’électronique .

Conclusion :Elles ont opéré ainsi une stratégie de remontée de filière qui est conforme à la logique du modèle de K..Akamatsu .

Néanmoins aujourd’hui la stratégie japonaise semble mise à mal sur les créneaux les plus porteurs par le retour de l’économie américaine

Pour ceux qui veulent aller plus loin : "LES TRANSFORMATIONS DES ECHANGES ET DES INVESTISSEMENTS INTERNATIONAUX"

Plan de cours d'Alexandre Minda 2ieme année d'IEP

SECTION II : LA TENTATION PROTECTIONNISTE ( 2 p 257)

I ) UNE LIBERALISATION NECESSAIRE DES ECHANGES INTERNATIONAUX

A ) LE LIBRE-ECHANGE EST OPTIMAL

le postulat libéral : Dans l’optique libérale qui va de Smith à HOS , le libre-échange est optimal et conduit à une amélioration du bien-être de tous les échangistes . En effet , les pays ayant basé leur spécialisation sur des dotations factorielles complémentaires ont intérêt à laisser librement entrer les produits , car il bénéficie ainsi de biens de meilleure qualité à des prix plus réduits , ce qui améliore la satisfaction des consommateurs .

L’apport des nouvelles théories au libre-échange :Les nouvelles théories de la croissance semblent rendre le libre-échange plus nécessaire que jamais :

- la théorie de la croissance endogène montre que , plus l’accumulation du progrès technique et des connaissances est élevée , plus forte sera la croissance potentielle , le resserrement des liens économiques entre les pays accroît la propagation des techniques , réduit le risque de duplication d’activités de R-D et génère donc une croissance économique plus forte .

- afin de réduire leurs coûts de production , les entreprises cherchent à bénéficier de rendements d’échelle qui nécessitent une augmentation des débouchés qui n’est réalisable que par le développement du libre-échange et l’instauration du marché mondial .

- le libre-échange réduit les distorsions de prix en homogénéisant les prix des entreprises fabriquant les mêmes produits . Dès lors , les entreprises vont être incitées à investir sur les marchés les plus porteurs , ce qui conduira à une amélioration de l’efficience économique et donc à terme de la croissance économique .

B ) LE PROTECTIONNISME GENERE DES EFFETS PERVERS

Problème :Néanmoins , aujourd’hui :

- dans un contexte de crise économique , d’augmentation du chômage , la concurrence exercée par les pays à faible coût de main d’œuvre semble entraîner la disparition de pans entiers de l’industrie qui sont alors délocalisés , en particulier vers les NPI , ce qui multiplie les licenciements .

- Aussi , de nombreuses voix s’élèvent en particulier dans les rangs syndicaux pour demander l’application de mesures protectionnistes .

Critique de cette analyse : Les auteurs libéraux s’y opposent , considérant qu’elle débouche sur une situation sous-optimale

- l’expérience des années 30 a montré que le pays qui met sur pied une politique protectionniste afin de protéger son industrie nationale va subir à son tour des mesures de rétorsion de la part de ses partenaires étrangers , ce qui risque de déboucher sur une généralisation du protectionniste , qui ne peut que freiner la croissance et détruire des emplois

- les pays d’Asie du Sud-Est ne sont pas aujourd’hui seulement source de destruction d’emplois ; ils représentent la zone qui connaît la plus forte croissance économique et qui fournit donc des débouchés à nos entreprises , en particulier dans les secteurs à forte valeur ajoutée dans lesquels l’industrie française est en train de se spécialiser ( ex : T.G.V. en Corée du Sud ) . Fermer nos frontières c’est se priver des débouchés dans cette zone et donc se priver d’emplois .

- la solution serait d’autant plus malvenue que l’application de mesures protectionnistes en maintenant artificiellement des emplois dans des secteurs où elle n’est plus compétitive ( ex : textile ) retarderait une spécialisation sur les secteurs les plus dynamiques , qui (comme l’ a montré Lafay) nécessite d’opérer des choix . La France ne pouvant être présente sur tous les marchés , il faut qu’elle opère une stratégie de spécialisation qui dynamisera sa croissance économique .Sauvegarder des emplois dans les secteurs traditionnels , c’est au contraire perpétuer une spécialisation sur les produits où l’on se concurrence par la compétitivité-prix ; c’est donc à terme détériorer la compétitivité structurelle de l’industrie française qui rejoindrait le rang des pays intermédiaires en quittant celui des PDEM .

- il ne faut pas non plus oublier que le protectionnisme a un coût pour le consommateur . Une étude de JENKINS concernant le coût de la protection de l’industrie textile canadienne démontre que l’imposition des auto-limitations a permis de maintenir ou de créer 6000 emplois mais que chaque poste de travail a coûté 14 000 dollars alors que le salaire moyen dans cette industrie n’était que de 10 000 dollars ( il aurait mieux valu payer 10 000 dollars des chômeurs ) . Cette mesure a coûté aux consommateurs canadiens 467 millions de dollars en 79 ; les industriels canadiens profitant des mesures protectionnistes pour augmenter leur prix jusqu’à 30 % . Cette mesure a donc détérioré le pouvoir d’achat des consommateurs les plus défavorisés qui ont du payer plus cher du textile bas de gamme que les PVD leur auraient procuré à un prix beaucoup plus réduit .

Conclusion : une politique protectionniste n’est donc pas neutre économiquement , elle engendre une redistribution des revenus des consommateurs qui perdent du pouvoir d’achat suite à la hausse des prix vers les producteurs qui maintiennent artificiellement des prix élevés . Elle représente donc un jeu à somme nulle . Le jeu est même à somme négative , si comme le montre l’exemple de l’industrie textile canadienne , les barrières douanières incitent les producteurs à se spécialiser vers les produits les moins porteurs , laissant ainsi à leurs concurrents étrangers les spécialisations les plus dynamiques

Les répercussions négatives sur les PVD : la politique protectionniste est donc néfaste pour le pays qui l’applique , mais elle risque en outre de freiner le développement des PVD . En effet , les PVD n’ayant pas de marché intérieur suffisamment solvable pour assurer un décollage économique ( cf. cercle vicieux de Nurske et échec de la stratégie de l’industrialisation par substitution d’importations ) sont obligés d’appliquer une stratégie de promotion des exportations leur permettant , en particulier , de rembourser les dettes qui ont été nécessaires pour financer les investissements assurant le take off . Les PDEM ne peuvent avoir un double langage : souhaiter le décollage des PVD et en même temps par des mesures protectionnistes leur interdire d’y accéder .

C ) LA LIBERALISATION DES ECHANGES INTERNATIONAUX PAR LE GATT ET L’OMC

Constat : il y a eu un cercle vicieux dépressionniste engendré en particulier par la multiplication des barrières protectionnistes durant l’entre-deux guerres qui a freiné l’expansion du commerce mondial et donc la croissance économique ,

Solution : les grands pays développés ont , dès la fin de la guerre , signé un accord ( le GATT en 47 ) qui avait pour objectif affirmé de favoriser le plein emploi et la croissance économique par le développement des échanges internationaux assurés par une diminution des barrières protectionnistes .

Résultat : l ‘objectif a été atteint puisque les tarifs douaniers moyens des produits industriels dans les PDEM sont passés de 40 % à 5 % en 90 .

Nouveau débat : mais , suite à l’entrée en crise , la tentation protectionniste est réapparue dès les années 70 par l’imposition de barrières non tarifaires . Les pays signataires de l’accord du GATT devaient alors décider :

· s’ils voulaient comme dans les années 30 engager une guerre protectionniste qui bloquerait la croissance économique

· ou au contraire s’ils désiraient , par une libéralisation accrue des échanges internationaux ( portant non plus seulement sur des barrières tarifaires mais aussi sur des barrières non tarifaires , portant non plus seulement sur l’industrie mais aussi sur les services et l’agriculture ) dynamiser le commerce mondial et assurer ainsi une sortie de crise

Solution : c’est dans cette perspective qu’ont été menées les discussions de l’Uruguay Round qui ont débouché sur la création de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) en 1995 .

II ) VERS UN RENOUVEAU DU PROTECTIONNISME

Introduction :

Selon Ha-Joon Chang le protectionnisme est un facteur de développement ;

« A peu près tous les pays aujourd'hui développés (PAD) avaient des politiques interventionnistes actives en matière de commerce, d'industrie et de technologie. Pendant les périodes de " rattrapage ", leur but était de développer leurs industries naissantes ; lorsqu'ils ont atteint leur objectif, ils ont eu recours à des pratiques leur permettant de distancer leurs possibles concurrents. Ils ont pris des mesures pour maîtriser les transferts de technologies vers ces derniers (par exemple en mettant en place un contrôle de l'émigration des travailleurs qualifiés ou de l'exportation+ des machines) et, par des traités inégaux et par la colonisation, ont contraint les pays moins développés à ouvrir leurs marchés. Toutefois, les économies en phase de rattrapage autres que les colonies (officielles ou de fait) n'ont pas accepté passivement ces mesures restrictives. Pour surmonter les obstacles qu'elles créaient, elles ont mis en oeuvre toutes sortes de moyens légaux et illégaux, tels que l'espionnage industriel, le débauchage illégal de main-d'oeuvre et le passage d'équi pements en contrebande.

L'étude des expériences historiques d'un ensemble de PAD (la Grande-Bretagne, les Etats-Unis, l'Allemagne, la France, la Suède, la Belgique, les Pays-Bas, la Suisse, le Japon, la Corée et Taiwan) détruit beaucoup de mythes qui biaisent aujourd'hui le débat, les plus nombreux portant sur les politiques économiques de la Grande-Bretagne et le capitalisme+ de libre-échange+ des Etats-Unis - les deux patries supposées du libéralisme+.

  1. La Grande-Bretagne

  • Contrairement au mythe populaire qui veut qu'elle se soit développée sur la base du libéralisme et du libre-échange, la Grande-Bretagne a utilisé agressivement - jusqu'à en être un pionnier dans certains domaines - des politiques volontaristes destinées à développer ses industries naissantes. De telles pratiques, même si leur portée est limitée, remontent au XIVe siècle (Edouard III) et au XVe siècle (Henry VII) pour ce qui concerne l'industrie lainière, l'industrie de pointe à l'époque. L'Angleterre exportait alors de la laine brute vers les Pays-Bas. Henry VII tenta de changer cette situation en taxant les exportations et en débauchant des ouvriers qualifiés hollandais. Entre la réforme de la politique commerciale, décidée en 1721 par le Premier ministre Robert Walpole, et l'abrogation de la loi sur les blés, en 1846, la Grande-Bretagne a mis en oeuvre des politiques agressives en matière d'industrie, de commerce et de technologie. Pendant cette période, elle pratiqua activement la protection des industries naissantes, les subventions à l'exportation+, les réductions de droits pour l'importation de matières entrant dans la fabrication des produits qu'elle exportait, le contrôle de la qualité des exportations par l'Etat - toutes pratiques qui sont typiquement associées au Japon et autres pays est-asiatiques. Comme le montre le tableau supra, la Grande-Bretagne a eu des tarifs douaniers très élevés sur les produits manufacturés jusque dans les années 1820, soit quelque deux générations après le démarrage de sa révolution industrielle et alors qu'elle possédait une avance technologique significative sur les nations concurrentes.

  • C'est donc avec l'abrogation de la loi sur les blés, en 1846, que les Britanniques se sont convertis nettement - même si ce n'était pas complètement - au libre-échange. On considère habituellement cette décision comme la victoire définitive de la doctrine économique libérale classique sur l'aberration mercantiliste (par exemple Bhagwati, 1985), mais nombre d'historiens la voient comme un acte d'" impérialisme libre-échangiste " destiné à " mettre un terme à l'industrialisation+ sur le continent en accroissant les débouchés pour les produits agricoles et les matières premières " (Kindleberger, 1978, p. 196). C'est d'ailleurs ainsi que le présentaient les meneurs de la campagne pour l'abrogation de la loi sur les blés, tels que le politicien Richard Cobden et John Bowring, de la Chambre de commerce+.

  • En bref, contrairement à la croyance populaire, l'exemple britannique de passage à un régime de libre-échange s'est construit " derrière des barrières douanières élevées et durables ", comme l'écrit l'éminent historien de l'économie Paul Bairoch (Bairoch, 1993, p. 46). C'est pourquoi Friedrich List, l'économiste allemand du XIXe siècle considéré (à tort, comme nous allons le voir) comme le père de la théorie moderne des " industries naissantes ", a déclaré que les Britanniques prêchant pour le libre-échange se comportaient comme celui qui, arrivé en haut du mur, " tire l'échelle " qui lui a servi à grimper. Cela vaut la peine de le citer plus longuement : " C'est un ingénieux procédé, fort commun, lorsque quelqu'un a atteint le sommet de sa grandeur, qu'il tire l'échelle qui lui a permis de grimper, afin de priver les autres des moyens de le rattraper. C'est le secret de la doctrine cosmopolite d'Adam Smith, des tendances cosmopolites de son grand contemporain William Pitt, et de tous ceux qui leur ont succédé au gouvernement britannique. Toute nation qui, sous la protection des droits de douane+ et des restrictions à la navigation, a porté sa puissance industrielle et maritime à un tel niveau de développement qu'aucun autre pays ne peut lui faire concurrence, n'a rien de plus sage à faire que de retirer ces échelles vers sa grandeur, de prêcher aux autres nations les avantages du libre-échange+ et de déclarer sur le ton du repentir qu'elle s'était jusqu'ici égarée, et qu'elle vient de découvrir la vérité " (List, 1885, p. 295-296).

  1. Les Etats-Unis

Si la Grande-Bretagne fut le premier pays à lancer avec succès sur une grande échelle la stratégie de la promotion des industries naissantes, ses utilisateurs les plus actifs furent les Etats-Unis - que Paul Bairoch a désignés comme " le berceau et le bastion du protectionnisme+ moderne " (Bairoch, 1993, p. 30).

  • En effet, les premiers arguments systématiques en faveur des industries naissantes ont été développés par des penseurs améri cains, comme Alexander Hamilton, le premier secrétaire au Trésor des Etats-Unis, et Daniel Raymond. C'est dans les années 1820, pendant son exil aux Etats-Unis, que Friedrich List, le père intellectuel supposé de la théorie de la protection des industries naissantes, a commencé à apprendre sur la question. Beaucoup d'intellectuels et de politiciens américains avaient bien compris, pendant la période de " rattrapage " de leur pays, que la théorie du libre-échange défendue par les Britanniques ne leur convenait pas. List fait l'éloge des Américains pour ne pas avoir écouté des économistes influents comme Adam Smith ou Jean-Baptiste Say, qui soutenaient que la protection des industries naissantes serait un désastre pour les Etats-Unis, pays riche en ressources. Les Américains ont obéi au " bon sens " et à " l'instinct de ce qui était nécessaire pour la nation " (List, 1885, p. 99-100), et continué à protéger leurs industries, en commençant par mettre en vigueur un nouveau tarif douanier+ en 1816 (3).

  • Entre 1816 et la fin de la Seconde Guerre mondiale, les Etats-Unis ont eu l'un des taux moyens de droits de douane sur les importations de produits manufacturés les plus élevés du monde. Comme le pays a bénéficié, au moins jusque dans les années 1870, d'une protection " naturelle " exceptionnelle, du fait des coûts de transport élevés, on peut dire que les industries américaines ont été les plus protégées du monde jusqu'en 1945. Après la guerre de Sécession, le protectionnisme devint très important. Contrairement à ce que l'on croit, ce conflit n'a pas eu comme seul motif la question de l'esclavage : les tarifs douaniers furent une cause au moins aussi importante (4). C'est seulement après la Seconde Guerre mondiale, quand leur suprématie industrielle ne fut plus contestée, que les Etats-Unis libéralisèrent leur commerce (même si ce ne fut pas aussi radicalement que les Britanniques l'avaient fait au milieu du XIXe siècle) et commencèrent à se faire les champions du libre-échange+ - apportant une fois de plus la preuve que List avait raison avec sa métaphore de l'" échelle tirée ". La citation ci-après d'Ulysses Grant, héros de la guerre de Sécession et président des Etats-Unis de 1869 à 1877, montre bien que les Américains ne se faisaient aucune illusion sur le fait qu'ils avaient, comme les Britanniques, " tiré l'échelle " (5) : " Pendant des siècles l'Angleterre a tablé sur la protection, qu'elle a porté à son plus haut niveau. Elle en a obtenu des résultats qui la satisfont. C'est sans aucun doute à ce système qu'elle doit sa puissance actuelle. Après deux siècles, elle a trouvé bon d'adopter le libre-échange+ parce qu'elle pensait que le protectionnisme+ ne pouvait plus rien lui apporter. Eh bien, messieurs, ma connaissance de notre pays me permet de croire que dans deux cents ans, quand l'Amérique aura tiré de la protection tout ce qu'elle peut lui apporter, elle aussi se convertira au libre-échange " (Ulysses S. Grant, cité dans A. G. Frank, 1967, p. 164).

