chapitre introductif (2)

INTRODUCTION GENERALE

CHAPITRE II : POPULATION ET DEVELOPPEMENT

INTRODUCTION :

Constat : 2 périodes peuvent être distinguées :

· Jusqu’au XVIII° siècle, la population mondiale progressait à un rythme très réduit, car toute augmentation de la population qui excédait les capacités de production agricole dégénérait en crise démographique. L’idée dominante, qui sera encore celle de Malthus, était que le niveau de production agricole ( stagnant en raison de l’absence de progrès technique ) déterminait une stabilité sur longue période de la population.
· A partir du XVIII° siècle, de profonds bouleversements s’opèrent : la population, d’abord en Angleterre, puis dans les pays occidentaux, et enfin dans les PVD connaît une progression rapide.

Les deux thèses en présence : Deux thèses vont alors s’affronter sur l’ensemble de la période:
· celle des pessimistes, dont Malthus qui prévoient que l’augmentation de la population déterminera inéluctablement une surpopulation et des crises démographiques.
· celle des optimistes qui considèrent que l’augmentation de la population peut être un déclencheur des progrès techniques et des révolutions économiques , les populations étant confrontées à un défi, doivent y répondre en innovant. Par-là même, elles éliminent le risque de surpopulation.

les deux analyses :
· Une analyse diachronique ( qui analyse un indicateur à différentes époques ) semble démontrer l’inanité de la thèse malthusienne, les pays occidentaux étant même confrontés à la stagnation et au vieillissement démographique.
· Mais une analyse synchronique ( comparant les PVD Aux PDEM ) semble indiquer que la croissance démographique peut être une entrave au développement économique et social.

SECTION I : L’EVOLUTION DE LA POPULATION SUR LONGUE PERIODE.

I ) LE MODELE DE LA TRANSITION DEMOGRAPHIQUE DANS LES PAYS INDUSTRIALISES DU NORD DE L’EUROPE.

A ) L’ANCIEN REGIME DEMOGRAPHIQUE.

Pour caractériser l’Ancien Régime démographique, Braudel et Labrousse dans leur « Histoire économique et sociale de la France » écrivent : « Beaucoup de naissances, beaucoup de mariages,, beaucoup de veuvages et de remariages, beaucoup de morts, surtout d’enfants ; un régime d’incertitudes et de démesures ; la crainte encore permanente des grands fléaux bibliques que sont, souvent encore, la peste, la famine et la guerre ; une atmosphère de résignation plus ou moins chrétienne ; une certaine insensibilité des gouvernants et des sujets à l’égard de la vie et de la mort. »

1°) LES CARACTERISTIQUES DE LA NUPTIALITE.

On peut caractériser la nuptialité d’Ancien Régime par 4 éléments :

a - l’âge moyen au premier mariage est élevé :

24 ans pour les femmes, 27 pour les hommes ( les hommes ont donc trois ans de plus en moyenne) ce qui remet en cause une idée reçue, qui provient de la généralisation d’un cas particulier, celui des rois et de la noblesse, qui se mariaient eux, très précocement


b- le taux de nuptialité est très élevé.

nombre de mariages conclus dans l’année
taux de nuptialité =----------------------------------------------------------------------- x 1000
population moyenne

Le pourcentage de célibataires reste donc très faible. Dans la société traditionnelle, tant qu’on n’est pas marié, on n’est pas considéré comme un adulte au plein sens du terme. Le mariage est donc la norme.

c- on se marie pour peu d’années :

En France, le tiers des mariages se rompt avant 10 ans, un tiers seulement atteint 25 ans. Ceci s’explique principalement par la très forte mortalité des femmes en couches mais aussi par l’espérance de vie réduite des individus.


d- le taux de familles recomposées est élevé :

On se remarie aisément, mais non pas à la suite d’un divorce ( interdit par l’église ), mais à la suite d’un veuvage. Les familles recomposées, dont tous les enfants ne sont pas tous du même lit, sont donc très nombreuses.


2° ) LES CARACTERISTIQUES DE LA MORTALITE.

3 caractéristiques essentielles :

a- le taux de mortalité est très élevé :

nombre de décès pendant l’année
taux de mortalité = --------------------------------------------------------------- x 1000
population totale moyenne de l’année

b- le taux de mortalité infantile est très fort :

La mortalité frappe particulièrement les enfants qui sont les êtres les plus fragiles : le taux de mortalité infantile, en France au XVIII° siècle est de 250 pour 1000 :

nombre de décès d’enfants de moins de 1 an
taux de mortalité infantile =--------------------------------------------------------------------------- x 1000
nombre de naissances vivantes dans l’année

La moitié des enfants sont morts avant 15 ans. Bien souvent le père ne s’est pas dérangé pour conduire le petit corps à la tombe. L’enfant n’est véritablement considéré comme un individu que lorsque la période la plus risquée ( la petite enfance ) est passée.

c - l’espérance de vie est donc très faible :

Attention : il ne faut pas confondre espérance de vie et durée moyenne de vie :

+ l’espérance de vie est un indicateur transversal construit a priori : c’est le nombre moyen d’années que vivrait une génération si elle était soumise aux conditions de mortalité observées durant l’année de référence.

+la durée moyenne de vie est un indicateur longitudinal, calculé a posteriori.

L’espérance de vie est de 25 ans en 1740.
La mortalité est donc vécue comme un fléau naturel, un fléau de dieu, contre lequel l’homme est démuni. La prière du laboureur indique d’ailleurs : « Seigneur protégez-nous de la guerre, des épidémies et des famines ». Ce sont, en effet, les trois principales causes de mortalité, mais ce ne sont pas les seules ; à cela, il faut ajouter l’absence d’hygiène aussi bien de la population que des sages-femmes et des médecins, ce qui explique la très forte mortalité infantile et celle des femmes en couches.
Cette forte mortalité n’est pas sans influencer la fécondité.


3°) LES CARACTERISTIQUES DE LA FECONDITE.

a - le taux de natalité est très élevé

nombre de naissances dans l’année
taux de natalité = ----------------------------------------------------------- x 1000
population moyenne de l’année


Attention: il ne faut pas confondre indicateur synthétique ou conjoncturel de fécondité ( encore appelé somme des naissances réduites ) et la descendance finale :

+ l’indicateur conjoncturel de fécondité : est un indicateur transversal, calculé a priori, c’est le nombre moyen d’enfants qu’aurait eu une génération imaginaire de femmes, si elle gardait, durant toute sa période de fécondité le comportement de fécondité des femmes observées durant l’année de référence.

