D'abord que signifie ce titre peu explicite : "La déclaration de fin de mission résume les constats préliminaires effectués par les représentants du FMI à l'issue de certaines missions (visites officielles, dans la plupart des cas dans les pays membres). Ces missions s'inscrivent dans le cadre des consultations périodiques (en général annuelles)au titre de l'Article IV des Statuts du FMI, ou sont organisées lorsqu'un pays demande à utiliser les ressources du FMI (à lui emprunter des fonds), ou encore dans le contexte des discussions sur les programmes suivis par le services du FMI, ou d'autres exercices de suivi de la situation économique.
2. Les priorités et la méthode du gouvernement en matière de réformes sont appropriées. Concernant l'enchaînement optimal des réformes, nous considérons qu'il faut chercher à engager, de manière concomitante, une « masse critique » de réformes dans un grand nombre de domaines, de manière à tirer profit des synergies ainsi créées et, en s'attelant au problème des rentes de situation existant sur plusieurs marchés, à répartir plus équitablement les coûts et les bénéfices. Les simulations réalisées par les services du FMI montrent qu'une telle stratégie, par opposition à une méthode graduelle et parcellaire, permettrait d'obtenir des gains de croissance nettement plus substantiels et plus rapides. Il est aussi essentiel d'agir vite. « Tout réformer en même temps,» cependant, n'est pas un viatique pratique : dans la mesure où des choix doivent être faits, il s'agit, comme cela est d'ailleurs prévu, de faire porter les initiatives en priorité dans les domaines dans lesquels les distorsions de marché sont actuellement les plus importantes, à savoir sur les désincitations à l'emploi et à la mobilité sur le marché du travail et sur les nombreuses entraves à la concurrence sur les marchés des services. Compte tenu de l'ampleur de la tâche, il pourrait être utile de créer un mécanisme de coordination interministériel en vue d'établir les priorités de réformes et de suivre les progrès réalisés.
3. La politique économique doit s'attaquer à la cause première du déficit de croissance dont souffre la France : la faiblesse du potentiel d'offre. Une majorité de Français estime que c'est la faiblesse du pouvoir d'achat qui freine la croissance. S'il existe effectivement des problèmes non négligeables de répartition des revenus, les causes profondes des difficultés que rencontre la France en matière de croissance ne proviennent pas d'une insuffisance de la demande en matière de consommation. En termes réels, le revenu disponible des ménages a en effet enregistré une progression substantiellement plus élevée en France que chez ses partenaires de la zone euro depuis 2000. Mais cette augmentation de pouvoir d'achat a contribué à aggraver le déficit de croissance : l'offre n'a pu satisfaire la demande intérieure, rendant nécessaire le recours aux importations, au détriment de la croissance. De fait, les performances macroéconomiques récentes de la France ont été particulièrement médiocres dans le domaine du commerce extérieur, dont les résultats, comparés à la fois au passé et aux partenaires de la zone euro, se sont dégradés, signe d'une baisse de la compétitivité et des rigidités de l'offre. Le programme du gouvernement ambitionne à juste titre de s'attaquer à ces dernières. Mais mettre dans le même temps l'accent sur la hausse du pouvoir d'achat, bien que compréhensible en termes d'économie politique, détourne l'attention du véritable problème et suscite des attentes irréalistes. Gagner le point de croissance qui fait défaut à la France suppose de se concentrer sans équivoque sur les insuffisances du pays en matière d'offre. Ce choix servirait davantage les efforts de pédagogie économique par ailleurs engagés par les autorités en conférant une cohérence d'ensemble à sa stratégie économique.
4. Les perspectives économiques laissent présager une poursuite de la croissance au rythme récemment enregistré, mais la situation mondiale fait peser certains risques sur l'économie française. La croissance du PIB, soutenue par une forte demande intérieure, devrait demeurer légèrement inférieure à 2 % en 2007, tandis que le solde extérieur resterait décevant. En 2008, la croissance française devrait, contrairement au reste de l'Europe, accélérer légèrement, grâce à l'effet incitatif sur la demande des mesures fiscales prévues dans la loi en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat (loi TEPA) votée l'été dernier. En revanche, le déséquilibre existant entre les secteurs intérieur et extérieur devrait perdurer. L'économie a bien résisté aux turbulences récentes sur les marchés financiers mondiaux, même si ces turbulences globales continuent à se manifester. L'environnement extérieur comporte d'autres risques significatifs de dégradation de la situation économique: un ralentissement plus marqué que prévu aux États-Unis et en Europe, une hausse supplémentaire du cours des matières premières et du prix de l'énergie et une poursuite de l'appréciation de l'euro. L'indice des prix à la consommation a augmenté sous la poussée de la forte hausse des cours du pétrole et des matières premières mais les tensions inflationnistes sous-jacentes semblent maîtrisées.