  1. Exercices de distancement

Comme je l'ai signalé plus haut, une fois arrivés au sommet, les PAD ont utilisé toutes sortes de tactiques pour distancer les pays qui suivaient. Les politiques mises en oeuvre furent, bien entendu, différentes selon le statut politique de ces derniers - colonies, pays semi-indépendants liés par des traités inégaux ou nations concurrentes indépendantes.

  • La Grande-Bretagne a empêché le développement industriel de ses colonies de façon particulièrement agressive. Premièrement, elle a encouragé la production de matières premières par des subventions (les " primes ") et supprimé les droits de douane+ sur les importations+ de ces marchandises en provenance de ses colonies. Deuxièmement, elle a mis hors la loi, dans ses colonies, les activités manufacturières à haute valeur ajoutée+. Troisièmement, elle a interdit aux colonies d'exporter des produits concurrents des siens. Par exemple, les Anglais ont interdit les importations+ de cotonnades d'Inde (les " calicots "), en 1700, et les exportations+ de drap au départ de leurs colonies (par exemple l'Irlande et les Etats-Unis) vers d'autres pays, en 1699. Quatrièmement, l'Angle terre interdisait aux autorités coloniales d'imposer des droits de douane+ ; et lorsqu'ils étaient nécessaires au budget+ du territoire, elle les contrait d'une façon ou d'une autre. Par exemple, quand le gouvernement colonial britannique en Inde imposa, pour des raisons purement fiscales, des droits - fort réduits : de l'ordre de 3 à 10 % - sur les importations+ de textiles, les producteurs locaux durent payer une taxe+ du même ordre, afin que la situation " soit équitable pour tous ".

  • Des " traités inégaux " furent utilisés pour priver des pays théoriquement indépendants de leur autonomie douanière, en maintenant leurs tarifs à des niveaux très bas (habituellement de 3 à 5 %). Entraient dans cette catégorie tous les pays d'Amérique latine, à commencer par le Brésil en 1810, ainsi que la Chine, le Siam, la Perse, l'Empire ottoman et le Japon.

  • Contre les pays concurrents, la politique consistait à limiter les transferts de technologies, en interdisant l'émigration de la main-d'oeuvre qualifiée ou l'exportation+ de machines performantes. Les concurrents contre-attaquaient en pratiquant l'espionnage industriel et le recrutement " illégal " de travailleurs qualifiés, et en ne respectant pas les brevets et autres droits de propriété intellectuelle. La plupart de ces pays n'accordaient qu'une protection très insuffisante aux droits de propriété intellectuelle des étrangers (par exemple en autorisant la prise de brevets sur une " invention importée "). La Suisse n'a pas eu de système de brevets jusqu'en 1907, et les Pays-Bas, même s'ils ont passé une loi sur les brevets en 1817, l'ont abrogée en 1869 et ne l'ont pas réintroduite avant 1912. Et jusqu'à la fin du XIXe siècle, au moment où l'Allemagne était sur le point de dépasser la Grande-Bretagne sur le plan techno logique, cette dernière était très préoccupée par les nombreuses contrefaçons de ses marques par les Allemands

Contexte : La création de l’OMC s’est faite dans un contexte politique très favorable au libéralisme . En effet , l’effondrement du bloc soviétique traduit pour les libéraux la supériorité du capitalisme , du marché de CPP sur tout autre système . La généralisation de l’économie de marché et la libéralisation des échanges semblent alors être les seules solutions qui s’offrent au pays qui veut connaître une croissance et un développement économique .

Limites : comme l’indique l’analyse historique de P.Bairoch , il n’y a pas de lien de cause à effet obligatoire entre la libéralisation des échanges , le développement du commerce international et la croissance économique . En effet : « l’expansion du commerce extérieur européen a été généralement plus rapide durant les périodes protectionnistes que durant la période libérale , globalement les 30 années de période libérale ( 1860-1890 ) ont été nettement plus négatives que les 30 années précédant cette période et que les 25 années la suivant . »

Conclusion : A.Grjebine peut en conclure : « en fait , le libre-échange a été favorable surtout sinon exclusivement à la première puissance économique de l’époque , c’est-à-dire le Royaume-Uni » . On peut alors se demander dans quelle mesure la libéralisation des échanges internationaux qui est en train de s’opérer aujourd’hui n’a pas été réalisée par le pays leader ( les EU ) au nom de l’intérêt général et en particulier celui des plus faibles mais en recherchant l’intérêt particulier des américains qui ont vu un moyen de maintenir leur domination .

A ) LE PROTECTIONNISME EDUCATEUR

1° ) LA NECESSITE D’UN PROTECTIONNISME .

Constat :Les pays qui occupent aujourd’hui un leadership dans le commerce mondial ( Allemagne , EU , Japon ) et qui sont donc les plus favorables au développement des échanges internationaux étaient au XIX° siècle les défenseurs d’un protectionnisme éducateur qui devait les mettre à l’abri de la concurrence exercée par le RU .

Explications : En effet , contrairement à ce qu’affirme Ricardo et toute l’école libérale , la spécialisation ne tombe pas du ciel ; elle est construite par le pays qui cherche à s’implanter dans les secteurs les plus porteurs . Si les pays les plus faibles acceptent le libre- échange , ils vont être obligés de se cantonner aux productions délaissées par le pays leader , car leurs industries n’étant pas encore compétitives , elles seront éliminées .

Conclusion : le pays en retard doit alors appliquer une stratégie protectionniste , qui contrairement à la théorie développée par les libéraux n’est pas défensive mais offensive . En effet , son industrie n’étant pas compétitive , il doit dans un premier temps la protéger par des barrières douanières qui lui offriront un marché captif ( le consommateur en contrepartie subit un coût : il paye plus cher des biens de moins bonne qualité ) .

2° ) MAIS PROVISOIRE .

Le principe : Mais ces barrières douanières ne seront que provisoires ; au fur et à mesure , les industries naissantes vont gagner en maturité , vont devenir plus compétitives , les barrières protectionnistes pourront alors progressivement être réduites .

List qui est avec Hamilton le promoteur du protectionnisme éducateur considère , en effet , qu’il faut instaurer des barrières tant que les industries ne sont pas compétitives , mais que les producteurs doivent dès l’origine savoir que ces barrières ne sont que provisoires , sinon ils ne seront pas incités , sous l’aiguillon de la concurrence ,à accroître leur compétitivité .

Exemples d’application de la stratégie : Beaucoup d’exemples de développement basés en apparence sur la logique libérale sont en réalité conformes à la logique du protectionnisme éducateur :

- les pays , comme le Japon ou la Corée du Sud qui ont su tout en appliquant une promotion par les exportations protéger leur marché intérieur par des barrières douanières ont pu constituer une base économique cohérente qui a été une des conditions ayant assuré leur développement économique .

- L’exemple de la GB aux XVIII- XIX° siècles est aussi probant :

· durant une première phase , les industriels anglais ont réclamé et obtenu l’introduction de barrières douanières pour protéger l’industrie textile naissante de la concurrence indienne ( qui produisait des produits de meilleure qualité à moindre coût ) .A l’abri des barrières , les anglais ont mécanisé leur production et ,

· une fois que celle-ci est devenu compétitive , ils sont devenus libre-échangistes , ont imposé à l’Inde un tarif douanier très faible et ont alors inondé le marché indien de leurs cotonnades ruinant par là-même l’ébauche de développement économique qu’était en train de connaître l’Inde .

·

Les limites : Certains auteurs libéraux comme Samuelson ne contestent pas cette thèse , que là où existe un avantage comparatif potentiel , des mesures protectionnistes ou plus sûrement une aide à l’industrie naissante sont nécessaires , il constate néanmoins que dans la plupart des PVD la stratégie d’ISI a échoué car les mesures protectionnistes ont perduré .

B ) LA POLITIQUE COMMERCIALE STRATEGIQUE : UN NOUVEAU PROTECTIONNISME

Constat : On a assisté au début des années 80 à une réhabilitation de la théorie du protectionnisme éducateur .

Explications : elle est basée sur la remise en cause des hypothèses démontrant l’optimalité du libre-échange :

· dès lors que l’on ne se situe pas sur des marchés de CPP , le libre-échange peut générer des effets pervers . En effet :

- contrairement à ce qu’affirmaient Ricardo et à sa suite HOS , la spécialisation ne résulte pas de déterminants statiques adoptés passivement par les Etats ( dotations factorielles ) ;

- elle est construite par les Etats qui cherchent à s’implanter sur les marchés les plus porteurs .

- Un pays qui dispose d’une avance technologique (exemple les USA) va alors essayer de la maintenir en mettant en place des barrières à l’entrée qui dissuaderont ses concurrents étrangers de se lancer dans l’innovation .

· Une des barrières essentielles est constituée par les coûts de recherche :

- Ceux ci sont très élevés , et ne pourront être rentabilisés que si l’entrant sur le marché peut bénéficier d’économies d’échelles. Il peut être alors nécessaire d’appliquer des mesures protectionnistes qui en rendant le marché intérieur captif aux entreprises nationales leur permettront Dans une première phase de rentabiliser leurs investissements .

- comme l’a démontré la théorie de la croissance endogène , l’innovation sera d’autant plus aisée que l’expérience et le capital de connaissances accumulés dans le domaine seront forts . Dès lors , il peut être utile d’aider les entreprises à obtenir ces connaissances qui constituent, elles aussi une barrière à l’entrée : l’Etat peut ainsi, soit se substituer aux entreprises afin de mener des recherches , soit par des aides les inciter à investir les créneaux les plus porteurs.

Conclusion :Ainsi, dès lors que l’on ne se situe plus sur un marché de CPP c’est à dire que :

- les entreprises du pays leader appliquent une stratégie commerciale visant à rendre leurs concurrents économiquement dépendants et incapables de générer un progrès technique leur permettant de rattraper le retard accumulé ,

- une intervention de l’Etat peut s’avérer nécessaire afin de contribuer à la constitution des avantages comparatifs sur les marchés les plus dynamiques .

- En appliquant une stratégie s’appuyant sur les principes du protectionnisme éducateur ( cf. exemple d’Airbus : doc 22 p 247 ) un pays peut permettre à ses entreprises de conquérir une place sur un marché oligopolistique caractérisé par de fortes barrières à l’entrée , ce qui à terme diminuera la dépendance et permettra la réduction des barrières douanières

Limites :Il n’en reste pas moins que l’exemple de Boeing et d’Airbus montrent que la politique menée par les 2 gouvernements peut être assimilée à un jeu à somme négative , puisque les pertes subies par les américains n’ont pas été compensées par une amélioration du bien-être des européens .

CONCLUSION

Contrairement à ce que l’on pourrait penser , une étude historique montre que leprotectionnisme se développe durant des périodes présentant des caractéristiques bien précises . B.assudrie-Duchêne écrit ainsi : « les poussées protectionnistes doivent être mises en relation , historiquement avec des périodes dans lesquelles les transformations technologiques sont capables de créer des retournements d’avantages comparatifs ou de spécialisation . »

B.Lassudrie-Duchêne est amené à distinguer 2 types de périodes :

- les périodes de croissance hégémonique : ( ex : 1840-1875 , 1945-1970 ) qui sont des périodes au cours desquelles le pays leader comme ses partenaires bénéficient d’avantages ou de désavantages comparés relativement stables . Dans les domaines de la haute technologie , l’avantage du leader est tel que ses suiveurs ne peuvent le concurrencer et qu’ils ont donc intérêt à importer ses produits afin d’exporter librement des produits plus traditionnels dans lesquels ils sont spécialisés .

- au contraire , dès lors que l’hégémonie du pays leader est remise en question ( la GB à la fin du XIX° , les EU depuis 1970 ) ou que la croissance économique se ralentit les conflits de répartition interne et externe se multiplient , les décideurs politiques sont alors incités à intervenir en manipulant les droits de douane , les taux de change afin de protéger leur avances technologique ( pays leader ) ou de réduire leur retard ( pays suiveur ) . Ils vont alors être amenés 2 types de protectionnisme selon LAFAY qui visent des objectifs bien différents comme l’indique le tableau suivant :


PROTECTIONNISME DEFENSIF

PROTECTIONNISME OFFENSIF

Secteur concerné

-les secteurs stratégiques relevant de la défense nationale

-les secteurs de reconversion qui subissent de plein fouet la concurrence extérieure

- les secteurs porteurs et innovateurs pour lesquels le pays ne dispose pas encore d’un avantage comparatif

Objectifs recherchés

- il s’agit de reconvertir la branche menacée par la concurrence étrangère en favorisant un repli en bon ordre sur les créneaux les plus porteurs , en restructurant la filière par la spécialisation intrabranche

- le pays qui n’est pas encore compétitif sur un secteur d’avenir doit protéger ses industries naissantes , afin de combler le handicap provisoire et de ne pas tomber dans la dépendance du pays leader sur ce marché ( ex : l’informatique en Europe )

Dangers encourus

- le danger est que la protection devienne permanente , sous la pression des secteurs traditionnels qui cherchent à se protéger de la concurrence des PVD , ceci retarderait un nécessaire redéploiement du tissu productif vers les branches les plus dynamiques

- la protection des industries naissantes doit être planifiée et dégressive dans le temps . LAFAY écrit : « rien ne serait plus dangereux qu’une protection appliquée hâtivement sous l’influence de groupes de pression et donc le maintien illimité contribuerait ensuite à pérenniser des structures inadaptées

Type de mesures à appliquer

- une protection planifiée qui vise à assurer une restructuration en bon ordre du tissu productif , en particulier un redéploiement des emplois ( mais aussi des investissements) vers les secteurs porteurs

- une protection dégressive dans le temps : les producteurs nationaux doivent comprendre , dès l’application de mesures défensives qu’elles visent à accélérer les restructurations et non à les retarder

- une protection planifiée et dégressive dans le temps qui permette au producteur de rattraper leur retard et d’opérer une transition en douceur vers le libre-échange qui est l’objectif de moyen terme

- des objectifs réalistes qui tiennent compte des capacités réelles du pays afin de déterminer les activités pour lesquelles le seuil de compétitivité peut être atteint des délais raisonnables

- une limitation du nombre de productions protégées qui permettent réellement d’opérer des choix stratégiques de spécialisation

Conclusion : Comme le conclue LAFAY , le protectionnisme peut être la meilleure ou la pire des choses , la pire s’il consacre d’avantages d’efforts à la production défensive d’industries du passé qu’à la protection offensive des industries de l’avenir ; la meilleure s’il vise par une analyse de l’évolution des marchés une spécialisation qui dynamise les avantages comparatifs .

Pour un approfondissement sur le protectionnisme :

  1. sur la notion de dumping : 08a-Dumping.ppt (sur le site web campus)
  2. sur la notion de politique commerciale : 08b-Monopole-annexe.ppt


SECTION III : MONDIALISATION ET / OU REGIONALISATION ?

I ) UNE MONDIALISATION INELUCTABLE ET SOUHAITABLE .

INTRODUCTION

Postulat de base des néo-classiques : Comme l’écrit C.A.Michalet : « si l’on se réfère aux cadres d’analyse construits sur la base de la théorie ricardienne des avantages comparatifs et/ou du modèle néo-classique (HOS) , l’économie internationale est réduite aux flux de biens et de services échangés entre les Etats nations . Parmi les hypothèses de la théorie de la spécialisation internationale , outre celles de CPP , on trouve l’immobilité des facteurs de production .