+ la descendance finale : est un indicateur longitudinal, calculé a posteriori.Il correspond au nombre moyen d’enfants qu’a eu une génération de femmes n’étant plus en âge de procréer.

Le taux de natalité est au moins de 40 pour 1000 : ceci résulte d’une fécondité que l’on peut qualifier de naturelle, qui s’explique par l’absence de contrôle de naissances.

b- la taille moyenne des familles est plus réduite qu’on ne le croit généralement :

Malgré cette fécondité très élevée, il ne faut pas croire, contrairement à une légende tenace fondée sur des exemples extraordinaires que les familles nombreuses soient la norme ; au contraire, elles sont rares. Braudel et Labrousse écrivent ainsi : « La démonstration est quasi lumineuse :
· une femme mariée vers 25 ans ( c’est la moyenne habituelle ) et stérile vers 42 ( c’est aussi la moyenne habituelle ) ne peut, en 17 ans de vie conjugale féconde accouchait plus de 8 fois puisque les intervalles inter génésiques (entre 2 naissances ) moyens sont tous supérieurs à 2 ans en moyenne. »
· A cela, il faut ajouter que bon nombre de femmes mourraient avant d’être stériles.
· On peut donc en conclure que le nombre moyen d’enfants par femme soit beaucoup plus bas que 8 ; il était de 4 à 5 enfants par famille, ceci est énorme car, si tous ces enfants grandissaient et se mariaient, la population française aurait doublé à chaque génération.

c- la thèse de P.ARIES ;

Mais la mortalité infantile opérait un tri, ce qui nous conduit à établir une relation, développée par P. Ariès entre fécondité et mortalité infantile :
· le niveau de fécondité élevé s’explique par l’importance de la mortalité infantile : les parents font beaucoup d’enfants, car ils savent très bien que la moitié d’entre eux mourront avant 15 ans.
· Ceci peut expliquer le manque d’attachement relatif des parents pour leurs enfants. Comme l’indique L. Roussel, « le petit être né de quelques jours ou de quelques mois , avait une existence trop précaire pour qu’il fut considéré comme un enfant tout à fait né . On suspendait donc le moment de l’attachement véritable jusqu’au seuil où les principaux dangers avaient été écartés. Si d’ailleurs la mort d’un enfant avait constitué un événement aussi tragique qu’aujourd’hui, sa répétition aurait brisé l’équilibre d’un grand nombre de familles. »

4°) UNE STAGNATION DE LA POPULATION SUR LA LONGUE PERIODE MALGRE DES CRISES DEMOGRAPHIQUES.

a- une stabilité de la population ;

La population française entre le XIII° et le XVII° siècle est demeuré stable : entre 15 et 20 millions d’habitants, ce qui en fait le pays le plus peuplé d’Europe.

b- les crises démographiques d’Ancien Régime :

Mais, comme l’indique Asselain : « qu’on se garde bien de confondre histoire immobile et stabilité permanente, puisque cette notion fondamentale d’un état stationnaire de longue période n’exclut pas de violentes fluctuations. » En effet, la démographie d’Ancien Régime se caractérise par le retour de crises récurrentes.
Développons un exemple typique :

- une guerre ou une mauvaise récolte entraîne une réduction de l’offre de produits agricoles de première nécessité qui devient inférieure à la demande.
· Dès lors, le prix du grain va augmenter, il peut être sur une courte période multiplié par 6
· Les populations les plus pauvres ne peuvent donc plus se nourrir ; ce qui conduit à l’élimination des individus les plus fragiles : les vieux, les enfants ( le taux de mortalité est à son maximum ).
· Durant la crise , on se marie moins et on fait moins d’enfants ( les taux de nuptialité et de fécondité sont à leur minimum )
· la population diminue donc .

- Mais cette période de famine est à terme suivie d’une série de bonnes récoltes : l’offre de produits agricoles augmentant , alors que la demande est réduite ( la population ayant diminué pendant la crise)
· le prix des denrées agricoles diminue .
· La population est alors mieux nourrie , le taux de mortalité diminue donc , d’autant plus que les individus les plus fragiles ont été éliminés .
· Comme la crise a laissé beaucoup de vides , les hommes vont se remarier ( taux de nuptialité à la hausse ) , les couples vont élever leur fécondité ,
· la population va donc s’accroître jusqu’à la prochaine crise .



B ) VERS UN NOUVEAU REGIME DEMOGRAPHIQUE .

1° ) LA CHUTE DE LA MORTALITE , UN ROLE MOTEUR .

A partir du milieu du XVIII° siècle , on observe en Europe occidentale une régression du taux de mortalité qui passe , par exemple de 345 pour 1000 en Angleterre en 1740 à 271 pour 1000 en 1800 Comment expliquer cette chute de la mortalité ? Tous les facteurs n’ont pas joué le même rôle : certains ont été surestimés pendant longtemps .

a - les progrès médicaux :

Constat : On a longtemps cru que les campagnes de vaccination ( le vaccin de la variole découvert à la fin du XVIII° ) avaient permis de faire disparaître les grandes pandémies ( épidémies récurrentes ) , mais cette idée doit être relativisée pour 2 raisons :
· certaines épidémies , en particulier la peste (dernière épidémie en France à Marseille en 1720 ) ont disparu , alors qu’aucun vaccin n’avait été découvert .
· la chute de la mortalité s’observe dès 1750 alors que les principaux progrès médicaux ( la révolution pasteurienne en particulier) n’ont lieu que 100 ans plus tard .

conclusion : On considère donc aujourd’hui que les progrès médicaux n’ont pas été un des facteurs déclenchant de la chute de la mortalité .

b- l’amélioration des conditions sanitaires et les progrès de l’hygiène :

Elle semble avoir jouer un rôle plus important ; il n’en reste pas moins qu’elle a été relativement tardive, puisque les adductions d’eau et les réseaux d’égouts ne sont pas observables avant le milieu du XIX° pour les villes , XX° pour les campagnes . De plus , pour que les règles d’hygiène soient appliquées , il faut encore que la population ait un niveau d’éducation qui lui permette d’accepter et d’appliquer ces règles .

c- les progrès de l’éducation :

Ils sont à relier à ceux de l’hygiène : l’école laïque , publique et obligatoire a joué un rôle important mais pas avant le dernier quart du XIX° ( politique scolaire impulsée par J.Ferry ) .

d- le facteur déterminant : la Révolution Agricole :

Finalement le facteur essentiel expliquant la régression de la mortalité : « semble surtout être dû , en définitive , à la révolution agricole du XVIII° siècle » ( D.Noin ) . La révolution agricole , en faisant disparaître les famines , a supprimé les causes de sous-nutrition ( ration alimentaire définie en quantité ) , en diversifiant l’alimentation , a réduit la malnutrition ( ration alimentaire définie en termes qualitatifs ) .