Programme de réformes — Libérer le marché du travail de ses entraves
5. L'utilisation du facteur travail en France étant parmi les plus faibles des pays de l'OCDE, "gagner plus" suppose incontestablement de "travailler plus". En France, le taux d'activité, le taux d'emploi et le nombre annuel d'heures travaillées sont largement inférieurs à la moyenne. La priorité accordée à la valeur travail par le gouvernement est donc tout à fait justifiée. Les maux dont souffre le marché du travail français, peut-être le principal obstacle à une croissance plus forte, sont bien connus. Le Président a bien résumé ces maux lors de son discours devant l'Association des journalistes de l'information sociale en septembre dernier. Nous en soulignons trois principaux.
6. L'amélioration du fonctionnement du marché du travail nécessite un changement radical de l'évolution du salaire minimum. La hausse tendancielle du SMIC, en renchérissant le coût du travail, a évincé les jeunes et les non-qualifiés du marché du travail. Elle a par ailleurs comprimé l'échelle des bas salaires et découragé le travail. Enfin, la politique des baisses de charges sociales, accordées pour tenter de compenser ces effets négatifs, a pesé lourdement sur les finances publiques. Par conséquent, nous saluons la décision de ne pas accorder de coup de pouce au SMIC en 2007 et suggérons qu'elle soit pérennisée. Il serait souhaitable que la réflexion menée actuellement sur les modalités de revalorisation du SMIC aboutisse à un système creusant l'écart entre, d'une part, le SMIC et le salaire médian, afin de récompenser la progression dans la carrière et entre, d'autre part, les revenus d'assistance et le SMIC, afin d'encourager le retour à l'emploi. Il serait utile d'envisager la création d'une « Commission des bas salaires », composée d'experts indépendants, chargée d'émettre une recommandation en matière de fixation annuelle du SMIC et de sensibiliser à l'impact d'un salaire minimum élevé sur le chômage et les finances publiques. À cet égard, la remise à plat prévue des minima sociaux et l'expérimentation du revenu de solidarité active devraient aboutir à une rationalisation du système et inciter davantage à la participation au marché du travail.
7. Les négociations en cours sur la modernisation du marché du travail devraient également rechercher un accord sur la réforme du cadre juridique actuel, très contraignant. Or nous constatons avec préoccupation que les négociations semblent plutôt partir du principe que le cadre juridique actuel est largement immuable, freinant ainsi de possibles réformes du contrat de travail. Une véritable rupture avec le passé et une amélioration réelle du fonctionnement du marché du travail nécessitent d'amender les dispositions juridiques régissant actuellement le licenciement économique, de manière à faciliter les ajustements de main-d'œuvre sans passer par la solution, coûteuse, du licenciement individuel. Le système judiciaire devrait moins intervenir dans les relations entre employeurs et salariés : l'issue des conflits en serait accélérée et moins aléatoire. Il serait par ailleurs important de dissocier cause de licenciement et versement d'indemnités de chômage.
8. L'existence de services de l'emploi efficaces est un facteur essentiel d'amélioration du fonctionnement du marché du travail et la fusion prévue entre l'ANPE et l'UNEDIC devra, pour réussir, être gérée avec soin. Nous nous félicitons que les autorités aient à nouveau placé le retour à l'emploi des chômeurs au cœur de leurs priorités, en proposant aux demandeurs d'emploi un accompagnement plus personnalisé assuré par une structure unique. L'expérience, en France (avec le PARE) et dans d'autres pays, prouve cependant que ces stratégies ne réussissent que si elles combinent de réelles incitations financières à la recherche d'un emploi (dégressivité des indemnités de chômage, par exemple), à une application stricte du principe de conditionnalité des prestations, dans le cadre d'un système explicite de droits et d'obligations du demandeur d'emploi."
La logique libérale du FMI est clairement explicitée dans ce texte :
- les maux de l'économie française sont définis
- les solutions préconisées clairement explicitées
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