Limites : Dans la mesure où la croissance multinationale des firmes s’accompagne généralement de flux d’investissements directs et d’autres mouvements internationaux de capitaux , il n’était plus possible de rester dans le cadre de la théorie pure de l’échange international » . Dès lors les théories traditionnelles se retrouvent incapables de décrire la nouvelle réalité ; elles doivent être adaptées

A ) DEFINITION DU TERME MONDIALISATION

Le terme mondialisation , en anglais globalisation , est un concept protéiforme . R.Boyer dans « La mondialisation , au-delà des mythes » distingue 4 définitions :

· en 83 , T.Levitt propose le terme globalisation pour désigner la convergence des marchés dans le monde entier . La société globale constituerait ainsi une entité unique , en vendant la même chose , de la même manière , partout . Cette analyse s’oppose à celle du cycle de vie du produit de Vernon qui considérait que les firmes des pays développés vendaient aux pays les moins avancés les produits devenus obsolètes dans les pays riches .

· en 90 , cette notion est étendue par K.Ohmae à l’ensemble de la chaîne de la création de la valeur ( RD , ingénierie , production , marchandisation , services et finances ) . Désormais , les firmes appartenant à un même groupe conduiraient leur RD , financeraient leurs investissements et recruteraient leur personnel à l’échelle mondiale . La globalisation définirait donc une forme de gestion totalement intégrée à l’échelle mondiale de la grande firme multinationale .

· la montée en puissance des firmes multinationales contraint alors les divers espaces nationaux à se plier à leurs exigences , du fait de l’extrême mobilité dont elles bénéficient . Ainsi , la globalisation désignerait alors le processus à travers lequel les entreprises les plus internationalisés tentent de redéfinir à leur profit les règles du jeu précédemment imposé par les Etats-nations . Souvent les tenants de la globalisation insistent sur le caractère irréversible des tendances à l’œuvre , considérant que les politiques traditionnelles des gouvernements sont devenues impuissantes face aux stratégies des grandes firmes .

· enfin , la globalisation peut définir une nouvelle configuration qui marque une rupture par rapport aux précédentes étapes de l’économie internationale . Auparavant , l’économie était internationale , car son évolution était déterminée par l’interaction de processus opérant essentiellement au niveau des états nations . La période contemporaine verrait ainsi l’émergence d’une économie globalisée , dans laquelle les économies nationales seraient décomposées puis réarticulées au sein d’un système de transactions et de processus opérant directement au niveau international . Cette définition est la plus générale et systémique ; elle entend souligner une rupture qualitative par rapport à l’ensemble des régimes internationaux qui se sont succédés depuis l’émergence du capitalisme commercial

Le FMI définit quant à lui la mondialisation comme : « l’interdépendance économique croissante de l’ensemble des pays du monde, provoquée par l’augmentation du volume et de la variétédes transactions transfrontières de biens et de services, ainsi que les flux internationaux de capitaux, en même temps que par la diffusion accélérée et généralisée de la technologie ».

B )LES INDICATEURS DE LA MONDIALISATION .

1°) LES FIRMES TRANSNATIONALES : UN AGENT ESSENTIEL DE LA MONDIALISATION .(p 264-266)

a ) DEFINITION DES FIRMES TRANSNATIONALES ( FTN )

Le terme le plus fréquemment retenu pour décrire une entreprise qui a implanté des filiales de production et de distribution dans différents pays est le terme firme multinationale (FMN) . Pourtant , celui-ci est discutable . En effet :

- il conduit à penser que les firmes pourraient avoir plusieurs nationalités .

- Or , on constate que quasiment toutes les firmes conservent une nationalité de référence : celle de leur nation d’origine .

- Nous retiendrons donc le terme FTN car , selon R.Sandretto : « le préfixe trans est incontestablement mieux adapté à la situation actuelle de ses firmes . Son double sens ( celui de traverser et celui de dépasser ) signifie que les FTN sont le prolongement extraterritorial de leur nation d’origine , qu’elles débordent ( dépassent ) tout en traversant les espaces des pays d’implantation . La firme n’est donc pas au-dessus des nations ; elle en est au contraire un principe actif . Inversement , la nation ne se confond pas avec la délimitation des frontières territoriales , en particulier la nation américaine pourrait s’étendre , via ses FTN bien au-delà des limites des Etats associés aux 50 étoiles de la bannière » .

Remarque : Les FTN s’implantent à l’étranger en développant les investissements directs ( IDE )

définition : On considère généralement qu’un investissement étranger est :

· un investissement direct si l’investisseur étranger possède 10% ou plus des actions ordinaires ou de droits de vote dans les entreprises . Ce critère a été retenu , car on estime qu’une telle participation est un investissement à long terme qui permet à son propriétaire d’exercer une influence sur les décisions de gestion des entreprises .

Une société A sera alors dite :

- filiale d’une société B si elle possède plus de la moitié des droits de vote de ses actionnaires

- affiliée si B possède moins de 50% des droits de vote , mais exerce un pouvoir de décision effectif dans la gestion de la société .

· En revanche , un investissement étranger qui est inférieur à 10% du montant des droits de votes sera considéré comme un investissement de portefeuille , car il ne permet pas d’exercer une influence sur la gestion de la société . Les investissements de portefeuille sont généralement spéculatifs , c’est-à-dire qu’ils visent à obtenir une plus-value dans le court terme , par l’achat et la cession de placements financiers et/ou monétaires .

b ) L’HISTORIQUE DE LA TRANSNATIONALISATION .

Constat : Contrairement à ce que l’on pourrait penser , ce n’est pas un phénomène récent . W.Andreff prend comme exemple celui des USA ; il constate que le stock d’IDE rapporté au PNB américain était de 5,1% en 1897 , atteint 10,8% en 1935 , tombe à 4% en 45 , remonte à 8,5% en 74 . La transnationalisation est donc un phénomène séculaire . Néanmoins ce phénomène a connu des évolutions très importantes :

Périodisation : on peut-alors distinguer les phases suivantes :

- le stock des IDE passe de 14 milliards de $ en 1914 à 105 milliards en 1967 ,

- atteint 525 en 1980 ,

- 1705milliards en 1990

- pour culminer à 3541 milliards en 2000 .

Conclusion : entre 1990et aujourd’hui le poids des IDE dans le PIB mondial a été multiplié par 4

Typologie des pays éméttant les IDE : la hiérarchie des pays à l’origine de l’IDE a elle aussi évolué :

· en 1914 , 45% du stock total d’IDE était détenu par le RU , 18 par les EU , 12 par la France , 10 par l’Allemagne .

· en 1960 , le premier rang est détenu par les EU : 52 % , le RU tombe à 17% , la France à 6,5 , la RFA à 1 , le Japon à 0,8 .

· En 82 , les EU toujours leaders ne détiennent plus que 46% du stock d’IDE , suivis de la RFA à 8 % , du Japon et du RU à 6 , de la France à 5 .

· En 1997 les EU ne détiennent plus que 25,6% du stock d’IDE, le royaume uni 11,7%, le Japon 8 %, les autres pays développés 45 %, les NPI 10 % .Les pays en voie de développement bien qu’en progression notable , représentent toujours une proportion négligeable de l’IDE .

Typologie des pays recevant les IDE : la hiérarchie des pays recevant l’IDE a été profondément transformée :

· en 1914 , 63% du stock d’IDE était destiné aux PVD ( 37% aux pays développés ) .

· En 60 , 32% aux PVD ; 68% aux PDEM .

· En 1990, 20% aux PVD , 80% aux PDEM .

· En 1997 30% pour les PVD et 70 % aux PDEM.

Typologie en fonction des secteurs : ceci résulte d’une évolution des secteurs dans lesquels est réalisé l’IDE . Comme l’écrit J.Adda :

· « jusqu’à la seconde guerre mondiale , la majeure partie des IDE était concentrée dans les secteurs agricoles et miniers , l’IDE était moins animé par une logique de concurrence à l’échelle mondiale que par une logique de concurrence entre les nations pour l’accès aux ressources du sol et du sous-sol .La prépondérance des flux d’investissement n’était que le reflet à la course à la constitution d’empires coloniaux ou de zones d’influence où les nations les plus puissantes pourraient trouver les ressources nécessaires à leur industrie . »

· Au contraire aujourd’hui la majeure partie de l’IDE se dirige vers le secteur industriel et , phénomène nouveau et en forte expansion vers les services .

c ) LES EXPLICATIONS DE LA TRANSNATIONALISATION

les raisons de la transnationalisation : La transnationalisation peut s’expliquer par 3 grands types de raisons :

· les FMN primaires qui sont essentiellement implantées dans les PVD et qui sont concentrées dans les secteurs de l’extraction minière du pétrole ou des produits agricoles s’implantent à l’étranger afin de pouvoir exploiter les ressources naturelles du sol .

· les FMN à stratégie commerciale qui visent à s’implanter sur des marchés porteurs ou de grande taille ( Inde ou pays riches ) en contournant les barrières protectionnistes mises en place par de nombreux pays (en voie de développement ( cf. le Brésil dans les années 60 ) ou développés ) en établissant des filiales relais qui montent une gamme de produits calqués sur ceux de la maison mère . Ce type d’IDE devrait diminuer avec la réduction des barrières protectionnistes accélérées par la création de l’OMC . En réalité , il semble que les entreprises préfèrent s’implanter à l’étranger afin de mieux apprécier les choix des consommateurs . Une entreprise n’a pas intérêt à céder la licence malgré les redevances que celle-ci lui rapporte qui sont moins aléatoires qu’un investissement productif sur place , car comme l’écrit J.Adda : « les exemples abondent d’entreprises , souvent japonaises , ayant acquis des technologies étrangères par achat de licences dans les années 50 et 60 qui ont pu , 20 ans ou 30 ans plus tard racheter leur ancien cessionnaire . Il apparaît ainsi que les entreprises ayant des avantages spécifiques ont le plus souvent à intérêt à les préserver et donc à assurer elles-mêmes leur exploitation internationale . A la limite , une entreprise a intérêt à internaliser tout actif lui offrant un avantage compétitif majeur , autrement dit à bloquer sa diffusion sur le marché . l’internationalisation apparaît ainsi liée à l’internalisation comme réponse aux imperfections du marché , dans un contexte de concurrence oligopolistique . »

· la transnationalisation répond enfin à une stratégie productive : dans ce cas , la conquête du marché local d’implantation n’est plus la raison essentielle de l’implantation de la filiale . En effet , la production de la filiale atelier qui est spécialisée dans la fabrication d’une partie du produit sera exportée vers le pays qui prendra en charge le montage final . On assiste alors à une véritable Division Internationale des processus productifs. La firme transnationale va implanter ses filiales dans les pays en fonction de la capacité de chaque pays à effectuer au moindre coût la pièce ou le sous-ensemble qui lui a été confié . Ceci conduit à une véritable internalisation de la production , les relations entre les filiales et la maison-mère donnant lieu à un véritable commerce intra-firme .pour un bon exemple d’analyse de DIPP(division international des processus productifs , le cas des Pontiac le mans : http://perso.orange.fr/revision-bac-es/terminale_es/chap13/dipp.htm

M.Porter peut ainsi opposer :

· les stratégies multinationales pratiquées par les firmes multinationales dans les années 60 qui consistaient à produire sur plusieurs marchés nationaux des biens adaptés à chaque marché . La production des firmes n’est donc pas spécialisée , chaque filiale est un centre de profit qui entretient des relations avec la maison mère et non avec les autres filiales .

· aux stratégies globales qui visent à unifier la gamme des produits au niveau mondial et donc à faire de chaque filiale une unité spécialisée dans la fabrication d’un composant particulier du produit fini en fonction des avantages comparatifs de chacun .

Conclusion : selon R.Reich,ce phénomène porte en lui les germes de la disparition de la nationalité des firmes , puisque la firme devient une structure mondiale en forme de réseaux dans laquelle la propriété du capital importe moins que la capacité à mobiliser et à combiner les compétences de toute nationalité en vue de réaliser les objectifs recherchés par la firme . Dès lors la firme se sert du pays dont elle est issue en fonction de ses besoins , mais son intérêt n’est pas complémentaire à celui du pays . Par exemple , par le biais des délocalisations , elle peut accroître sa compétitivité tout en augmentant le chômage dans son pays d’origine .

Relativisation : Il n’en reste pas moins que les firmes transnationales , en particulier américaines , sont largement soutenues par les autorités des pays dont elles sont issues , ce qui relativise l’analyse de Reich .

d- les analyses théoriques de la transnationalisation

Elles sont apparues à la fin des années 50 , en rejetant les hypothèses sur lesquelles étaient bâties les analyses traditionnelles de Ricardo et d’HOS , en particulier celles de :

· concurrence pure et parfaite à laquelle elles substituent celle de concurrence imparfaite de type oligopolistique

· d’immobolité internationale des facteurs de production , à laquelle elles substituent le développement des IDE

d1 – concurrence imparfaite des marchés et transnationalisation

La première question est de savoir pourquoi une firme qui s’implante à l’étranger et qui subit donc des coûts de délocalisation de sa production a intérêt à opérer une stratégie de transnationalisation .Selon Hymer , c’est parce que les transnationales ont des avantages spécifiques transférables internationalement :

· image de marque qui peut grâce à la publicité être facilement développée dans les pays étrangers

· avantage technologique dont dispose la firme

· politique gouvernementale des pays d’accueil qui cherche à attirer sur leur territoire des firmes pouvant exercer un effet d’entraînement

d2- oligopole et firmes transnationales

La théorie du cycle de vie de Vernon démontre que l’entreprise innovatrice qui dispose au départ d’un monopole technologique voit progressivement les barrières à l’entrée ( brevets , etc ) qui la protégeait tomber au fur et à mesure que le produit arrive à maturité . Elle va donc délocaliser sa production afin de :

· réduire ses coûts

· et/ou adapter ses produits à la demande locale

La firme leader , en s’implantant à l’étranger , cherche à modifier à son avantage la structure du marché .Les firmes suiveuses de l’oligopole se sentant agresser se délocalisent alors pour tenter de rétablir leur part de marché antérieure . Knickerbocker a ainsi remarqué que les firmes américaines avaient tendance à implanter presque en même temps leur filiale à l’étranger . Il observe un phénomène de grappes .

En contrepartie , la firme agressée sur son territoire par l’implantation d’une transnationale , va répondre en investissant sur le territoire de l’autre afin d’affaiblir la position du leader chez lui dans son prinipal centre de profit . Ce phénomène peut être interprété comme un échange de menaces ( exemple : quand Firestone s’est implanté en France , Michelin a racheté Uniroyal aux Etats Unis afin de mettre en difficultés Firestone sur son propre territoire et donc d’inciter la firme américaine à réduire ses ambitions en France )

d3 – internationalisation et transnationalisation de la firme

Plus la firme se développe , plus elle cherche à se diversifier ( notamment géographiquement ) pour réduire les risques d’augmenter ses profits .Mais alors , plus son organisation interne change et devient complexe .Dès lors , la firme peut avoir intérêt à développer un marché interne et à opérer une division internationale des processus productifs qui lui permet de réduire les risques et les coûts générés par les marchés :

· défauts dans la qualité du produit

· coût du produit

· assurer son approvisionnement extérieur ( Michelin possède des plantations d’hevea en Malaisie pour se fournir en caoutchouc)

· assurer la continuité internationale de son processus de fabrication tout en défendant sa technologie

R.Coase peut alors en conclure que quand les coûts de transaction sur les marchés sont plus élevés que ceux de l’organisation de la firme , celle-ci va s’internaliser et créer son propre marché .

d4- le paradigme OLI : Dunning

Dunning développe une analyse qui s’appuye sur les 3 grands types d’avantage à la transnationalisation :

· l’avantage spécifique de la firme ( O comme Ownorship advantages )

· l’avantage à la localisation à l’étranger ( L )

· l’avantage à l’internalisation ( I )

qui peuvent être caractérisés par le tableau suivant :

p 88 mucchielli

Dunning peut alors en conclure que l’IDE sera choisi comme mode de pénétration d’un marché étranger quand la firme réunit simultanément les 3 types d’avantages : O , L et I , comme le démontre le tableau suivant :

Muccheili p 89

CONCLUSION :

On assisterait donc aujourd’hui à un développement du phénomène transnational , qui se caractériserait :

· par un développement des implantations à l’étranger, sous forme d’investissements directs,

· par l’existence de différentes filiales entretenant des relations internes qui font que l’on peut désormais parler d’un réseau interne propre aux FTN , qui dépasseraient ainsi le cadre des frontières ,

· par l’apparition d’un techno-globalisme : les entreprises ne géreraient plus leurs innovations , à partir d’une base nationale , mais implanteraient des laboratoires de recherche dans leurs filiales implantées à l’étranger , signeraient des accords de recherche en particulier dans l’industrie électronique , afin de pouvoir partager les efforts de mise au point très coûteux , d’établir des standards ou des normes communes au niveau mondial , de partager les risques d’échec .