Conclusion : Les populations , étant mieux nourries tant en quantité qu’en qualité , ont mieux résisté aux épidémies qui disparaissent avec la révolution agricole et les progrès de l’hygiène et de l’éducation .


2° ) LA CONSEQUENCE : LA CHUTE DE LA NATALITE .

a- un facteur surestimé : l’utilisation des techniques contraceptives :

critique des pré-notions : Contrairement à l’idée répandue :
· la diffusion des techniques contraceptives n’est en rien responsable de la chute de la fécondité observable dès la fin du XIX° .
· En effet , la baisse de la fécondité l’a précédée .
· On sait , en outre , que des techniques contraceptives rudimentaires étaient connues depuis fort longtemps , mais qu’elles n’étaient pas employées , les mentalités n’étant pas prêtes à les accepter .

Conclusion : G.Tapinos écrit : « c’est la modification des comportements et des conduites individuelles qui a véritablement renversé la tendance en matière de natalité » .Cette modification résulte de la conjonction de plusieurs éléments

b- la chute de la mortalité :

explication du processus : Après un temps d’adaptation nécessaire à la compréhension du phénomène , elle a engendré une baisse de la natalité résultant de la conjonction de plusieurs variables:
· les parents comprenant qu’ils n’ont plus besoin de faire 4 ou 5 enfants pour en garder 2 vivants , vont réduire leur fécondité en utilisant les méthodes contraceptives connues .
· les parents constatant que la probabilité de décès de leur enfant chute , réduisant leur fécondité , vont s’attacher davantage à leurs enfants ; ils vont vouloir les éduquer ; dès lors l’enfant , au lieu de rapporter , va devenir coûteux , ce qui incite les parents à réduire encore leur fécondité

remarque : Cette évolution observable chez les classes aisées urbaines se généralise peu à peu à l’ensemble de la population , au fur et à mesure de l’élévation du niveau de vie .

c- le rôle du développement économique :

On retrouve ici le développement économique qui a joué sur d’autres plans :
· la mécanisation a rendu la présence d’enfants moins nécessaire et donc son intérêt moins évident .
· l’industrialisation et l’urbanisation accroissent le coût de l’enfant et incitent donc les parents à en faire moins .
· « le changement de la structure productive accompagné d’un déclin de la famille (en tant qu’unité de production ) , de la croissance de systèmes impersonnels pour l’affectation des emplois et du développement du rôle économique des femmes en dehors du foyer a pour effet d’accroître les possibilités de mobilité économique qui peuvent être atteintes plus facilement avec des familles réduites et de diminuer les avantages économiques des familles nombreuses . » ( Coale et Hoover )

c- l’influence des facteurs culturels :

Comme l’indique J.Vallin , « les transformations culturelles , en grande partie induites par les changements économiques , agissent sans doute encore plus sûrement » . Dans ce domaine , le développement de l’éducation féminine semble avoir joué un rôle important que l’on retrouve aujourd’hui dans les PVD .


C ) LE MODELE DE LA TRANSITION DEMOGRAPHIQUE .

Le schéma de la Transition démographique se décompose en 3 phases :




a- l’Ancien Régime Démographique ( ARD ) :

La première phase va jusqu’à Ta ,elle est caractérisée par :
- un fort taux de natalité ( Tn )
- un fort taux de mortalité ( Tm )
- qui donnent un taux d’accroissement naturel ( Tn - Tm ) faible et donc une
stagnation de la population dans la longue période
- une alternance de crises et d’expansions démographiques qui se compensent , en se succédant .

b - la Transition Démographique :

Elle va de Ta à Tw . Elle se décompose en 3 sous-phases :
+ de Ta à Tb ( D1 ) : elle se caractérise par :
- une forte chute du taux de mortalité
- une stagnation du taux de natalité
- une élévation du taux d’accroissement naturel
- et donc un accroissement de la population

+ de Tb à Tg ( D2 ) : elle est caractérisée par :
- une continuation de la chute du taux de mortalité
- le taux de natalité entame sa chute
- le taux d’accroissement naturel atteint son maximum
- la population augmente très vite

+ de Tg à Tw ( D3 ) : elle est caractérisée par :
- un taux de mortalité qui se stabilise à un niveau bas
- un taux de natalité qui s’effondre
- un taux d’accroissement naturel qui diminue progressivement
- une population qui augmente moins vite ( attention , elle ne chute pas , pour cela il faudrait que le taux d’accroissement naturel soit négatif )

c - le Nouveau Régime Démographique ;
A partir de Tw . On observe alors :
- un taux de mortalité faible et stable ( aux alentours de 10 pour 1000 )
- un taux de natalité faible et stable ( aux alentours de 10-12 pour 1000 )
- un taux d’accroissement naturel faible et stable
- et donc une stagnation de la population

Remarque : du point de vue du taux d’accroissement naturel et de la stagnation de la population, , l’Ancien et le Nouveau régime démographique semblent identiques mais ceci résulte de taux de natalité et de mortalité très différents . Une même conséquence peut avoir des causes différentes .


II ) LA DEMOGRAPHIE MONDIALE : CONTRASTES ET CONVERGENCES .

A ) LES CONTRASTES .

1°)UNE POPULATION VIEILLISSANTE ET STAGNANTE DANS LES PDEM .

a- une chute de la fécondité :

Constat : La fécondité ne cesse de diminuer dans l’ensemble des PDEM : elle passe ainsi en France de 2,93 à 1,65 enfants par femme. Le seuil de renouvellement des générations n’est plus assuré ( il est de 2,1 enfants par femme ) , ce qui entraîne , à terme ,un vieillissement de la population .

b- une augmentation de l’espérance de vie :

Constat : L’espérance de vie ne cessant de croître ,elle cumule ses effets avec la chute de la fécondité et on peut donc s’attendre à une société où au moins 30% de la population aura 60 ans et plus selon J.Vallin .

2 ° ) EXPLOSION ET RAJEUNISSEMENT AU SUD .

a- une forte fécondité :

Constat : Au contraire dans les PVD , on assiste à une explosion de la population qui résulte d’une fécondité par femme très élevée , comparativement à celle des PDEM . Ainsi , sur la période 70-75 , la fécondité par femme pour les pays les plus industrialisés est de 2,2 ; pour les moins industrialisés ,elle est de 5,4 , elle atteint même 6,6 en Asie . Ceci se traduit par un rajeunissement de la population ( les moins de 15 ans représentent 40 à 45 % de la population contre moins de 25 % dans les PDEM ) .

b- une espérance de vie qui demeure modeste , bien qu’en progression constante :

Constat : Comparativement à celle observée dans les PDEM ,l’espérance de vie reste encore relativement faible ( de 50 à 65 ans ) . La part des 60 ans et plus dans la population sera donc réduite ( d’autant plus que la part des moins de 15 ans est forte ).

CONCLUSION DU A :

Les PVD et les PDEM ne sont donc pas confrontés aux même défis :
· les PVD doivent éduquer une population jeune qui augmente et créer un nombre croissant d’emplois , tout en s’efforçant d’améliorer l’espérance de vie .
· les PDEM , quant à eux , doivent assumer la charge d’une population vieillissante et sont donc confrontés aux problèmes qui en résultent : financement des retraites , assistance médicale et sociale des personnes âgées .


B ) DES CONVERGENCES ?

1°) LA TRANSITION DEMOGRAPHIQUE , UN MODELE GENERALISABLE ?

On constate que les pays du Sud connaissent tous aujourd’hui avec retard le schéma de la transition démographique , qu’ont connu 1 siècle avant eux les pays développés ( attention : la France est une exception , elle n’a pas vraiment connu de transition démographique , puisque la baisse de la fécondité a été précoce et rapide ) . On doit donc s’attendre à ce que , suite à la chute de la mortalité observable dans tous les PVD , s’engage celle de la natalité ( déjà engagée chez certains : 2,4 enfants par femme en Asie du Sud-Est , 1,8 pour les 4 Dragons ) .Les PVD connaîtront donc dans le futur une situation démographique comparable à celle des PDEM .

2° ) MAIS AVEC DES SPECIFICITES PROPRES A CHAQUE PAYS .

a - les spécificités :









18 p 45 vieux bordas






















· une transition plus étalée dans le temps pour les PVD : si l’on compare les deux transitions démographiques, on constate que dans les PVD , le taux de natalité est resté très longtemps à un niveau très élevé ( jusqu’en 1950 , il est supérieur à 40 pour 1000 ) alors que le taux de mortalité connaissait une baisse très importante ( il chute dès 1875 ) .
· une croissance démographique beaucoup plus forte que dans les PDEM :le décalage temporel beaucoup plus important dans les PVD que dans les PDEM se traduit par un taux d’accroissement naturel beaucoup plus élevé .Comme le constate J.VALLIN: « le taux d’accroissement atteint souvent ou même parfois dépasse 3% , ( la population double tous les 30 ans environ ) deux fois plus qu’en Europe durant la transition , c’est l’explosion du tiers-monde . »

b- les explications :

Ceci résulte de contextes socio-économiques et culturels différents :
· dans les PDEM , la transition démographique résulte de déterminants endogènes aux sociétés ( Révolution Agricole , ... ) .
· dans les PVD , la transition démographique s’explique par des déterminants exogènes: :elle résulte de l’action des PDEM qui ont introduit les progrès médicaux qu’ils connaissaient ,au travers de campagnes de vaccinations par exemple . La chute de la mortalité et la progression de l’espérance de vie ont donc été spectaculaires . Vallin cite ainsi l’exemple du Sri Lanka qui en 20 ans a vu son espérance de vie progresser autant que la Suède en 1 siècle . Mais : « une chose était d’importer d’Europe des techniques médicales permettant de réduire le taux de mortalité , autre chose est de copier les schémas culturels européens , ayant conduit les familles française ou scandinaves à limiter leur nombre d’enfants . » Les mentalités des populations des PVD ne se sont pas adaptées à la chute de la mortalité , il semble même que l’influence des PDEM , en faisant tomber des tabous sexuels ait favorisé une hausse de la fécondité.


SECTION II : DEMOGRAPHIE ET DEVELOPPEMENT ECONOMIQUE

INTRODUCTION .

Le débat sur la relation entre croissance démographique et développement économique oppose 2 camps présentant des conceptions antagonistes :
· d’une part , on trouve les Cassandres qui considèrent que l’augmentation de la population ne peut qu’entraver le développement économique .
· de l’autre , les candides , qui eux , considèrent que la croissance démographique ne dégénérera pas en catastrophe et même qu’elle peut impulser le développement économique .


I ) LA CROISSANCE DEMOGRAPHIQUE EST UN FREIN AU DEVELOPPEMENT .


A ) UN CONSTAT .

Une relation de corrélation peut être mise en évidence : la croissance économique et le développement semblent aller de pair avec une faible augmentation de la population :
· les pays qui sont développés connaissent des rythmes d’accroissement démographiques faibles ,
· les pays qui sont en voie de développement , au contraire , connaissent des taux d’accroissement de la population très élevés .

Conclusion : Certains auteurs en sont alors arrivés à conclure , passant de la relation de corrélation à celle de causalité ( attention , les 2 termes ne sont donc pas synonymes ) que c’est la croissance démographique qui doit être tenue pour responsable du sous -développement économique .


B ) LES EXPLICATIONS .

1 - UN FONDATEUR : MALTHUS .

a- les principes :

Malthus est un pasteur anglican qui , au début du 19ème siècle , a établi une théorie s’efforçant de démontrer que la croissance démographique générera inéluctablement des crises démographiques. : La théorie de Malthus repose sur 3 propositions :

· la loi de la population : elle pose que : « lorsque la population n’est arrêtée par aucun obstacle , elle double tous les 25 ans et croît selon une progression géométrique . » Si les hommes suivent leurs instincts naturels , ils vont donner naissance à un nombre croissant d’enfants , sans tenir compte de leur capacité à les nourrir .

· la loi de la production : , selon Malthus: « Les moyens de subsistance dans les conditions les plus favorables à la production ne peuvent jamais augmenter à un rythme plus rapide que celui qui résulte d’une progression arithmétique » . Ce pessimisme de Malthus est propre à la plupart des auteurs classiques qui postulent l’existence de la loi des rendements décroissants( pouvant même déboucher selon Ricardo sur un état stationnaire de l’économie ) . En effet , Malthus considère que le rendement de la terre diminue quand le nombre d’agriculteurs et la surface augmentent ; il considère donc qu’on se situe dans le cadre d’une croissance extensive , dans laquelle le progrès technique est limité , voire inexistant ( cette hypothèse est fondamentale pour bien comprendre Malthus ) .