· On peut donc en conclure que la mondialisation des économies s’accélère et qu’elle devient une donnée incontournable . Ainsi , comme le constate F.Chesnais , base 100 en 75 , la FBCF se situe à 300 en 89 , le PIB à 350 , les échanges mondiaux 375 et l’IDE à 800 , alors qu’il n’était encore qu’à 200 en 85 . Cette accélération de l’investissement direct a été facilitée et s’explique par l’intégration financière internationale ( les 3 D : désintermédiation , dérégulation , décloisonnement ) .

Pour aller plus loin :

  1. les répercussions positives de la libre circulation des facteurs de production : 12-Mouvements_travail.ppt (web campus)

2° ) L’ INTEGRATION FINANCIERE INTERNATIONALE (cf. complément de cours n°1)

3° ) VERS LA DISPARITION DE L’ETAT-NATION ET LA REMISE EN CAUSE DES POLITIQUES ECONOMIQUES

Constat : Comme l’écrit J.ADDA , dans la mondialisation de l’économie :

· « L’intégration croissante des parties constituant le tout de l’économie mondiale donne à celle-ci une dynamique propre , échappant de plus en plus au contraire des Etats et portant atteinte à certains attributs essentiels de leur souveraineté , tel le contrôle monétaire et la gestion de la finance publique .

· La mobilité des données , des images et des capitaux devenue extrême , grâce à la révolution des communications rend désuète , dans nombre de domaines les notions de frontières ou de territoires » .

· Ainsi ,la multiplication des innovations financières qui ont conduit les salles de marché à assurer une optimisation du rendement à l’échelle mondiale ont rendu les mouvements de fonds privés plus importants que les réserves des Banques Centrales .

Conséquences : Dès lors , les politiques économiques en sont totalement transformées .

· Comme l’écrit R.Boyer : « Les milieux financiers internationaux évaluent et anticipent en permanence les décisions des pouvoirs publics , au point de constituer un contre-pouvoir , apparemment anonyme mais puissant » .

· Ainsi, les autorités publiques auraient pour seule mission aujourd’hui d’opérer une gestion des finances publiques conduisant à un équilibre , afin d’attirer les placements privés , d’appliquer des politiques économiques visant seulement à rendre attractif le territoire national , afin que celui-ci demeure compétitif sur la scène mondiale , et que les firmes transnationales cherchent à y développer leurs investissements directs .l’Etat serait donc moins gros , mais plus efficace .

·

· CONCLUSION :

·

·On assisterait ainsi , selon de nombreux auteurs libéraux , à une mondialisation de l’économie qui signifierait ( selon F.Fukuyama cf chapitre introductif ) la fin de l’histoire et de la géographie , l’économie de marché traduisant l’état naturel de la société universelle , pour le bien-être de tous(7 p 312) . Néanmoins cette vision parait trop idyllique et mérite d’être relativisée .

·


UNE RELATIVISATION DE LA MONDIALISATION

1° ) L’ENTREPRISE GLOBALE , ENTRE MYTHE ET REALITE .

Il est nécessaire de remettre en cause certaines idées préconçues sur les FTN .

a - Les FTN conservent toujours une base nationale ;

une remise en cause du concept de firme mutlinationale : Excepté les FTN issues des petites économies ouvertes, pour lesquelles une division du travail à l’échelle internationale s’impose ( Nestlé Suisse, Electrolux Suède emploient respectivement 96 et 82 % de leurs salariés hors de leur pays d’origine.On ne constate pas réellement d’entreprises véritablement globales :

· les grandes FTN, en particulier américaines, pourtant engagées de longue date dans un processus d’internationalisation, n’ont que très partiellement multinationalisé leur production.

· l’incorporation de dirigeants étrangers dans la haute hiérarchie des entreprises multinationales reste tout à fait exceptionnelle

· la transnationalisation des marchés financiers ne semblent pas avoir entraîné une diversification géographique des sources de financement des FTN. Elles continuent à financer leurs investissements sur les marchés financiers locaux

· bien que la demande se globalise, que quelques produits emblématiques se diffusent dans le monde entier ( coca-cola, Windows,... ), cela ne signifie pas, qu’à terme les modes de vie s’homogénéisent. La majeure partie de la consommation reste conditionnée par des déterminants spécifiques à chaque société. De ce fait, les FTN, en dépit de leurs efforts, ne peuvent transformer en profondeur des comportements inscrits dans l’histoire. Elles doivent donc, plutôt que des biens destinés au marché mondial, répondre à des demandes différenciées selon les pays.

· l’idée de techno globalisme est encore plus profondément démentie. Comme l’écrit R.Boyer : « Non seulement les pays protègent différemment les droits de la propriété intellectuelle, mais encore les grandes firmes continuent à considérer que l’innovation constitue la source de leur compétitivité, et qu’à cet égard, elle ne doit pas être disséminée sur des espaces géographiques qui seraient hors de son contrôle direct ou indirect, via l’Etat de leur nation d’origine. »

·

Conclusion : Ainsi, on peut en conclure avec R.Boyer que « la firme globale relève plus du projet, voire du mythe que de la pratique des grandes FTN. La trajectoire de celle-ci reste marquée par l’histoire longue de leur constitution et de leur évolution sur un espace national particulier. »

b - Les FTN, un bilan contrasté.

Le postulat libéral : Comme l’indique CA Michalet : « dans l’optique de la conception ultra-libérale (... ), l’implantation des FMN doit jouer un rôle d’entraînement automatique sur les structures productives locales. L’investissement étranger joue le même rôle que la création de pôles de croissance. »

Les limites : Mais, en réalité, les effets d’entraînement sur les économies en voie de développement sont relativement réduits, pour 3 raisons essentiellement selon Michalet :

· les entreprises des PVD ne sont généralement pas capables de livrer des produits dont les qualités correspondent aux attentes des FMN.

· elles ne sont pas compétitives, car elles utilisent généralement des technologies dépassées et parce qu’elles sont mal gérées.

· elles n’arrivent pas à produire dans les délais qui sont impartis par la firme.

·

Conséquences : Dès lors :la multinationale préfère internaliser sa production en assurant une décomposition internationale des processus productifs. Comme le conclue Michalet : « l’intérêt des FMN et la préoccupation industrialisante des pays membres ne coïncident donc pas » On comprend alors

· pourquoi, en particulier dans les années 60 et 70, les PVD ont été très méfiants à l’égard des FMN et : « ont opéré une discrimination entre les investissements nationaux et les investissements étrangers.

· Néanmoins, à partir des années 1980, les PVD ont été obligés de changer d’attitude par rapport aux FMN. :

- Comme l’indique B Coriat Et D Taddei : « avec la globalisation l’objectif principal des Etats n’est plus de contrôler les activités des firmes étrangères ; il est de les attirer. »

- En effet, avec l’abandon de la stratégie d’ISI remplacée par la SPE ( voire supra), les PVD ont essayé d’attirer les FMN qui, selon eux, sont à l’origine du succès des NPI ( cette opinion est à relativiser, puisque dans un pays comme la Corée du Sud, l’Etat s’est efforcé de freiner l’implantation des FMN afin de maintenir son indépendance ).

- La concurrence que se livre aujourd’hui les pays pour attirer les multinationales ne signifie pas que ceux-ci se développeront ; par contre, ils considèrent que sans apport du capital étranger, ils ne se développeront pas ; c’est donc une condition nécessaire mais non suffisante.

Conclusion : Comme nous l’avons vu précédemment, la stratégie des FMN n’est pas sans inconvénient pour les pays riches ; les délocalisations qui sont opérés par les FMN conduisent à des résultats ambigus :

· Selon certains, elles ne feraient que reprendre, en l’adaptant au nouveau contexte, la logique ricardienne, chaque pays se spécialisant dans la production pour laquelle il a un avantage comparatif ; les FMN, en s’implantant dans les PVD, détruisent certes des emplois peu qualifiés dans les PDEM, mais vont contribuer à leur développement et donc à fournir des débouchés aux industries de haute technologie des PDEM.

· Pour d’autres au contraire dont Reich, les délocalisations ne font que traduire l’intérêt égoïste des firmes qui ne recoupe pas l’intérêt des nations dont elles sont issues. De même les 3 D n’ont pas eu les effets vertueux qu’ils devaient engendrer.

2° ) LES MECOMPTES DU SFI. (cf. compléments de cours n°2)

3° ) LE TEMPS DES NATIONS N’EST PAS FINI

Constat : Comme le constate R.Boyer : « en dépit de la multiplicité des facteurs de déstabilisation, les espaces nationaux sont loin de s’être fondus dans un nouvel ensemble complètement mondialisé. En effet, paradoxalement, la mise en concurrence des différents capitalises semble avoir stimulé leur différenciation. » Ainsi, on pourrait opposer :

· à une logique anglo-saxonne préférant le court terme,

· un modèle rhénan et japonais misant sur la stimulation de l’innovation productive et la compétitivité de long terme.

Remarque : Il ne faut pas en outre surévaluer l'influence des marchés financiers internationaux sur les politiques économiques. Certes :

· le keynésianisme à l’échelle nationale semble mis à mal, cédant la place à une nouvelle orthodoxie ( une pensée unique ? ) privilégiant stabilité monétaire et compétitivité extérieure.

· Néanmoins, le style des politiques économiques demeure imprégné de fortes spécificités nationales.:

- la nature et l’ampleur des interventions publiques,

- le degré de coopération capital - travail permis par les relations industrielles,

- la qualité de la spécialisation industrielle,

- la politique de formation,

- la mise en place d’infrastructures

- Ces éléments définissent autant de contraintes ou d’opportunités pour la politique économique et façonnent par la même des stratégies nationales fortement contrastées.

Conclusion : Il ne faut pas oublier que :

· si les Etats sont de plus en plus dépendants des marchés financiers internationaux, la contribution des capitaux à court terme ( spéculatif ) au taux d’investissement national demeure faible : on ne finance pas par des capitaux à court terme un ambitieux programme d’investissement, excédant largement les capacités d’épargne nationale, comme l’a montré la crise mexicaine de 94-95.

· L’accès à la finance internationale est tout à la fois une opportunité et un risque, qui n’altèrent pas fondamentalement les conditions du développement : aide toi et le ciel t’aidera. Ainsi, si les pays du sud-est asiatique connaissent des rythmes de croissance très élevés, c’est parce qu’ils ont mené des politiques économiques efficaces, ils épargnent beaucoup, les financements extérieurs ne représentant qu’un complément à un processus de développement largement internalisé ( même si celui-ci semble mis à mal aujourd’hui par la crise qu’ils ont connu en 1998 ).

· Dès lors, il semble irréaliste de laisser les marchés imposer leur loi aux Etats et aujourd’hui de nombreux auteurs préconisent des mesures, visant à limiter les inconvénients générés par les 3 D .

4° ) LES SOLUTIONS PRECONISEES.

D.Plihon écrit :

· « il n’est ni possible ni souhaitable de modifier tous les aspects de la globalisation financière. La mondialisation des échanges mondiaux et financiers est une tendance lourde aux effets globalement positifs.

· Mais, contrairement à ce qu’affirme le credo libéral, le SFI est intrinsèquement instable. Il ne peut s’autoréguler, d’où la nécessité d’une régulation publique supranationale qui redonnerait une certaine efficacité aux politiques de stabilisation. Selon l’image de J. Tobin , il faut « mettre des grains de sables dans les rouages » trop bien huilés du SFI. En clair, introduire des limites à la libre circulation des capitaux.

Les solutions : Deux types de solutions ont été envisagés :

· Reréglementer ou taxer les opérations financières pour en réduire leur rentabilité et décourager ainsi les transactions purement spéculatives( 30 p 327). La communauté financière internationale qui vient de se livrer à une surenchère à la baisse de la fiscalité financière n’est certainement pas prête à accepter le principe de la taxation (cf.la difficulté à faire accepter le principe de la taxe Tobin)

· en revanche, il apparaît possible d’atteindre un résultat voisin en instaurant de nouvelles règles prudentielles pour limiter les risques pris par les opérateurs à la recherche des plus-values. Mais prendra-t-on de telles mesures sans attendre que surviennent de nouvelles crises sur les marchés financiers et sur le marché des changes, crises toujours coûteuses pour l’activité et donc pour l’emploi. »

· Une autre possibilité envisageable si les pays n’arrivent pas à s’attendre au niveau international est de développer des règles au niveau régional, c’est en particulier la stratégie développée par l’Europe quand elle a décidé de mettre en place le SME

·

II – VERS UNE REGIONALISATION DES ECHANGES (1 à 8 p 243-245) ?

INTRODUCTION : TYPOLOGIE DES ACCORDS REGIONAUX.

Suite à B Balassa , on distingue généralement cinq étapes dans le processus d’intégration régionale :

1 – LA ZONE DE LIBRE ECHANGE

Intérêt de l’accord : son objectif principal est d’éliminer les barrières douanières et les restrictions quantitatives existant entre les pays membres de l’accord. Par contre ,chaque pays peut soumettre les importations en provenance de l’extérieur de la zone à son propre tarif extérieur.

Exemple typique : l’Association Latino-Américaine de Libre Echange.

Les limites : Mais l’intérêt de ce type d’accord est limité , comme l’a montré l’échec de l’AELE ( Association Européenne de Libre Echange) car la coopération et l’intégration des différents pays sont minimales. On ne peut alors parler véritablement de régionalisation des échanges .

2- L’UNION DOUANIERE

Intérêt : elle correspond à une régionalisation plus poussée que la zone de libre échange . En effet les partenaires adoptent une politique commerciale marquée par l’instauration d’un tarif extérieur commun .

Exemple historique type : le Zollverein qui a été un des outils assurant la construction de l’empire allemand au XIX° siècle.

3 - Le marché commun

Intérêt : il ne se contente pas d’établir un tarif extérieur commun , il élimine toutes les entraves aux mouvements de facteurs de production(libre circulation du travail et du capital) à l’intérieur de l’union assurant ainsi la libre circulation du capital et du travail .

Les limites : Quand la libre circulation des facteurs est mise en œuvre la concurrence entre les pays est renforcé ce qui nécessite une coordination des politiques économiques afin d’éviter une stratégie du type passager clandestin (ex : nécessité d’harmoniser les politiques fiscales)

4 – L’UNION ECONOMIQUE

Intérêt : elle pousse plus loin la recherche de l’intégration puisqu’elle vise à harmoniser les politiques économiques des pays membres.

Limites : la coordination des politiques économiques se heurte à la nécessité d’une coordination des politiques monétaires afin de limiter les risques de change et de concurrence déloyale (ex une dévaluation compétitive)

5 -L’UNION ECONOMIQUE ET MONETAIRE

Elle constitue la phase ultime de l’intégration puisqu’elle crée une monnaie commune gérée par une banque centrale commune (ex la BCE) ; les Etats abandonnent ainsi un des principaux éléments de leur souveraineté : le droit de battre monnaie .

Conclusion : Deux conceptions s’opposent traditionnellement face à la régionalisation des échanges :

· la régionalisation est une solution non optimale puisqu’elle contribue à un détournement de trafic

· la régionalisation est une étape qui contribue au développement du libre-échange

·

A ) REGIONALISATION ET MONDIALISATION SONT-ILS COMPATIBLES ?

1 – LA REGIONALISATION , UNE SOLUTION NON OPTIMALE

Postulat libéral : Dans la conception libérale de l’échange international , les accords régionaux ( libre-échange , union douanière ou marché commun ) sont considérés comme sous-optimal . En effet :

- ils sont considérés comme représentant une entrave à la libre circulation des biens et des capitaux

- ils représentent donc un détournement des échanges qui nuit donc non seulement aux partenaires mais au reste du monde

Présentation de la théorie de J Viner :. C’est ce qu’a essayé de démontrer J.Viner qui distingue 2 cas selon que l’effet de création de commerce relatif à l’intensification des échanges à l’intérieur de la zone est plus fort ( moins ) que l’effet de diversion liée au fait que la zone diminuera ses importations en provenance des pays tiers :

· les échanges entre les membres du bloc s’ajoutent aux échanges que les membres du bloc entretenaient avec le reste du monde . Dans ce cas , l’accord a contribué à accroître l’efficacité économique et le bien-être des différents pays .