· le résultat : de ces deux effets cumulés est que , plus la population augmente , plus l’écart entre la production agricole ( l’offre de produits ) et les besoins de la population en produits de subsistance ( la demande de produits ) s’accroît . La ration alimentaire va donc diminuer , ce qui débouche obligatoirement sur des situations de famine .Celle-ci exerce une régulation naturelle de la population en adaptant le nombre d’individus à nourrir aux capacités de production , en éliminant le surplus de population .

b - le responsable :

Mais Malthus considère que les individus ne doivent pas être tenus pour responsables du sort qu’ils subissent . Le seul véritable responsable de la situation qu’il observe dans l’Angleterre du 18° siècle est le gouvernement qui :
· en adoptant les lois sur les pauvres leur a fait croire qu’ils pouvaient donner naissance à autant d’enfants qu’ils voulaient .
· L’Etat a donc déresponsabilisé la population ( on trouve ici un des principes essentiels de la théorie libérale , cf. cours sur l’ Etat de première ) .
· Mais , en réalité l’Etat ne pourra pas tenir ces engagements ; seules les familles les plus riches pourront subvenir aux besoins de leurs enfants , les pauvres seront éliminés : c’est la parabole de banquet de la nature .

c - les solutions :

Malthus distingue deux types d’obstacles à la croissance démographique :

· les obstacles qu’il qualifie de destructifs : les famines qui viendront si aucune mesure n’est prise , éliminer le surplus de la population . Mais on voit bien que ceux ci ne peuvent être assimilés à des solutions .

· les obstacles qu’il qualifie de préventifs : Il propose donc comme solution de
supprimer les lois sur les pauvres afin de responsabiliser toutes les couches de la population et d’imposer l’idée que chaque famille ne doit enfanter que si elle dispose des moyens suffisants pour en assurer la subsistance . Pour cela , il faut appliquer le principe de « moral restreint » ( contrainte morale ) qui fasse prendre conscience à chaque parent de ses responsabilités . En revanche ,, contrairement à l’idée répandue , Malthus est opposé au contrôle des naissances , à la contraception pour des questions éthiques et morales ( il est pasteur ) .

2 - les néo-malthusiens .

a - les facteurs entravant la croissance économique :

Reprenant le pessimisme de Malthus , de nombreux auteurs considèrent que la situation dans laquelle se trouve les PVD résulte de l’ expansion démographique incontrôlée :

- un taux d’investissement insuffisant : comme l’indique Rostow ,le décollage économique nécessite une augmentation de l’effort d’investissement qui est fonction de la capacité du pays à dégager une épargne . Or celle-ci est rendue d’autant plus difficile que les familles ont un nombre d’enfants élevé et éprouvent donc des difficultés à dégager un surplus . La possibilité en est d’autant plus réduite , que l’accroissement de la taille de la famille entraîne :

· soit une division de la taille des propriétés entre tous les héritiers (si le doit successoral est égalitaire) et donc une rentabilité réduite résultant de l’absence d’économies d’échelles , de l’incapacité des petits propriétaires à accumuler du capital, etc. .
· soit la multiplication des paysans sans terre si le droit successoral est inégalitaire (primogéniture) .

- une incitation à la modernisation des structures productives trop faible: les familles , en particulier paysannes , n’éprouvent pas forcément le besoin de moderniser leurs méthodes de production par l’investissement . En effet , elles disposent d’une main-d’œuvre nombreuse et gratuite (constituée de leur descendance) . Il serait irrationnel de leur part de ne pas l’utiliser , car alors que faire des enfants ?

- le poids des infrastructures médico-sociales : même si le taux d’investissement augmente , il n’est pas évident qu’il soit suffisant pour moderniser réellement les structures de production. En effet, le rythme élevé que connaît la croissance démographique rend nécessaire la construction d’infrastructures ( hôpitaux , écoles , ...) qui n’ont pas directement , à court terme de répercussions économiques .

- une surexploitation des terres ayant des répercussions écologiques graves : l’augmentation de la population nécessite la mise en culture de terres peu productives et la surexploitation des autres terres , ce qui conduit à une érosion et une réduction des rendements agricoles : les besoins de court terme prenant le pas sur ceux de long terme ; les résultats écologiques sont catastrophiques et interdisent un développement économique soutenable dans le long terme .

Conséquences : tout ceci débouche sur une série de cercles vicieux :



















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b - les solutions préconisées :

Les néo-malthusiens préconisent donc d’appliquer des politiques de contrôle des naissances visant à limiter la croissance démographique . Celles ci seront plus ou moins incitatives selon les pays :
· en Inde le gouvernement a distribué des appareils de radio aux femmes qui acceptaient de se faire ligaturer les trompes ,
· En Chine les mesures prises ont été beaucoup plus volontaristes : la politique de l’enfant unique s’est traduite par de forts prélèvements fiscaux opérés sur les familles ayant deux enfants ou plus .


II ) LA CROISSANCE DEMOGRAPHIQUE, UN MOTEUR DU DEVELOPPEMENT.


A) LA CRITIQUE DES THEORIES ANTIPOPULATIONNISTES.

1 - UN CONSTAT.

· Malthus croyait observer une augmentation de la population résultant de l’augmentation de la natalité qui déboucherait inéluctablement sur des famines. Or, l’Angleterre a connu une forte augmentation de sa population ( elle a doublé en un siècle ) accompagnée d’une disparition des famines. Aujourd’hui, elle connaît une baisse de sa population.
· De même les néo-malthusiens pensaient que la croissance de la population serait si forte que le monde serait incapable d’accueillir et de nourrir le surplus de population. Or, on constate depuis une vingtaine d’années que le taux d’accroissement naturel observable dans les PVD diminue, certains pays connaissant même un début de stabilisation de la population .Comment expliquer cette erreur des prévisions pessimistes ?

2 - LES EXPLICATIONS.

L’erreur de Malthus se situe à 2 niveaux :

a - Une mauvaise anticipation de l’évolution de la population :

· la naturalisation des facteurs à l’origine de la croissance démographique est fausse: Malthus avait raison, quand il constatait au début du 19 ème une augmentation de la population ; mais il s’est révélé incapable d’en déterminer la véritable cause. Il l‘expliquait par l’accroissement de la natalité résultant d’instincts naturels. Mais l’on sait aujourd’hui que l’expansion démographique anglaise est due non à un accroissement de la fécondité mais à une chute de la mortalité .

· ceci conduit Malthus à commettre une deuxième erreur en postulant que l’ accroissement de la population semblait inéluctable sans contrainte morale ; il en sous-estimait le caractère transitoire . En effet , les familles , dès lors qu’elles ont intégré , dans leur comportement la chute de la mortalité infantile , vont limiter la fécondité ( cf. la thèse de P Ariès étudiée précédemment). C’est ce que nous montre le modèle de la transition démographique , valable aussi bien pour l’Angleterre au XVIII° siècle , que pour les PVD aujourd’hui .


Remarque : Ces deux erreurs , d’ordre démographique , sont encore accrues par le postulat qu’émet Malthus sur l’évolution de la production agricole.

b- Une mauvaise anticipation de l’évolution des la production agricole :

Malthus avait posé que les rendements agricoles étaient faibles en raison de l’absence du progrès technique ( croissance extensive ) ; or, du fait de la révolution agricole et des innovations qui vont en résulter , on assiste à une croissance intensive qui permet une augmentation des rendements , donc une augmentation de la production.

c - Le résultat :

La population étant mieux nourrie , la mortalité diminue , donc l’incitation à faire des enfants, donc la croissance de la population ,ce qui engendre un cercle vertueux.


3 - CE QUI REND LE CONTROLE DES NAISSANCES , POURTANT NECESSAIRE , INEFFICACE ET AMBIGU .

On se rend compte très rapidement que , malgré toutes les bonnes raisons qui sont avancées pour proposer une politique de restriction des naissances , les motifs qui en sont à l’origine sont nettement moins désintéressés. Ils sont au nombre de trois :

a - Ils sont politiques :

On peut , de ce point de vue , opposer durant la première conférence démographique qui a eu lieu à Bucarest les arguments des PVD et ceux des PDEM (principalement les USA):
· les PVD considéraient que la croissance démographique était le résultat de l’absence de développement et non la cause . Ce qu’il résumait dans un slogan : « la meilleure pilule c’est le développement » . Cela leur permettait de se dégager de la responsabilité de la croissance démographique , le sous développement étant le résultat du développement du Nord, et de demander une aide financière aux PDEM.
· Les pays industrialisés considéraient , au contraire , que c’est la croissance démographique qui entrave le développement et ils préconisaient donc comme pré-recquis une politique de restriction des naissances . Cette politique était fondée sur la volonté de faire retomber la responsabilité du sous-développement sur les PVD , mais aussi sur la peur du nombre croissant d’individus dans les pays du Sud , qui à terme engendrerait des déséquilibres démographiques : un Sud dynamique et jeune , face à un Nord vieillissant . Or, la puissance politique ne peut se conserver sans une base démographique forte .

b - Ils sont religieux :

on peut opposer deux types de conceptions :
· Les pays anglo-saxons protestants , libéraux et individualistes sont des tenants de la contraception comme solution unique au développement ,
· alors qu’au contraire les pays de tradition catholique ou islamique opposent un refus de principe face à ces politiques .
· Cette opposition entre d’une part les USA , et de l’autre le Vatican et l’Iran a pu être observée lors de la dernière conférence démographique au Caire en 1994.

c - Ils sont d’ordre culturel et social :

Les catégories aisées de la population ont toujours été effrayées de la forte fécondité des classes laborieuses (cf. Malthus), elles ont donc traditionnellement préconisé des politiques de restriction des naissances qui ne sont pas neutres socialement . Ces politiques peuvent avoir des résultats catastrophiques dès lors que l’on sait que :
· certaines cultures valorisent davantage la venue d’un garçon que d’une fille . Les populations réagissent alors par l’élimination des filles : les femmes se faisant avorter dès qu’elles savent , par l’échographie ou l’amniocentèse , qu’elles ont une fille (en Inde ), les paysans chinois tuant les bébés de sexe féminin pour avoir un garçon dans le cadre de la politique de l’enfant unique préconisée par le gouvernement .
· On peut alors observer un déséquilibre des sexes très dommageable à terme pour la reproduction de la population et l’équilibre social.



B) LA CROISSANCE DEMOGRAPHIQUE , UN STIMULANT AU DEVELOPPEMENT

1 -UNE IDEE ANCIENNE.

· Dans les sociétés traditionnelles qui recherchaient la puissance politique par les victoires militaires , un niveau élevé de population semblait souhaitable . J.Bodin écrit ainsi au XVI° siècle : « Il n’est de richesses que d’hommes . » . Les gouvernements cherchaient donc à favoriser l’expansion démographique , ce qui était d’autant plus souhaitable , que les pays qui connaissaient un mode de croissance extensif ( pas de progrès technique , peu de mécanisation ) devaient , pour augmenter leur production , accroître le nombre de travailleurs .
· A.Smith voit , lui aussi , dans l’importance de la population ou plutôt dans sa densité un des fondements de la croissance économique . En effet , une population nombreuse , sur un territoire restreint favorise le développement des échanges , qui est lui-même à la base de la division du travail dont résulte l’opulence de la population . A contrario , comme le montre aujourd’hui l’exemple de certains pays africains , une densité de population faible peut représenter une entrave au développement en freinant la division du travail et l’investissement : les capacités d’absorption du marché étant trop réduites

2 - LES EFFETS POSITIFS DE L’EXPANSION DEMOGRAPHIQUE SUR LA CROISSANCE : LE MODELE DE LA PRESSION CREATRICE D’E BOSERUP :

E..Boserup a développé un modèle qui se veut une alternative à celui de Malthus . Elle considère , en effet , que la croissance démographique n’est pas une entrave au développement économique , mais qu’elle peut représenter au contraire , un pré requis :
- Les méthodes de production des paysans n’ont aucune raison d’évoluer tant que la demande ne progresse pas en raison de la stabilité de la population.
- Au contraire dès lors que la pression démographique augmente , la demande s’accroît et les agriculteurs sont incités à développer leur production : il leur faut introduire de nouvelles méthodes culturales , plus intensives, faisant appel à la mécanisation.
- On peut en conclure que « ce n’est pas la population qui s’ajuste au processus de production de l’agriculture, c’est le processus productif qui est déterminé par la pression démographique ». La révolution industrielle anglaise semble s’être nourrie de la croissance démographique . Cette dernière a agi à la fois sur l’offre et sur la demande de travail :
· sur l’offre : elle fournit aux entreprises une main-d’œuvre plus nombreuse et plus mobile que par le passé , ce qui réduit les coûts en travail ( d’autant plus que l’armée industrielle de réserve est importante ) . cette main d’œuvre est aussi plus jeune, elle est généralement plus qualifiée que les générations précédentes , elle est donc plus productive.
· sur la demande : l’augmentation de la population détermine une augmentation des besoins , donc un accroissement de la consommation , qui va inciter les entreprises à produire plus ( exemple pour répondre aux besoins d’infrastructures ) , ce qui va nécessiter l’embauche du surplus de population .