· mais le cas le plus fréquent selon Viner est celui dans lequel les échanges régionaux ne constituent pas une création mais un détournement au détriment des pays extérieurs à la zone régionale . C’est l’exemple constitué par la PAC qui conduit les pays membres à échanger des biens à un tarif plus élevé que celui existant sur le marché mondial , ce qui conduit à la perpétuation de productions non rentables , qui devraient être éliminées , ce qui nuit à l’efficacité économique .

·

· 2 - DES ACCORDS REGIONAUX FAVORABLES AU LIBRE-ECHANGE

Critique de la thèse de Viner : Comme l’indique P.Krugman , les accords de libre-échange ne constituent pas véritablement un détournement des échanges . Ceci pour 2 raisons :

· les zones régionales épousent les frontières de zones d’échange naturel( ex : EEE ou ALENA , ...)

· avant même la constitution de la zone , les pays entretenaient des relations commerciales très étroites et cela d’autant plus que leur niveau de développement était proche ( théorie de Linder et deB Lassudrie-Duchêne ) .

Conclusion : Dès lors , on peut :

· certes considérer que le régionalisme nuit au multilatéralisme ( GATT et OMC ) ,

· mais en réalité , on constate que contrairement aux prévisions les plus optimistes , on n’observe pas réellement une mondialisation des échanges , mais au contraire une régionalisation accrue dans le cas de la triade ( ALENA ( dominé par les EU : 5 p 340 ) , EEE ( dominé par l’Allemagne ) , Espace asiatique ( dominé par le Japon ) .

· Cette régionalisation peut alors être considérée comme un moindre mal , en particulier car elle a permis d’éviter le repli des économies par un recours au protectionnisme , comme cela avait été le cas dans les années 30 , d’autant plus que comme l’indique E.Combe : « au cours des années 80 , le commerce le plus dynamique en terme de taux de croissance est celui entre la CEE et l’Asie du Sud-Est , l’Amérique du Nord et l’Asie du Sud-Est » . On constate donc une augmentation des échanges inter-zones .

·

CONCLUSION

Comme l’indique G Lafay :

· « à l’échelle mondiale , la poursuite de l’objectif d’un libre-échange intégral est illusoire .

· Au lieu de se rapprocher de l’objectif recherché , cette stratégie s’en éloigne , car elle ne fait qu’alimenter le protectionnisme .

· Dans un monde où les mutations technologiques remettent en cause la permanence des avantages comparatifs ( il faut faire une étude en terme d’avantages comparatifs dynamiques ) le commerce international ne peut se développer que s’il apporte des gains évidents en terme d’emplois et de structures productives .

· Le libre-échange ne peut donc s’appliquer complètement qu’entre pays proches qui jouent la même règle du jeu .

· C’est pourquoi les préférences régionales doivent être reconnues comme le moyen le plus efficace d’établir un libre échange acceptable ( ... ) .

· Désormais , chacun des trois pôles s’efforce de se renforcer et de créer un espace économique avec les pays qui sont dans sa mouvance .

· La dose de libre-échange doit donc varier en fonction de la proximité des économies nationales : dose complète à l’intérieur du pôle considéré , forte avec les pays voisins dont il a intérêt à favoriser l’insertion internationale , plus modérée avec le reste du monde . »

·

·Pour aller plus loin : les accords commerciaux régionaux 10-ACR.ppt sur le site de web campus

B – INTEGRATION ET CROISSANCE : LE CAS DE L’UNION EUROPEENNE

1 – LES ETAPES DE LA CONSTRUCTION EUROPEENNE ( cf cours d’histoire-géographie et doc 2 et 4 p 338-340)

2 – LA CONSTRUCTION EUROPEENNE , UNE CHANCE POUR L’EUROPE

a – LES CREATIONS DE TRAFIC L’ONT EMPORTE SUR LES DETOURNEMENTS

Constat : On observe :

· certes entre 1948 et 1998 un développement très important de la part des échanges intrarégionaux en Europe de l’Ouest qui passent de 41,8 % à 70,1 % du commerce extérieur européen .

· Il n’en reste pas moins , selon F.Teulon que : « les études empiriques qui portent sur la CEE tendent à démontrer que les créations de trafic ont été largement supérieures aux détournements , et ceci , dès que l’union douanière entre les 6 pays fondateurs a commencé à produire ses effets » .

Conclusion : Ceci permet de relativiser la conception pessimiste développée par Viner au milieu des années 50 .

b -VERS UNE CONVERGENCE DES PAYS EUROPEENS

les apports : L’intégration européenne a contribué :

· non seulement à multiplier les échanges commerciaux intra-européens ,

· mais elle va aussi répondre au principal défi qui lui était posé : faire converger vers un même modèle des pays ayant à l’origine des niveaux de développement relativement importants .

Conclusion :Ainsi , les écarts de niveau de vie entre les pays du Sud ( Grèce , Espagne , Portugal ) et les pays les plus riches ( Allemagne , France , Benelux ) ont tendance à se réduire .

c – LE GRAND MARCHE EUROPEEN A CONTRIBUE A AMELIORER LA COMPETITIVITE ET LA SPECIALISATION DES ECONOMIES EUROPEENNES

les explications : L’intégration européenne a contribué fortement à accroître la compétitivité européenne par le jeu de 2 mécanismes complémentaires :

· les économies d’échelle et les effets d’apprentissage :

- les économies d’échelles : sachant que , une multiplication par 2 du volume de la production assure une réduction de 30 % des coûts unitaires de production dans les secteurs pour lesquels les coûts fixes d’entrée sont élevés ( micro-informatique ) , on comprend tout l’intérêt de l’union européenne qui en assurant la libre circulation des marchandises et des capitaux a contribué à élever la taille du marché et donc à rentabiliser , par les économies d’échelle ( cf cours de première sur le marché ) des productions qui , sans cela , n’auraient pu être mises en œuvre ( ex : l’aéronautique avec AIRBUS ).

- Les effets d’expérience et d’apprentissage , c’est-à-dire la réduction des coûts unitaires de production quand la production augmente , sont d’autant plus élevés que la taille du marché augmente . Le secteur des télécommunications , dans lequel l’Europe occupe une place de premier plan , fournit , selon D.Schlachter : « un excellent paradigme d’amélioration continuelle des performances des hommes et de perfectionnement de modes d’organisation » .

· une intensification de la concurrence : certaines entreprises , particulièrement en France où avait été développé le concept de champion national , lors de l’époque gaulliste , occupaient une position dominante , voire de monopole qui ne constituait pas une incitation à l’innovation , à l’amélioration de la qualité des produits et à une baisse des prix ( cf Schumpeter ) . Au contraire , depuis l’ouverture des marchés , on constate une intensification de la concurrence qui oblige les entreprises , pour rester compétitive , soit à diminuer leur prix de vente et à mieux satisfaire leurs clients , soit à disparaître

d – vers de nouvelles spécialisations

Constat :On observe , certes , une intensification de la concurrence qui s’est effectuée fréquemment par l’intermédiaire de la différenciation des produits

Explications : Ceci nous conduit à distinguer 2 formes d’échanges intra-branches s’étant développés en Europe :

· un échange de variétés , c’est-à-dire un échange de produits similaires à des prix voisins , reposant sur des différences marginales entre les biens ( image de marque , design , … ) ( cf la demande de différence de B.Lassudrie-Duchêne ) . Ce type de commerce s’est surtout développé entre les pays européens ayant un fort niveau de développement ( ex : Allemagne , France ) .

· un échange de qualité : on observe , au contraire , entre les pays européens ayant des niveaux de développement différents , à un échange reposant sur des produits certes comparables , mais de qualité et donc de prix différents , en fonction de la qualité inégale des facteurs de production .

Conclusion : Cette division du travail opérée au sein de la communauté présente , selon de nombreux auteurs , de nombreux avantages , puisqu’elle accroît la diversité des produits offerts aux consommateurs , mais elle n’est pas sans dangers puisqu’elle peut contribuer à spécialiser les pays en retard dans des productions à faible qualité .

CONCLUSION : UN BILAN GLOBALEMENT POSITIF

Comme l’indique la communauté européenne , la non-Europe , c’est-à-dire l’absence de construction européenne , aurait un coût important qui irait de 3 à 7 % du PIB de la communauté . En effet :

· l’élimination des barrières aux échanges améliorerait le PIB de 2,5 % ,

· les baisses de coût dues à une meilleure exploitation des économies d’échelle contribueraient à hauteur de 2 % ,

· et enfin la pression de la concurrence exerce une baisse des prix contribuant à hauteur de 1,6 %

Conclusion : La Commission européenne en conclut : « le marché unique a rendu l’union européenne plus attractive : celle-ci absorbait 44 % des flux d’investissements directs étrangers en provenance du monde au début des années 90 , contre seulement 28 % au milieu des années 80 .

SECTION IV : L’INTEGRATION A LA MONDIALISATION : SOLUTION AU SOUS DEVELOPPEMENT ?( 1 à 10 p 245-249)

I ) L’ORTHODOXIE DU DEVELOPPEMENT .

A) LE ROLE CENTRAL DE L’INVESTISSEMENT .

l’analyse libérale du développement : Un rapport de l’ONU explicite parfaitement quel rôle les théoriciens libéraux accordent à l’investissement :

· « l’accumulation du capital peut être considérée comme un processus central , par lequel tous les autres aspects du développement deviennent possibles » .

· Une forte augmentation du taux de l’investissement est ainsi considérée comme une condition impérative pour que les PVD puissent décoller et engager un processus de croissance ( selon Rostow , le taux doit passer de 5 à 10 % ) .

· Les théoriciens du big push , en particulier Rosenstein-Rodan, considèrent que la brusque élévation de l’investissement engendrera un cercle vertueux :

·

hausse de l’investissement ® augmentation de l’efficacité des entreprises ® gains de productivité® hausse du revenu ® hausse de l’épargne ® hausse de l’investissement

Constat :L’effort d’investissement réclamé dans les premières phases du processus est plus prononcé que dans les suivantes . Il existe un seuil minimal d’investissement en déca duquel les espoirs de démarrage sont illusoires .Selon C. Albagli , le taux d’investissement nécessaire pour connaître un rythme de croissance annuel de 2 % est au minimum de 21 %.

Problèmes : Mais on retrouve alors la théorie de Nurske ( les cercles vicieux ) qui pose le problème du financement de ces investissements . Comment le pays peut-il par ses propres capacités générer une épargne suffisante pour assurer le décollage ?

D’autant plus que l’on sait , que :

· dans les sociétés agraires , l’épargne est faible et dépensée ostentatoirement ,

· que le travail n’occupe pas une place centrale ( la valeur relative du travail , dans le système de valeurs , n’incite guère à dégager une épargne motivée par l’investissement productif ).

Solutions : 2 courants s’opposent alors pour trouver les fonds finançant les taux d’investissement :

· selon certains auteurs , une révolution agricole devrait permettre d’assurer un financement interne . Ils reprennent l’exemple anglais , selon lequel celle-ci est un préalable au décollage économique .

· d’autres auteurs rétorquent que le pays étant pauvre , il ne peut assurer un taux d’épargne suffisamment élevé et donc , il doit , au préalable , compter sur l’apport de capitaux extérieurs .

·

· B ) LES PROGRES AGRICOLES SOURCE DE FINANCEMENT DE L’INVESTISSEMENT

Les PVD se caractérisent par le poids très important de la population travaillant dans l’agriculture . Il est donc bien évident qu’un processus de croissance et de développement ne peut être engagé s’il laisse de côté la majeure partie de la population . P.Bairoch écrit ainsi : « il est impossible de concevoir un développement économique rapide sans une industrialisation accélérée , mais celle-ci n’est possible que grâce à la progression rapide de la demande intérieure dans laquelle la demande rurale joue un rôle

prépondérant . »

cette conception peut être actualisée en tenant compte des éléments suivants :

· l’accroissement de la production agricole permet de développer les exportations qui accroissent les entrées de devises nécessaires pour importer les technologies en provenance des PDEM . On comprend mieux pourquoi les pays qui , suivant le modèle soviétique , ont sacrifié l’agriculture au bénéfice de l’industrie , en appliquant un schéma de croissance déséquilibrée

·( l’augmentation des taux d’investissement dans le secteur des biens d’équipement est financée par la confiscation des recettes issues de l’agriculture ) n’ont pas pu engager un véritable processus de croissance .

· l’augmentation très rapide de la population ( cf chap croissance démographique et développement ) rend d’autant plus impérieuse la modernisation de l’agriculture , permettant de dégager des surplus ( cf révolution verte ) .

Problèmes : Néanmoins , considérant le niveau élevé des investissements nécessaires pour engager le décollage économique , de nombreux auteurs considèrent que les capacités internes du pays à dégager un surplus et une épargne ne sont pas suffisantes .

Solutions : Il faut alors faire appel aux capitaux extérieurs , qui peuvent prendre 2 formes :

· une aide , réalisée sous formes de dons ou de prêts réalisés à faible taux d’intérêt .

· un endettement extérieur .

·

C )L’APPEL AU FINANCEMENT EXTERIEUR

1°) L’AIDE EXTERIEURE

a – DEFINITION DE L’AIDE

Constat : Paradoxalement , « l’aide au développement apportée par les pays industrialisés à ceux qui ne le sont pas , est une idée relativement neuve . :

· Jusqu’à la seconde guerre mondiale , la doctrine des puissances coloniales est que les colonies doivent se suffire à elles-mêmes sans subsides de la métropole . »

· Par contre , après 1945 , un accord se fait sur une idée simple : les économies sous-développées ne disposant que de faibles revenus , la production augmentant avec la capacité de production il fallait investir et l’aide des PDEM s’avère alors absolument nécessaire comme l’écrit H.B.Chènery: « l’assistance de l’étranger favorise le développement » .

L’aide publique peut prendre diverses formes :

· On distingue l’aide bilatérale versée directement de pays à pays de l’aide multilatérale qui passe par les organisations internationales comme la Banque mondiale ou le FED (fonds européen de développement)

· L’aide peut être liée ( sujette à être dépensée dans le pays donateur ) ou libre (cas beaucoup moins fréquent)

· elle peut être spécifique ( destinée à un projet précis ) ou générale

· en nature (ex apport de technologie ou de produits agricoles (en cas de famine) ou financière .

Constat : L’effort des pays riches est très variable :

L’aide publique au développement a, pour la première fois, dépassé la barre des 100 milliards de dollars en 2005 (81,7 milliards d'euros), pour s'établir à 106,5 milliards de dollars, selon les chiffres publiés, mardi 4 avril, par l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).

Ce record est en partie dû à l'allégement de la dette de l'Irak et du Nigeria (19 milliards de dollars) et à l'aide versée aux victimes du tsunami en Asie du Sud-Est (2,2 milliards de dollars).

Parmi les pays riches, les Etats-Unis se sont montrés les plus généreux, avec 27,5 milliards de dollars distribués, une hausse de 35,6 % en termes réels. "Abstraction faite de l'allégement de la dette de l'Irak, cette augmentation s'explique principalement par l'aide à la reconstruction consentie à l'Irak (3,5 milliards de dollars), l'aide à la reconstruction et aux programmes de lutte contre les drogues accordée à l'Afghanistan (1,5 milliard de dollars) et l'aide à l'Afrique subsaharienne", détaille l'OCDE.

Le Japon est ainsi le deuxième donateur (13,1 milliards de dollars). Il devance le Royaume-Uni (10,8 milliards de dollars) et la France (10,1 milliards). Viennent ensuite l'Allemagne (9,9 milliards), les Pays-Bas (5,1 milliards) et l'Italie (5,05 milliards).

Ce classement de la générosité des pays riches est différent si l'on prend en compte un autre critère, celui du pourcentage que représentent les dons par rapport au produit intérieur brut (PIB).

LA NORVÈGE, LA PLUS PRODIGUE

Les pays scandinaves sont des modèles en la matière. La Norvège est la plus prodigue, avec un ratio aide/PIB de 0,93 %, devant la Suède (0,92 %), le Luxembourg (0,87 %), les Pays-Bas (0,82 %) et le Danemark (0,81 %). La France est au neuvième rang (0,47 %), derrière le Royaume-Uni (0,48 %), mais devant la Suisse (0,44 %) et l'Allemagne (0,35 %).