CONCLUSION : CROISSANCE DEMOGRAPHIQUE ET CROISSANCE ECONOMIQUE , UNE RELATION COMPLEXE .

Contrairement à ce qu’avancent les théories de Malthus et de Boserup, on considère généralement que les liens entre croissance démographique et développement économique sont complexes et qu’aucune relation de causalité simple ne peut-être mise en évidence . Ainsi comme l’écrit J.C. Chasteland : « une même situation démographique peut constituer un stimulant à la croissance dans une société et, dans une autre, un frein à cette même croissance » .


III - LE DECLIN DEMOGRAPHIQUE DES PDEM ENTRAVE T’IL
LE DYNAMISME ECONOMIQUE ?


La situation à laquelle sont confrontés les PDEM est très différente de celle que connaissent les PVD En effet :
· ils doivent faire face à la fois à une chute de la fécondité et de la natalité et à une augmentation de l’espérance de vie .
· La structure par âge de la population se transforme , la part des moins de 25 ans dans la population diminuant très fortement , au bénéfice de la part des 65 ans et plus . Ces derniers représentaient 6,5 % de la population en 1850 ; ils représenteront 14 % en l’an 2000 .
· Ceci n’est pas sans poser des problèmes sur le dynamisme économique .

A ) LE VIEILLISSEMENT DEMOGRAPHIQUE FREINE LA CROISSANCE ECONOMIQUE .

1- VIEILLISSEMENT ET DYNAMISME ECONOMIQUE .

Il semble que le vieillissement ait des répercussions sur le dynamisme de la population pour plusieurs raisons :

a - la relation entre l’âge et la productivité du travail :

Celle-ci aurait la forme du courbe en cloche , c’est-à-dire que :
· dans un premier temps la productivité du travail augmenterait avec l’âge , jusqu’à atteindre un maximum ;
· dans un second temps la productivité diminuerait car , les individus vieillissant sont physiquement moins aptes et sont plus réticents à renouveler leur qualification pourtant dépassée .

b- le vieillissement de la population freine l’esprit d’innovation :

Il entrave le progrès technique et freine la croissance car les capacités d’invention mais aussi d’adaptation de la population sont plus faibles aussi bien au niveau de la demande que de celui de l’offre :
· au niveau de l’offre , on constate que généralement la propension à innover est d’autant plus forte que l’âge est faible, les entrepreneurs qui sont prêts à prendre des risques , à lancer de nouvelles innovations ne sont pas installés ( cf. Schumpeter : chapitre investissement et progrès technique)
· au niveau de la demande on constate que les jeunes générations sont beaucoup plus favorables aux nouveaux produits que ne le sont les personnes âgées (ex : l’utilisation de l’informatique et d’interner décroît avec l’âge ) .

c- la théorie du cycle de vie de l’épargne :

Elle distingue 3 âges :
· durant une première période de leur vie , les individus ont une capacité d’épargne réduite , car débutant dans la vie ils investissent dans l’achat et l’équipement du logement .
· une fois ces gros investissements réalisés , les individus peuvent accumuler du capital,, épargner afin de préparer leur retraite et/ou l’installation de leurs enfants .
· une fois qu’ils sont en fin de cycle de vie , les individus diminuent leur épargne car leurs perspectives d’avenir sont plus réduites et que le passage à la retraite engendre une chute des revenus .

Or , on sait qu’il existe une relation entre l’ épargne et l’investissement :
· plus la capacité d’épargne d’un pays est importante , plus le coût de l’investissement est réduit , plus les entreprises sont incitées à investir .
· Au contraire , quand le taux d’épargne chute , alors l’incitation à investir diminue , donc à terme la croissance économique .

Conclusion : Le vieillissement augmente les probabilités d’être malade , donc accroît les dépenses de santé qui sont prises en charge par la Sécurité Sociale . Le déficit du système d’assurances sociales est donc croissant , ceci est encore aggravé par le problème du financement des retraites .


2 - LES DIFFICULTES DE FINANCEMENT DES CAISSES DE RETRAITE

Il existe deux systèmes de retraite :


a - la retraite par capitalisation :


définition : Elle repose sur le principe suivant : durant la période d’activité , les individus épargnent , se constituent un capital dont ils percevront les revenus durant la période d’inactivité ( désépargne ) .Ce système repose sur le principe de l’assurance individuelle .


Ses avantages sont :
· il favorise l’épargne et donc l’investissement .
· Il n’introduit aucune solidarité entre les générations ce qui dans une période de vieillissement démographique est positif (les actifs n’ont pas à supporter la charge des retraités).


Mais ce système présente des inconvénients :
· il encourt un risque majeur : le risque financier , le montant du revenu de l’épargne est fonction de la valeur des actifs qui n’est pas connue au moment de l’épargne . On sait ainsi , que dans les années 20 , en France les épargnants ont vu leur retraite ruiner par la période de forte inflation , qu’ils n’avaient pu anticiper , puisque depuis un siècle , le franc était stable ; la guerre de 14 a bouleversé la stabilité monétaire.
· c’est un système inégalitaire puisque chacun est responsable de son propre sort , il n’y a plus de redistribution . Ce système n’étant pas obligatoire , on peut se demander dans quelle mesure les plus pauvres , ou les chômeurs pourront se constituer une retraite .
· Ce système rompt la solidarité entre les générations , ce qui risque d’accentuer la mise à l’écart des personnes âgées.

b - la retraite par répartition :

définition : Ce système introduit une solidarité entre les générations , puisque les actifs d’aujourd’hui cotisent pour les retraités d’aujourd’hui et s’ouvrent ainsi le droit à percevoir une retraite qui leur sera versée par les cotisations des actifs de demain .

Les avantages de ce système sont :
· le système par répartition évite l’écueil auquel est confronté celui de capitalisation puisqu’il ne dépend pas de l’évolution des taux d’intérêt . Il a été introduit au lendemain de la seconde guerre mondiale , en raison de la faillite des caisses de capitalisation durant la crise de 29 .
· il est moins inégalitaire , même si en France le montant de la pension est fonction des cotisations qui dépendent des revenus, une certaine redistribution existe.
· Il établit une solidarité entre les générations .