"L'aide publique au développement globale des quinze pays européens a augmenté de 27,9 % en termes réels, s'établissant à 55,7 milliards de dollars, équivalant à 0,44 % du PIB cumulé", note l'OCDE, qui rappelle que ces pays se sont engagés, en 2002, à respecter un objectif minimal de 0,33 %.

"L'Espagne, la Grèce, l'Italie et le Portugal doivent augmenter leur aide s'ils veulent atteindre cet objectif", observe l'Organisation. L'Italie a un ratio de 0,29 %, ce qui la place devant le Japon (0,28 %) et les Etats-Unis. Avec 0,22 % en 2005, ces derniers n'ont jamais été aussi généreux depuis 1986.

Source : P Delhommais, , p^lus de 100 milliards de dollars pour les pays pauvres in Le Monde, 05-04-06.

b – LES EFFETS DE L’AIDE

Un espoir : Dans les années 60 , des organisations comme le FED ou la Banque Mondiale pensaient que l’aide allait quasi automatiquement assurer un décollage économique .

Une déception : Mais , comme l’indique J.J.Giri : « manifestement l’aide n’a engendré en Afrique , ni décollage , ni développement autoentretenu. Dans certains cas , elle n’a même jamais engendré aucun développement du tout , et certains pays d’Afrique se retrouvent plus pauvres , dans les années 80 que dans les années 60 » .

Conséquences : Ceci a conduit certains auteurs à affirmer que l’aide ne sert à rien et peut même engendrer des effets pervers ( doc 6 p 89 ) :

· Pour S.Brunel , l’aide ne sert pas à accroître la capacité productive du pays ; elle est utilisée

- soit pour construire des ouvrages de prestige sans but économique ( le Transgabonais ) , soit à acheter des usines clés en main trop élaborées qui ne peuvent s’adapter aux conditions du pays .

- la maintenance est alors très difficile à assurer , car la main-d’œuvre est insuffisamment qualifiée ,la capacité de production est très largement supérieure aux capacités d’absorption du marché .

- Ainsi la production qui subit la concurrence des produits des pays riches est de mauvaise qualité , à un prix plus élevé ( déseconomies d’échelles , en raison du faible taux d’utilisation des capacités de production ) .

- Les usines sont donc à terme condamnées : l’aide ne s’est donc pas traduite par une création de richesses supplémentaires .

· l’aide n’a pas transformé en profondeur les mentalités , elle a seulement servi à greffer artificiellement une façade moderne sur une société demeurée traditionnelle ; elle a donc , par là , contribuer au dualisme , opposant la majeure partie de la population perpétuant ses méthodes ancestrales à une minorité qui survit grâce à une injection continue de fonds en provenance des PDEM

· les auteurs libéraux sont les plus critiques : ils considèrent , reprenant les thèses de Ricardo et de Malthus ( cf chap croissance démographique et développement ) que l’aide maintient les assistés dans la pauvreté en désincitant au travail et à l’épargne ( les dons de produits agricoles concurrencent la production nationale et ruinent les petits producteurs ). Comme l’écrit Bauer : « à la vérité , aider les responsables politiques sur la base de la pauvreté de la population a plus de chances d’encourager les politiques d’appauvrissement que d’y faire obstacle » (d’autant plus que les sociétés n’étant pas démocratiques , l’aide est détournée par des dirigeants corrompus).

· les auteurs marxistes , quant à eux , pensent que l’aide n’est qu’un moyen de maintenir la domination impérialiste dans le tiers-monde. L’étude des donateurs montre que ceux-ci orientent et concentrent leur aide sur les pays qu’ils veulent influencer ( la France aide surtout ses anciennes colonies).

Relativisation : Pourtant , comme l’écrit J.Brasseul: « ces critiques en forme de brillants paradoxes peuvent bien contenir une part de vérité , mais elles oublient que l’aide a quand même des effets positifs , et surtout qu’en son absence , de nombreux pays ne pourraient simplement plus fonctionner » .

Conclusion : Ce n’est donc pas le principe de l’aide qui ne doit pas être remis en cause , mais les arrière-pensées qui en sont à l’origine de la part des PDEM et la façon dont elle est utilisée par les PVD :

· Si l’aide sert à financer des projets clairement définis et dont la rentabilité ou l’utilité est clairement démontrée ( construction d’infrastructures , éducation de la population ) elle s’avérera favorable .

· D’autant plus que son versement peut être soumis à conditions : le PDEM peut ainsi inciter le PVD à assurer un passage à un régime démocratique ou à appliquer des réformes économiques

2°) LE RECOURS A L’ENDETTEMENT EXTERIEUR

a ) LE DEVELOPPEMENT PAR L’ENDETTEMENT

Constat : on peut établir la périodisation suivante :

· Jusqu’au début des années 70 , la principale source de financement extérieur des PVD est l’aide publique versée par les Etats ou les organisations internationales .

· Mais des déterminants conjoncturels vont amener un tarissement de l’aide publique et un développement du financement par l’endettement . En effet , les chocs pétroliers de 73 et de 79 vont :

- être à l’origine d’une réduction de la croissance des PDEM , d’une explosion de leurs déficits commercial et public qui vont conduire leurs dirigeants à réduire leur effort d’aide aux PVD

- or , dans le même temps , les pays exportateurs de pétrole bénéficient , à la suite du quadruplement de son prix , d’une forte augmentation de leurs recettes qu’ils ne peuvent absorber et qu’ils vont donc placer , contre rémunération , dans les banques des PDEM .On assistera alors au développement des pétrodollars qui succéderont aux eurodollars résultant de la crise du Système Monétaire International .

Analyse libérale du financement du développement : Ces raisons conjoncturelles vont bénéficier du renouveau des théories libérales durant les années 70 - 80 . En effet , pour la théorie économique classique : l’endettement est un phénomène normal pour les PVD : on peut , en fonction du stade de développement auquel se situe le pays caractériser son besoin de financement ( son degré d’endettement ) ou sa capacité de financement :

· première phase : emprunteur jeune :

- les PVD , pour connaître une croissance économique doivent importer des biens d’équipement alors que leurs capacités d’exportation sont réduites . Leur Balance Commerciale est donc déficitaire .

- Pour financer ce déficit , ils ne peuvent faire appel à l’épargne intérieure ( cf Nurske ) , ils doivent s’endetter .

- Un pays se situant au stade de l’emprunteur jeune se caractérise donc par une Balance Commerciale déficitaire et une Balance des Capitaux et des Paiements excédentaires .

· deuxième phase : emprunteur évolué :

- grâce à l’endettement et aux importations de biens d’équipement , le pays peut assurer un décollage économique , lui permettant de développer ses capacités de production , donc de réduire ses importations et d’accroître ses exportations de biens .

- A ce stade , sa Balance Commerciale devient donc excédentaire , ce qui lui permet de rembourser ses dettes , sa Balance des capitaux et des Paiements devient donc déficitaire .

· troisième phase : prêteur jeune :

- le pays développe ses exportations , connaît une croissance économique forte ,

- sa Balance Commerciale voit donc son excédent augmenter , le pays peut donc désormais prêter des capitaux , sa Balance des Capitaux et des Paiements continue à être déficitaire , mais pour des raisons différentes ( prêts et non plus remboursement d’emprunts ).

· quatrième phase : prêteur évolué :

- le pays est désormais un PDEM : sa Balance Commerciale devient , à terme , déficitaire .

- Mais grâce aux entrées de devises issues de ses placements à l’étranger , le pays connaît un excédent de sa Balance des Capitaux et des Paiements .

Constat : Ce découpage correspond au modèle américain :

- emprunteur jeune au XIX° ,

- emprunteur évolué fin XIX ° début XX° ,

- prêteur jeune de 1918 à 1950 ,

- prêteur évolué jusqu’en 1971 .

- A partir de cette date , les EU connaissent à la fois un déficit de leur Balance Commerciale et un excédent de leur Balance des capitaux , puisqu’ils font appel aux capitaux étrangers : la boucle semble bouclée .

Conclusion : La vision libérale montre donc bien que l’endettement est source de développement économique , et donc , que contrairement à l’adage populaire , l’endettement n’est pas mauvais en soi pourvu qu’il contribue à créer des richesses : le taux de croissance de l’économie ( qui détermine sa capacité de remboursement ) doit être supérieure au taux d’intérêt réel ( qui détermine le prélèvement opéré sur l’économie ) .

Relativisation : Mais cette vision très optimiste montrera ses limites , quand elle sera confrontée à la réalité . Elle conduira , au début des années 80 , de nombreux PVD à se déclarer en cessation de paiements .

3°) LA CRISE DE L’ENDETTEMENT .

a ) LES CAUSES CONJONCTURELLES .

Principe de base : Comme nous l’avons vu plus haut , l’endettement est viable tant que les richesses créées sont supérieures aux montants à rembourser (c’est-à-dire si le taux de croissance économique est supérieur au taux d’intérêt réel ) .

Constat : On peut opérer la périodisation suivante :

· Or , si dans les années 70 , les taux d’intérêt réels étaient faibles voire négatifs et la croissance espérée par les PVD forte ;

· un retournement de conjoncture s’opéra dans les années 80 : les taux d’intérêt réels ( taux d’intérêt réel = taux d’intérêt nominal - taux d’inflation ) augmentèrent , les taux de croissance chutèrent . Plusieurs déterminants se cumulèrent pour plonger les PVD dans la crise :

- à partir des années 80 , les EU suivis par l’ensemble des PDEM décidèrent de lutter contre l’inflation ; ils mirent alors en oeuvre des politiques de restriction monétaire inspirées des préceptes monétaristes . L’offre de monnaie fut réduite par les autorités , ce qui entraîna une hausse des taux d’intérêt nominaux ; simultanément ,l’inflation baissa , ce qui détermina une forte hausse des taux d’intérêt réels .

- or , la dette , dans la majorité des cas ,était rémunérée à taux variable ou flottant ( 70 % de la dette était contractée à taux flottants et 80 % libellée en dollars) . Les banques limitaient ainsi , en théorie , le risque qu’elles couraient en prêtant à long terme des capitaux qui étaient placés à court terme par les pays de l’OPEP .La hausse des taux d’intérêt réels s’appliqua donc aux dettes émises durant les années 70 , période durant laquelle on n’anticipait pas de remontée des taux d’intérêt .Les PVD furent donc incapables de supporter la charge de la dette venant à échéance .

- D’autant plus que les politiques de rigueur appliquées dans les PDEM , contrairement aux attentes des économistes libéraux plongèrent les pays industrialisés dans la récession : leurs capacités d’importation diminuèrent , et par là même , les exportations des PVD .

Conclusion : Cet effet de ciseaux ( de nature conjoncturelle ) a révélé les choix souvent irrationnels des investissements opérés par les PVD dans une période d’euphorie et acceptés par les banques prêteuses ( qui sont donc en partie responsables ). Ces erreurs qui étaient sans conséquence dans les années 70 eurent , dans les années 80 , des conséquences dramatiques .

b ) LES CAUSES STRUCTURELLES .

Constat : Contrairement aux prévisions des théoriciens qui attendaient de l’augmentation des taux d’investissement et d’endettement une hausse quasi automatique de la croissance , on a pu constater qu’entre 1973 et 1982 l’élévation des taux d’endettement ne s’est pas traduite par une hausse comparable ni des taux d’investissement , ni des taux de croissance.

Explications : Ceci s’explique par les raisons suivantes :

· la dette a servi à financer le déficit commercial ; pour les PVD ce déficit ne provient pas essentiellement de l’achat de biens d’équipement mais résulte de l’évolution des relations commerciales et financières . La moitié de l’augmentation de la dette provient de l’accroissement du prix du pétrole , un quart de la détérioration des termes de l’échange .

· la plus grande partie de la dette n’est pas placée dans le pays mais détournée par les dirigeants pour être placée sur des comptes bancaires privés , notamment aux Etats Unis car la rémunération y est plus forte .Ainsi la population va devoir contribuer au remboursement d’une dette,, accepter des plans d’ajustement structurel alors que les emprunts ont été confisqués par les élites dirigeantes . Ainsi , au Venezuela , entre 72 et 82 , la fuite des capitaux a représenté 136,6 % des importations brutes de capitaux .

·

Conclusion : Donc , la dette n’a pas servi à créer des richesses supplémentaires (contrairement aux prévisions) . Tant que les taux d’intérêt réels étaient faibles , les problèmes étaient masqués . Avec la hausse des taux , les difficultés , les erreurs et les détournements de fonds apparaissent .

4° ) LES SOLUTIONS A LA CRISE : l’AJUSTEMENT STRUCTUREL PRECONISE PAR LE FMI .

Constat : Comme l’indique H.Bourguinat, les PVD dans un contexte d’unification de la finance mondiale ont

· dans , un premier temps , cru : « constituer un groupe d’emprunteurs susceptibles de trouver sur ce marché financier international tous les crédits consortiaux dont ils pouvaient avoir besoin . »

· Mais , à partir du mois d’Aout 82 , « ils ont dû très vite subir la loi du groupe des pays créanciers et accepter de passer sous les fourches caudines des programmes de rééchelonnement » . En effet , même si les responsabilités de la crise auraient dû être également partagées entre :

- les PVD qui ont gaspillé les crédits ,

- les banques qui ont accordé des prêts sans respecter les règles prudentielles ( ratio de solvabilité ) ,

- les PDEM qui ont fermé leurs frontières aux produits des PVD et les ont donc empêché de rembourser leurs dettes ;

- Les organisations internationales (FMI,Banque Mondiale) qui ont mal conseillé les PVD.

Explications : On peut constater que l’ajustement a été supporté quasiment uniquement par les pays emprunteurs ( doc 8 p 290 ) . En effet :le F.M.I. ( Fonds Monétaire International ) a considéré que la responsabilité de la crise s’expliquait par l’échec des stratégies de développement ( particulièrement les stratégies autocentrées )

Répercussions : « les prêts conditionnels du FMI vont alors généralement de pair avec une action de stabilisation destinée à corriger les déséquilibres macro-économiques » .

· Les pays doivent donc appliquer des politiques visant à assainir l’économie , ils doivent dévaluer leur monnaie , appliquer des politiques de rigueur désinflationnistes ( en diminuant la masse monétaire en circulation ) , diminuer les déficits budgétaires par la baisse des dépenses publiques , les privatisations et l’augmentation de la fiscalité , diminuer les salaires afin d’améliorer la compétitivité des entreprises . « Le FMI subordonne le versement de ses crédits à l’application , avec succès , de ces mesures » .

· Ces programmes d’ajustement ont des visées conjoncturelles , mais surtout structurelles : ils « peuvent apparaître comme une première étape essentielle du remodelage d’une économie , vers un état d’ouverture » .

Conclusion : On ne peut contester la nécessité de ces plans d’ajustement , il n’en demeure pas moins qu’ils traduisent une nette orientation idéologique : le Tiers-mondisme marxisant des années 70 s’est vu remplacer par un ultra-libéralisme conquérant dans les années 80 - 90 . Or :

· on a pu qualifier les années 80 d’années perdues pour le développement : « les programmes préconisés par le Fonds se sont vus ainsi accuser d’être néfastes à la croissance et au développement , de toujours recourir à une cure d’austérité , d’accroître la pauvreté » . On a assisté à une véritable mise sous tutelle des pays à monnaie faible qui « n’ont guère le choix , sans le sceau d’approbation de la Banque Mondiale et du FMI , ils ne trouveront ailleurs aucun financement , ni public , ni privé » .

· On en est ainsi arrivé , au début des années 90 , à la situation paradoxale suivante : on observe un transfert net des ressources des PVD vers les pays riches : les PVD financent les pays riches , en particulier les EU : « alors que tout semble indiquer que le capital devrait aller des pays industrialisés à Balance courante excédentaire vers les pays à haut taux de rendement de l’investissement , mais à ressources d’épargne domestique faibles , c’est le schéma inverse qui paraît devoir prévaloir » .

·

· D ) LES FTN : UNE SOLUTION ALTERNATIVE A L’ENDETTEMENT

Constat : on peut opposer deux périodes :

· Dans les années 60-70 , les PVD étaient dans l’ensemble méfiants vis-à-vis des FTN . Ils avaient donc :

- mis en place des législations spécifiques dont la finalité : « était dominée par la sauvegarde de l’indépendance nationale face aux empiétements des investisseurs étrangers » .

- Un certain nombre de pays ont même été jusqu’à appliquer des politiques de nationalisation des filiales des FTN .

· Mais , « les années 80 ont été marquées par un mouvement général de révision des codes d’investissement dans les pays du Sud ( ... ) . Avec la globalisation , l’objectif principal des Etats n’est plus de contrôler les activités des firmes étrangères , il est d’abord de les attirer » .

Les explications : Ceci s’explique par un certain nombre de raisons d’ordre à la fois conjoncturelle et structurelle :

· les raisons conjoncturelles sont dominées par les retombées de la crise de l’endettement :

- suite aux difficultés des années 80 , les banques privées sont devenues très réticentes à développer le financement des PVD . Elles ont même cherché à se débarrasser , en les bradant plus ou moins , des créances dont elles disposaient sur des pays qu’elles considéraient maintenant comme non solvables .

- Dans le même temps , les PVD qui appliquaient les politiques d’ajustement du FMI s’efforçaient de privatiser leurs entreprises publiques , en échangeant les actions de celles-ci contre des titres de la dette .

- Les FTN qui avaient racheté des créances pouvaient donc , à faible coût , prendre le contrôle d’entreprises dans les PVD .

- L’investissement direct des FTN est donc considéré désormais par les PVD comme une alternative à l’endettement , ils entrent donc en concurrence afin de les attirer ( « surenchère aux incitations fiscales, aux aides et à la prise en charge des coûts externes ») .

· les raisons structurelles : « le mouvement de libéralisation a été intensifié par le grand retournement dans les stratégies de développement , qui s’ébauche dès le début des années 80 , et qui tourne le dos au modèle de substitution aux importations appliquées durant les 20 dernières années . La nouvelle orientation prône la croissance tirée par les exportations » :

- A la croyance en un développement autocentré basé sur des théories marxistes ou structuralistess’est substitué la foi en des théories libérales , qui risquent comme les précédentes d’engendrer de nouvelles désillusions .

- En effet , « dans l’optique des conceptions ultra-libérales , l’implantation des FTN doit jouer un rôle d’entraînement automatique sur les structures productives locales . L’investissement étranger joue le même rôle que la création de pôles de croissance ( ... ) .

- Mais en ce qui concerne les économies en voie de développement , les arguments des FTN sont nombreux qui visent à montrer les limites , sinon l’impossibilité de l’intégration locale . Ceux qui sont les plus souvent avancés constituent une trilogie qualité , coût , délai ( ... ) .L’intérêt des FTN et la préoccupation industrialisante des pays ne coïncident donc pas . »

- On constate , en effet , que , « les choix des multinationales revêtent une très grande constance , caractérisés par une attitude extrêmement sélective , vis à vis de l’investissement au Sud ( doc 16 p 295 ) . Vers 1980 , 40 % du total des investissements directs étaient dirigés vers 10 pays du Sud » . La polarisation des investissements directs des FTN sur les pays les plus rentables économiquement ( en particulier les NPI ) est donc très forte ( 10 et 11 p 313).

Conclusion : On ne peut , dès lors , considérer que l’implantation des FTN puisse constituer une véritable alternative à l’aide ou au crédit , en direction des pays les moins développés . Ceux-ci sont en effet complètement délaissés ( sauf s’ils disposent de ressources en matières premières : et intéressent ainsi les FTN dites primaires ) , dès lors , qu’ils apparaissent comme présentant un risque politique ( continent africain ) ou insuffisamment compétitifs au niveau économique ( « derrière cette concentration sur un nombre limité de pays du Sud , il existe une rationalité économique » ) .

CONCLUSION :

Constat :A la fin des années 50 , les meilleurs experts de l’ONU prévoyaient :

· un avenir brillant au Congo belge riche en matières premières et était très pessimiste pour la Corée du Sud .

· « Or , depuis 60 , le revenu par tête du Zaïre , ex Congo belge , a régressé de plus de 2 % par an , alors que celui de la Corée du Sud a progressé de plus de 7% par an .

Explications : L’erreur de ces économistes s’explique ainsi :

· ils ramenaient la croissance économique des nations à la seule accumulation de facteurs de production , les matières premières , le travail qualifié , le savoir-faire-technologique et surtout le capital . »

· Or comme le constate C.Albagli : « le rapport entre le taux d’investissement et le taux de croissance portant sur la décennie 73-83 n’est pas significatif . ( ... ) La part du financement extérieur n’est pas non plus déterminante pour accentuer le niveau d’investissement général ( ... )

· En focalisant son attention trop exclusivement sur l’investissement et des coefficients du capital , on a une vision réductrice du développement » .

Conclusion : Plus personne ne pense aujourd’hui qu’une hausse du taux d’investissement puisse constituer une condition nécessaire et suffisante à la croissance économique . :

· Il faut , en effet , comme l’écrit G.Grellet admettre que : « au-delà de l’accumulation des facteurs de production , le problème de la croissance est celui de l’allocation des ressources et du choix des stratégies de développement » .

· Sinon , comme le constate J.N.Bhagwati , à la place du fameux décollage prévu par Rostow qui inspira de nombreux plans de développement au cours des années 50-60 , on risque d’assister à une étape supplémentaire : « portant le nom d’atterrissage brutal » .

·

· II) UN RENOUVEAU DES IDEES LIBERALES : l’OUVERTURE DEVIENT LA PANACEE.

G.Grellet écrit : « à l’encontre de l’ancienne orthodoxie des années 50 et 60 ( dominée par le Tiers-Mondisme structuraliste ou marxiste ) , les années 80 auront vu apparaître ce que nous pouvons appeler une nouvelle orthodoxie . (... ) Selon celle-ci , la compréhension des phénomènes de croissance est fondée sur les 3 postulats suivants :

· la croissance des nations est fortement dépendante de leur ouverture vers l’extérieur ,

· l’offre globale dépend de l’allocation des ressources rares ; celle-ci est optimale dans un marché concurrentiel , soumis aux impulsions du marché mondial ,

· le développement est d’autant plus rapide que les incitations des agents sont socialement compatibles

Remarque :On notera que ces postulats contredisent point par point l’ancienne orthodoxie , le marché mondial devient source de croissance , et l’Etat source de mauvaise allocation des ressources . »

A ) LA STRATEGIE DE PROMOTION DES EXPORTATIONS ( doc 17 p 293 )

1° ) UN CONSTAT

Comme l’indique G.GRELET , le passage du paradigme de l’introversion ( stratégie d’ISI ) à celui d’extraversion ( stratégie de SPE ) s’explique par l’analyse des résultats comparés des 2 modèles :

· « les grands pays introvertis comme l’Inde ou la Chine ne connurent ( dans les années 70 ) que des résultats médiocres .

· A l’opposé , quelques pays très extravertis comme Taiwan , Hong Kong ou Singapour réussirent des percées fulgurantes dans un contexte international par ailleurs difficile » .

· Une étude de la Banque mondiale comparant les résultats de 41 pays orientés vers l’intérieur et vers l’extérieur constate que les résultats en terme de taux de croissance , de taux d’épargne , d’inflation et de création d’emplois sont d’autant plus satisfaisants que

le taux d’ouverture ( X+M / 2 PIB ) x 100 est élevé .

2° ) LES EXPLICATIONS .

La stratégie de SPE prend le contre-pied systématique de celle d’ISI . Gillis écrit ainsi : « une prescription utile pour les politiques de SPE est de faire tout ce qui est évité par le régime de substitution d’importations . » Les gouvernements vont ainsi appliquer :

· des politiques de dévaluation compétitive qui vont , à la fois leur permettre d’améliorer la compétitivité-prix de leurs produits , donc leurs exportations , mais aussi , selon Balassa , permettre une substitution d’importations (plus forte paradoxalement que dans la stratégie d’ISI ). Car , les produits nationaux sont moins chers que les produits importés ( grâce à la dévaluation et aux économies d’échelle permises par le développement des exportations ).

· une réduction des tarifs douaniers qui incite les entrepreneurs nationaux à se spécialiser en fonction de leurs avantages comparatifs , c’est-à-dire principalement dans le cas des NPI d’Asie dans les industries utilisant intensément la main-d’oeuvre nombreuse et qualifiée dont ils disposent à faible coût . L’allocation des ressources est donc beaucoup plus optimale qu’elle ne l’est dans la stratégie d’ISI

· ce dernier point est d’autant plus renforcé que les gouvernements s’efforcent de mettre en place des prix ( des biens , des services et des facteurs de production ) qui reflètent les raretés relatives . On a ,en effet , constaté , selon J.Brasseul , que s’il ne s’agit pas d’une condition suffisante au développement , remettre de l’ordre dans les prix constitue un point de départ indispensable , une condition nécessaire .

Remarque : Cette stratégie :

· semble donc reposer sur une logique libérale , puisqu’elle repose apparemment sur la théorie des avantages comparatifs de Ricardo , qui énonce que chaque pays a intérêt à se spécialiser dans la production du bien pour lequel il dispose d’un avantage par rapport à ses concurrents .

· Or , les NPI d’Asie :

- ne disposaient pas de ressources naturelles leur permettant de développer une spécialisation dans l’exportation de matières premières . Comme ils disposent , de plus , d’une population relativement restreinte ( en particulier Hong Kong et Singapour qui sont des pays villes ) , la production pour le marché intérieur et les stratégies d’ISI qui furent appliquées à la fin des années 50 montrèrent rapidement leurs limites .

- La seule solution qui s’imposait à eux ( la notion de volontarisme est donc à relativiser ) est d’utiliser leur seule richesse , c’est-à-dire leur main d’oeuvre pour produire des biens nécessitant une utilisation intensive du travail à destination des PDEM ( le textile , l’électronique , ... ) .

- Ces pays suivaient , avec 20 ans de retard , la stratégie développée par le Japon . Comme celui-ci , la réussite du modèle ( basé contrairement au modèle allemand du XIX° siècle et soviétique du XX° sur les industries de consommation , comme l’Angleterre au XVIII° ) a engendré une augmentation du coût du travail , au fur et à mesure du développement ( les NPIA appartiennent aujourd’hui à l’OCDE et sont donc des pays développés ) , donc a nécessité une adaptation . Conformément au modèle japonais , les NPIA ont donc délocalisé les productions nécessitant beaucoup de main d’oeuvre vers les tigres d’Asie ( Thaïlande , Indonésie , ... ) et ont opéré une stratégie de remontée de filières qui permet à la fois de s’implanter sur des marchés à plus forte valeur ajoutée et d’opérer une industrialisation plus complète de leur tissu productif ( la spécialisation passant des biens de consommation courants aux biens de consommation élaborés et aux biens d’équipement ).

-

- B) DU PAS ASSEZ D’ETAT AU TROP D’ETAT .

Constat : Le paradigme du « trop d’Etat » a remplacé celui du « pas assez d’Etat » , selon G.GRELLET .En effet , même si , excepté les auteurs ultralibéraux , personne ne conteste la nécessité d’une intervention de l’Etat , celle-ci doit être mesurée à l’aune de son efficacité : l’expérience montre que , dans de nombreux PVD , l’intervention de l’Etat a généré des effets contre-productifs .

Les explications : pour trois raisons essentielles :

· l’Etat a été à l’origine de distorsions qui entravent l’allocation optimale des facteurs de production :

- Ainsi , les PVD bénéficient d’une main d’oeuvre abondante , ce qui devrait , conformément à la loi de l’offre et de la demande , engendrait une réduction des salaires permettant de diminuer le chômage et de développer la production dans les secteurs exportateurs utilisant intensément la main d’oeuvre ( ex : le textile ) .

- Mais , certains pays ont voulu mettre en oeuvre des législations sociales inadaptées à leur stade de développement ( salaire minimum , protection sociale ) qui ont augmenté le coût du travail et incité les entreprises à substituer du capital au travail ( d’où augmentation du chômage ) .

- Les pays doivent donc , pour diminuer le chômage et améliorer la compétitivité , supprimer les législations handicapantes , comme l’ont fait , selon Kuznets les NPI dont la forte croissance s’explique par la flexibilité du marché du travail .

· la multiplication des mesures , leur incohérence et leurs aspects contradictoires font que les réglementations administratives sont souvent mal connues ou détournées de leur objectif :

- ainsi , en Inde les licences d’importation étant délivrées proportionnellement à la part détenue par l’entreprise dans la production totale ,chaque entreprise avait intérêt à accroître sa production même si celle-ci était invendue .

- Les mesures risquent donc de favoriser des rentes de situation qui nuisent à l’innovation et à la compétitivité .

· dans les pays où l’Etat est omniprésent mais n’a pas la capacité d’imposer des mesures qu’il instaure :

- les entreprises développent des marchés parallèles qui leur permettent d’échapper aux prélèvements publics. En contrepartie , elles doivent verser aux fonctionnaires et au pouvoir des pots de vin leur évitant des sanctions .

Ceci permet de rompre avec une vision idéaliste ( selon les libéraux ) qui fait des agents de l’Etat des individus altruistes , cherchant à maximiser le bien-être général , alors qu’en réalité , ils veulent améliorer leur bien-être personnel.

CONCLUSION DU II :

Constat : Néanmoins , si on étudie plus précisément les stratégies des NPI qui sont considérés par la Banque mondiale ou par le FMI comme des modèles de référence libéraux , on se rend compte qu’elles sont moins libérales qu’elles ne paraissent au premier abord :

Explications : ainsi quand on compare la protection tarifaire entre 2 groupes de pays : ceux ayant adopté l’ISI et ceux ayant adopté la SPE , on remarque

· certes que la protection moyenne est supérieure dans l’ISI .

· Mais les écarts de protection sont plus grands dans la SPE : en effet , cette stratégie distingue les secteurs qui n’ont pas besoin de protection car le pays dispose d’un avantage comparatif ou ceux pour lesquels la protection serait coûteuse : le pays ayant besoin de ces biens mais ne sachant pas les produire ( ex : biens d’équipement dans une première phase ) ; des secteurs que le pays cherche à développer sans être compétitif pour le moment , pour lesquels un protectionnisme éducateur semble nécessaire .

· On peut dès lors en conclure qu’il semble y avoir une stratégie plus rationnelle de protectionnisme que celle opérée par les pays adoptant l’ISI

Conséquences : ce protectionnisme sélectif montre donc que

· contrairement aux apparences et aux dires des théoriciens libéraux , l’Etat n’est pas absent ,il applique une politique qui , selon M.Fouquin , tend à concentrer les efforts sur les secteurs compétitifs et à abandonner les secteurs , dans lesquels le pays n’a pas d’avantages ;

· car , contrairement aux affirmations de Ricardo , une adaptation passive aux avantages naturels ne suffit pas : « l’expérience de tous les pays en développement , y compris de ceux qui ont le mieux réussi , est en faveur d’un certain volontarisme : dans les phases de démarrage du processus de développement , l’Etat doit choisir les secteurs prioritaires qui doivent être créés ou développés ( ... ) .

· Les échecs qui ont été enregistrés proviennent soit de choix erronés , soit de l’incapacité des Etats à mobiliser des moyens nécessaires et à mener des politiques économiques convenables » . On retrouve ici la responsabilité des Etats mous dans l’échec du développement ; on sait qu’au contraire , en Corée , un Etat fort et interventionniste a contribué notablement au développement du pays , en assistant ou en se substituant aux entrepreneurs quand cela était nécessaire .

Remarque : On peut d’ailleurs s’interroger à la fois sur la généralisation du modèle de croissance tirée par les exportations mais aussi sur sa validité :

· la stratégie de SPE s’ est révélée efficace quand un nombre réduit de pays comportant une population restreinte ( les 4 Dragons d’Asie du Sud-Est ) l’ont appliquée ; mais si cette stratégie devient un modèle copié par tous les PVD , et en particulier par des pays très peuplés comme la Chine ou l’Asie , on peut se demander si elle ne se révélera pas intenable :

- en effet si un grand nombre de pays se spécialise dans des produits banalisés en fin du cycle de vie ,dont la demande progresse faiblement , une augmentation de la production risque de se traduire par une baisse des prix et une détérioration des termes de l’échange ( comme pour les produits primaires ), donc une diminution des recettes d’exportation qui ne permettrait pas de financer le développement .