Mais il présente des faiblesses :
- il est particulièrement sensible à l’évolution démographique d’un pays . Le contexte d’après-guerre lui était favorable :
· puisque la fécondité était forte ( baby-boom ) et que le nombre d’actifs augmentait rapidement ,
· alors qu’arrivaient progressivement à la retraite les générations creuses issues de la guerre de 14 et de la crise de 29 dont les pensions étaient faibles puisque la période de cotisation avait été réduite .
- Au contraire , aujourd’hui l’évolution démographique semble remettre en cause la viabilité de ce système :
· En effet , le nombre de retraités par actifs ne cesse de croître depuis le début des années 80 , le problème devenant crucial à partir de 2005 , quand les générations nées durant le baby boom arriveront à l’âge de la retraite
· Alors que le nombre de cotisants stagne en raison de la chute de la fécondité (facteur structurel) et de l’augmentation du chômage (facteur conjoncturel).

Conséquences : Se pose alors le problème du financement des retraites : faudra-t-il diminuer les pensions
( mécontenter les retraités ) ou accroître les cotisations ( le taux et la durée ) . Ces remèdes déjà engagés seront-ils suffisants , beaucoup en doute et propose d’introduire un système de capitalisation , basé sur le volontariat qui serait couplé avec le système de répartition obligatoire et qui en prendrait progressivement le relais ( cf. plan du gouvernement présenté cette année )

B ) LA RELATIVISATION DU DECLIN ET DE SES EFFETS .

1 - LA CHUTE DE LA FECONDITE N’EST PAS INELUCTABLE .

a - l’exemple suédois :

Il semble démontrer que le vieillissement n’est pas irrémédiable . En effet , en 1978 , l’indice synthétique de fécondité était de 1,6 enfants par femme , très en dessous du seuil de renouvellement des générations , les perspectives étaient très pessimistes . Or en 93 , l’indice est à 2,13 enfants par femme , au-dessus du seuil de renouvellement des générations .
Mais, pour arriver à ce résultat , il faut encore s’en donner les moyens : la Suède a mis sur pied une politique familiale très ambitieuse et coûteuse , inexistante dans les autres pays ( places en crèche , jours de congés et indemnités parentales ) .

b - le modèle d’EASTERLIN :

Sur un plan plus théorique, Easterlin a développé un modèle qui semble montrer que la démographie s’autorégule, c’est-à-dire que la fécondité serait fonction du rapport entre le nombre d’adultes âgés et le nombre de jeunes adultes. Easterlin distingue deux phases :
· quand le rapport actifs âgés / actifs jeunes diminue, les postes susceptibles d’être vacants dans l’avenir sont réduits, ce qui incite les actifs en âge de procréer à réduire leur fécondité. On assiste alors à un vieillissement de la population.
· celui-ci élève le rapport actifs âgés/actifs jeunes, ce qui signifie que dans le futur le nombre de places vacantes va augmenter, les départs en retraite se multipliant progressivement. Les anticipations des jeunes ménages deviennent donc optimistes, ce qui va entraîner un rajeunissement de la population.

Conséquences : A terme on revient donc à la première phase, le modèle est cyclique et endogène puisque l’évolution de la population dépend de son profil passé :
· Si ce modèle est vérifié et il semble l’être dans le cas de la France et des États-Unis, le pessimisme dont semblent faire preuve certains est hors de propos
· En effet, on peut alors considérer que la population adapte ces comportements de fécondité de façon à optimiser le bien-être social.
· Ainsi, dans cette perspective, la chute de la fécondité que l’on observe depuis la fin du baby-boom semble due au fait que le rapport actifs âgés / actifs jeunes a diminué, ce qui a conduit les ménages à restreindre leur fécondité ( bien évidemment, d’autres phénomènes sont intervenus : chômage, transformation des modèles familiaux ).

Conclusion : Dans la perspective du modèle d’Easterlin, on peut s’attendre à une reprise de la fécondité dans les années à venir, le rapport actifs âgés / actifs jeunes augmentant, ce qui devrait à terme déterminer un rajeunissement de la population ( encore faudrait-il que le chômage baisse pour que le pessimisme disparaisse) .

2 - LA VIEILLESSE, UNE NOTION RELATIVE.

La notion de vieillesse semble relever de la biologie :
· on serait ainsi vieux à partir de tel âge, quelles que soient l’époque, la société, la vieillesse se traduisant par un délabrement physique et intellectuel
· Or ce concept est très discutable : les catégories d’âge ne relèvent pas de la biologie mais de la sociologie ; dès lors, le terme de vieillissement démographique devient ambigu si la définition que l’on en donne n’est pas précise.
· Ainsi, si l’on compare la notion de vieillesse en 1950 à celle du XVIII° siècle, on constate de nombreuses différences : elle est reportée à un âge plus avancé, elle concerne des populations plus nombreuses. De même, entre 1900 et 1990, la notion de vieillesse a évolué avec l’instauration du système de retraite et l’abaissement progressif de l’âge de la retraite : on devient ainsi vieux aujourd’hui à 60 ans, quand on quitte le marché du travail, voire même à 55 ans quand on entre en préretraite. Bien évidemment, cela ne signifie pas que l’on soit inutile, à la charge de la société, dépassé à l’âge de 55 ans. En effet, on sait, par exemple que depuis 50 ans, l’état sanitaire de la population n’a cessé de s’améliorer, que l’espérance de vie progresse et que les personnes âgées arrivent à un âge avancé en bien meilleure santé qu’auparavant. Elles sont donc beaucoup plus actives et dynamiques ( cf. participation aux associations ).

Conséquences : Dès lors assimiler vieillissement à perte de dynamisme apparaît beaucoup trop simpliste, d’autant plus qu’il semble que la structure par âge de la population n’a pas réellement de conséquences sur la capacité d’innovations et le niveau de productivité d’un pays.

3 - LES DIFFICULTES DU FINANCEMENT DES RETRAITES NE SONT PAS UNIQUEMENT D’ORDRE DEMOGRAPHIQUE.

Apparemment, aujourd’hui le système de la capitalisation semble plus adapté que celui de la répartition. Mais, en réalité, les choses sont plus complexes que l’on ne pourrait l’imaginer. Le choix entre capitalisation et répartition relève plus d’un choix politique ou de société que de déterminants démographiques. En effet, comme l’indique M.L.Levy : « Dans les faits, tout système de retraite est mixte, ne serait-ce que parce que l’économie fonctionne par répartition, le niveau de vie des retraités est globalement assuré, même dans un système de capitalisation, par les productions simultanées des actifs. ».

Donc , la question du choix du système relève d’un choix de société :
· veut-on favoriser la consommation, et, dans ce cas là, on choisira le système de répartition comme en 45, quand dominait les idées keynésiennes ;
· Ou, au contraire, veut-on favoriser l’épargne , comme c’est le cas aujourd’hui , à une époque où dominent les idées libérales et donc instaurer un système par capitalisation .

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