- la concurrence exercée sur ces pays sur les industries des PDEM utilisant beaucoup de main d’oeuvre peu qualifiée serait destructrice et appellerait , de la part des autorités , des mesures de protection ruinant la stratégie de SPE .

· comme l’indique M .Fouquin: « l’idée de la croissance tirée par l’exportation qui pourrait faire croire qu’un pays qui exporte plus a une croissance plus forte est , en général , fausse . Car , parvenu à un rythme très élevé , les économies butent sur des goulets d’étranglement qui les contraignent à importer de plus en plus . La croissance des importations finit à être plus forte que celle des exportations . La croissance tirée par les exportations ne peut être qu’exceptionnelle et de courte durée » . Comme le constate d’ailleurs G.Grellet : « la corrélation positive entre la part des exportations dans le produit national et la croissance , si elle existe , n’est pas sans ambiguïté , dans la mesure où elle ne fait que refléter le fait que les pays les plus pauvres n’ont rien à exporter . »

·

· CONCLUSION GENERALE :

50 ans d’économie du développement ont conduit les économistes et les organisations internationales à modérer l’optimisme dont ils faisaient preuve à leurs débuts . Ils considèrent désormais :

- qu’il n’existe plus un modèle de développement ( celui suivi par l’Angleterre pour les libéraux ou celui de l’URSS pour les marxistes ) préconisant le recours privilégié à une variable ( le taux d’investissement ) qui permettrait d’assurer à lui tout seul le décollage économique et la croissance dans tous les PVD .

- Les analyses considèrent aujourd’hui , à la suite de la diversité des chemins suivis par les PVD qui ont conduit à une remise en cause de la notion de Tiers-Monde , que chaque pays , en fonction de ses ressources ( aussi bien économiques que culturelles ou sociales ) , en prenant en compte les contraintes qui pèsent sur lui ( les effets de la colonisation , la mondialisation , l’absence d’Etat structuré , des sociétés inégalement cohérentes ) doit mettre en oeuvre une stratégie qui lui soit spécifique . La croissance et le développement qu’ont connues les NPI d’Asie semblent justifier cette analyse .

- Néanmoins , après 20 ans d’économie du développement dominée par les idées tiers-mondistes ayant conduit à des échecs retentissants , un nouveau dogmatisme basé sur le renouveau des idées libérales , la mondialisation et le succès des NPIA semble aujourd’hui à l’oeuvre . Celui-ci risque comme le précédent de conduire à des résultats catastrophiques , d’autant plus qu’il justifie l’abandon des politiques d’aide et d’intervention de l’Etat qui risquent de mettre en concurrence des pays ayant des potentialités radicalement différentes .

Ainsi , si l’on peut se féliciter de la réussite des NPIA , il n’en reste pas moins que c’est l’arbre qui cache la forêt : la majorité des pays du Tiers-Monde ayant connu un développement du sous développement.

Pour aller plus loin : sur web campus : 11-PED.ppt

COMPLEMENT DE COURS N°1

SMI ET SFI

a- Le système monétaire international

a1 - Pourquoi un SMI ?

Définition : M.BERNARD écrit : « Un SMI est un ensemble de règles et d’institutions qui régissent comment , en quoi et à quel prix les monnaies s’échangent entre elles . » Ainsi 3 questions se posent :

· la première est celle de la convertibilité : pour que l’échange international ait lieu , il est nécessaire que le vendeur bénéficie d’une garantie , c’est-à-dire que la monnaie dans laquelle il sera payé , représente un pouvoir d’achat ( la variation de ce pouvoir d’achat et donc le risque encouru par le vendeur sera fonction du régime de change en vigueur : fixe ou flottant ).

· La deuxième celle des liquidités : c’est-à-dire les moyens de paiement internationalement acceptés qui vont constituer les réserves de change des Banques Centrales ( dans le système du Gold Standard , l’or est la liquidité en dernière instance , mais la livre est acceptée ; dans le système du Gold Exchange Standard issu de Bretton Woods , le dollar devient la principale réserve de change , car il est considéré équivalent à l’or : as so good as gold )

· La troisième celle de la formation des taux de change : qui joue un rôle essentiel dans la compétitivité des produits ; le taux de change est le point de contact entre l’économie nationale et le reste du monde . Le mode de fixation de ce taux de change va donc exercer une grande influence .

·

· a2 - Les différents régimes de change

Rappel d’histoire : Le monde a connu depuis le XIX° siècle trois régimes de change : cf cours d’histoire géo

a3 - Le SMI ; un régime hiérarchisé

M.BERNARD écrit : « que les manifestations de la puissance et de la domination économique s’opposent souvent » . Il distingue , pour le démontrer 3 critères :

· d’un point de vue commercial : un pays puissant qui dispose d’avantages compétitifs importants se caractérise par des excédents commerciaux élevés et croissants ( ex : Japon , RFA ). Au contraire , un pays dominant connaît généralement un déficit de sa Balance Commerciale , car sa puissance industrielle est contestée . Mais sa puissance hégémonique lui permet de se dispenser de rétablir l’équilibre de sa Balance Commerciale .( ex : GB fin XIX° , USA depuis 71 )

· d’un point de vue financier : la puissance financière consiste à être le bailleur de fonds du monde , ( USA dans les années 50 ) , ce qui permet aux pays de vivre de ses rentes et d’exercer ainsi une domination commerciale . Le déficit de sa Balance Commerciale est compensé par le revenu des capitaux que ses résidents ont placés dans le reste du monde ( ex : GB à partir des années 1880 ) . La domination financière s’exerce , au contraire , quand l’excédent de la Balance des capitaux ne permet plus de compenser le déficit de la Balance Commerciale , et donc que la Balance des Paiements devient déficitaire ( ex : USA dans les années 80 ) . Le pays pompe donc l’épargne du monde .

· d’un point de vue monétaire : la puissance consiste pour le pays qui émet la monnaie du monde , la devise-clé à gérer son émission pour le bien de tous et non au service d’objectifs purement nationaux ( ex : les USA durant les années 50 dans le cadre des accords de Bretton Woods qui émettait des dollars pour financer le reconstruction des pays européens , tout en garantissant la couverture or du dollar , ce qui maintenait la confiance ). Au contraire , la domination monétaire s’exerce quand le pays émetteur de la devise clé se sert de la monnaie mondiale pour poursuivre des objectifs internes , sans se préoccuper des répercussions que sa gestion monétaire a sur le reste du monde , le pays dominant n’en supporte pas d’ailleurs les conséquences , car sa monnaie étant la devise de référence , il peut attire l’épargne mondiale à des coûts plus bas que ses partenaires ou financer son déficit sans pleurs ( sans plan d’adaptation de rigueur )en émettant de la monnaie ( ex : les USA à partir des années 60 et surtout après 71 )

Conclusion : Ainsi , on peut en conclure que le SMI met en relation des partenaires qui ne sont pas situés sur un pied d’égalité et donc que les différences de puissance vont venir troubler son fonctionnement , ce que démontre l’historique du SMI depuis 1945 (cf. cours d’histoire).

b - Vers le système financier international (26-27 p 298 et, 8 p 312)

b1- Les raisons expliquant le passage du SMI au SFI .

b11 - Les vertus apparentes des changes flottants

Selon les défenseurs en particulier les théoriciens monétaristes le flottement devait permettre d’assurer un meilleur fonctionnement du SMI :

· dans le cadre du SMI issu de Bretton Woods , la formation des cours de change est déterminée administrativement par les autorités monétaires ; elles ne reflètent pas toujours le taux de change d’équilibre du marché qui résulte de la confrontation entre l’offre et la demande de devises . Au contraire , les changes flexibles qui résulteraient de l’application de la loi de l’offre et de la demande de devises devrait permettre de déterminer les cours vrais du marché : ceux qui reflétant la santé économique du pays ( on devrait donc se rapprocher des taux de PPA ) .

· dans le système de changes fixes mais ajustables , qui est celui issu de Bretton Woods , quand le décalage entre le cours vrai de la monnaie et le cours administré est trop important les autorités finissent par décider un réajustement monétaire ( dévaluation ou réévaluation ) . Mais durant la période intermédiaire , durant laquelle il ne se passe rien , les spéculateurs qui anticipent le réajustement vont se déchaîner , ce qui va entraînait des coûts pour la Banque Centrale , qui doit défendre sa monnaie . Au contraire , dans un système de change flexible , la situation devrait se stabiliser et assurer un équilibre durable du marché monétaire . En effet , la tendance normale pour réaliser un gain étant de vendre lorsque les cours sont élevés ( demande < style=""> entraîne une baisse du cours de la devise ) , d’acheter lorsque les cours sont bas ( offre < style=""> , d’où une augmentation du cours de la devise ); le taux de change devrait automatiquement revenir à son point d’équilibre : celui de PPA .

· dès lors les banques centrales n’ont plus à détenir des réserves de change coûteuses et souvent insuffisantes pour soutenir le cours de leur monnaie .

· le taux de change devient alors l’instrument principal de l’ajustement de chaque économie . En effet , quand le pays connaît un déficit extérieur ( excédent ), on observe une demande excédentaire ( déficitaire ) de monnaie étrangère qui entraîne une dépréciation ( appréciation ) de la monnaie nationale et améliore ( handicape ) sa compétitivité-prix . Dès lors , les exportations augmentent alors que les importations sont handicapées , et la Balance Commerciale excédentaire ( déficitaire ) .

· les changes flottants permettent donc d’assurer l’autonomie des politiques monétaires , qui n’ont plus désormais à intervenir pour soutenir les taux de change , dans le cadre de marges préfixées . Le pays peut alors assigner sa politique monétaire aux objectifs internes , puisqu’il n’a plus à assurer la stabilisation du taux de change .

·

· b12 - Les raisons expliquant la globalisation financière .

Comme l’écrit J.ADDA dans « La mondialisation de l’économie » :

· « la relative stabilité des taux de change observée dans les années 50 et 60 correspond à une phase très particulière de l’histoire financière :

- celle de la prépondérance d’un système de financement public et de la répression organisée de la finance privée .

- De façon significative , elle est contemporaine de l’apogée du système de l’Etat-Providence dans la plupart des nations occidentales , autrement dit d’un système où la logique de marché est largement encadrée par les interventions publiques au quadruple niveau de la gestion conjoncturelle , de la concurrence et de la formation des prix , de la distribution des revenus et de la protection sociale . ( ... )

- Ce keynésianisme à l’échelle internationale souffre cependant d’un défaut constitutif : l’absence d’instances de régulation mondiale , susceptibles d’arbitrer entre les intérêts divergents des différentes unités composant l’économie mondiale capitaliste , d’opérer des redistributions exigées tant par l’équité que le bon fonctionnement de cette économie , de surveiller l’activité des firmes et des banques multinationales et de promouvoir des politiques d’intérêt planétaire »

· Tout ceci va être remis en cause à partir des années 60 quand les EU opèrent une gestion égoïste du dollar , va être aggravé par le développement des firmes multinationales et va recevoir le coup de grâce quand R.Reagan et M.Thatcher seront élus au début des années 80 et appliqueront une révolution conservatrice qui sera à l’origine des 3 D :

Définition : on doit distinguer :

· la désintermédiation : qui est le recours direct des opérateurs internationaux au marché financier ( finance directe ) sans passer par les intermédiaires financiers et bancaires( finance indirecte )

· du décloisonnement des marchés : qui correspond à l’abolition des frontières entre des marchés qui jusque là étaient séparés : ouverture sur l’extérieur des marchés nationaux . Mais aussi , on assiste à l’éclatement existant entre les différents marchés . Désormais les marchés monétaires financiers des changes , à terme , ... sont interdépendants . Le système financier international est donc devenu un méga marché de l’argent qui se caractérise par une double unité : de lieu , grâce à l’interconnexion des places financières , de temps puisqu’il fonctionne en continu .

· de la déréglementation : qui a été le moteur de la globalisation . En effet , c’est parce que les autorités monétaires des principaux pays industrialisés ont aboli les réglementations qu’a pu se constituer un marché mondial du capital .

Conclusion : Le SFI devait selon ses promoteurs assurer :

· une meilleure circulation des capitaux ,

· une meilleure allocation de l’épargne

· et une diminution du coût du crédit ,

· ce qui devait accroître l’efficacité du capital et donc la croissance économique .

·

COMPLEMENT DE COURS N°2 LES MECOMPTES DU SMI ET DU SFI

a ) UN BILAN CRITIQUE DES CHANGES FLOTTANTS : LES VICES REELS L’EMPORTENT SUR LES VERTUS THEORIQUES.

Un constat critique : Comme l’indique J.Adda :

· « le moins que l’on puisse dire au vu des variations considérables des principaux taux de change bilatéraux depuis 73 ( exemple : la volatilité du DM par rapport au $ ) est que les vertus stabilisantes attendues des changes flottants sont demeurées jusqu’ici fort discrètes.

· Loin d’avoir modéré l’instabilité intrinsèque du régime des changes flexibles, la spéculation rendue plus facile et plus puissante que jamais par la globalisation financière l’a porté à son paroxysme,

· amenant les Banques Centrales les plus résolument monétaristes ( les plus favorables au nouveau système ) à intervenir sur les marchés des changes pour tenter, de temps à autre, de ramener la parité des monnaies vers des niveaux plus conformes aux données économiques fondamentales ( cf. PPA ).

Les explications : elles sont multiples :

· En pratique, 95% de la valeur des transactions réalisées sur les marchés des changes correspondent à des mouvements financiers indépendants des opérations sur les biens et services ( le volume des opérations de change est 50 fois plus importants que la valeur du commerce des biens et services, d’où selon D.Plihon : « un découplage croissant entre les activités financières et l’économie réelle » ).

· Les phénomènes de surréaction des taux de change ( c’est-à-dire d’une réaction de taux de change excessive par rapport aux facteurs qui l’ont suscité ou par rapport au taux de change d’équilibre de long terme ) et de bulles spéculatives ( la valeur des titres et des monnaies augmente sans que la situation économique des pays concernés justifie cette envolée, puis s’effondre lorsque se dégonfle la bulle, de façon disproportionnée : ex la crise mexicaine ) ont ainsi pu être expliqués par la déconnexion croissante entre la sphère financière et l’économie réelle ( entre 80 et 88, le PIB des pays de l’OCDE a été multiplié par 1,95 ; les flux commerciaux par 2, les flux d’investissements directs par 3,5 ; les flux financiers par le marché des changes par 8,5 ; en 80, le rapport flux financiers / réserves de change des Banques Centrales était de 0,58 ; en 89, il est passé à 1,35 ). »

· J.Adda poursuit : « l’autonomie théoriquement restituée aux politiques monétaires par le flottement des monnaies suppose que celle-ci puisse se désintéresser, à l’heure de la mondialisation d’une variable aussi stratégique que le taux de change. Or, les fluctuations des taux de change affectent de multiple façon l’évolution économique :

- elles créent tout d’abord une incertitude majeure sur l’évolution des prix, des biens et des services en devises qui est préjudiciable aux échanges avec l’extérieur

- elles affectent ensuite la compétitivité de l’offre nationale et donc l’activité et l’emploi

- elles se répercutent sur le niveau général des prix et peuvent ainsi contrarier la politique économique du gouvernement

- elles encouragent enfin les comportements spéculatifs qui se nourrissent de cette incertitude, concernant l’avenir en même temps qu’ils l’entretiennent.

-Conclusion : Pour toutes raisons, il est rare que le flottement des monnaies soit pur, autrement dit que l’autonomie de la politique monétaire soit parfaite ».Mais :

· comme le constate D.Plihon, « le nouveau SFI est intrinsèquement instable, car il consacre la suprématie des forces du marché sur les politiques économiques, désormais ce sont les marchés qui décident si les politiques économiques nationales sont bonnes, les autorités monétaires ne peuvent plus grand chose pour défendre leur taux de change face à la spéculation » .

Néanmoins, il ne faut pas en conclure que les autorités publiques sont totalement désarmées et sont condamnées à une stratégie de laissez-faire laissez-passer . Elle dispose, en effet de marges de manœuvre non négligeables : l’impuissance sur laquelle elles mettent l’accent, qui résulterait de la mondialisation, a pour objectif de se défausser de leurs erreurs ou leur incapacité sur un deus ex machina « Autrement dit la mondialisation. »

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