Le débaptême un indicateur de la perte d'influence de la religion ?

Le débaptême un indicateur de la perte d'influence de la religion ?

sur le site de libération : Débaptisez-moi (04/12/2007 )

C Andries cite l'exemple de Frédéric : "Frédéric, ex-baptisé de 45 ans, a commencé les démarches il y a trois ans. «Je suis homosexuel et militant dans une association de lutte contre le sida. Autant dire que j’ai toujours maudit une institution qui méprise les homos et menace l’humanité en condamnant l’usage du préservatif.» Lorsqu’il apprend, au détour d’une conversation entre amis, qu’il est possible de demander sa radiation des registres de baptême, il jubile. «C’était l’occasion de m’engager symboliquement contre l’Eglise, en y ajoutant un petit côté provoc.»
Oui, mais voilà. Le chemin qui mène loin des fonts baptismaux est parfois sinueux. Dans le cas de Frédéric, le diocèse tente la médiation en lui proposant une rencontre avec le curé de son quartier. Un café est pris avec ledit curé, mais le demandeur campe sur ses positions et réitère sa demande, par courrier. Sans réponse. «J’avais voulu les titiller, leur silence m’a comblé, j’avoue.» Ce n’est qu’après six mois d’acharnement qu’il reçoit enfin son «acte de débaptême». Ou plutôt une photocopie du registre où figure son nom, avec une annotation en marge : «A renié son baptême.» Bref, pas de radiation.

En france : "Chaque année que Dieu fait, ils sont une centaine à commettre l’acte hérétique ultime : se débaptiser. La démarche est on ne peut plus sérieuse. Il s’agit de devenir un apostat officiel par une simple demande écrite à l’évêché de son lieu de baptême."


Mais d'abord rappelons qu'en cours de sociologie sur la culture en première le baptème est étudié en tant que rite :

Les rites sont des pratiques codifiées obéissant à des règles précises qui symbolisent :

· la communion des membres d’une collectivité,

· leur acceptation d’un certain ordre des choses,

· leur intégration à la société.

On peut distinguer deux grands types de rite :

  • Les rites d’entretien de la relation qui ponctuent la vie sociale aussi bien dans ses manifestations symboliques et festives (ex Noêl) que dans ses aspects les plus quotidiens ( ex : se serrer la main)
  • Les rites de passage qui servent à marquer les étapes de la vie d’un individu par exemple le baptême.
Comment évolue le nombre de baptèmes en France :

Baptêmes : Nombre total

1990

1991

1992

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

472 130

462 779

449 571

432 701

424 761

424 829

421 295

415 873

394 910

400 327

2000

2001

2002

2003

2004

2005





401 054

391 665

385 460

355 267

354 856

349 075





Source : Annuaire statistique de l'Eglise - 2005

Baptêmes : de 0 à 7 ans

1990

1991

1992

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

458 626

448 609

434 718

413 286

409 538

407 128

400 516

396 485

374 540

378 395

2000

2001

2002

2003

2004

2005





380 093

372 839

365 107

338 298

332 321

325 878





Source : Annuaire statistique de l'Eglise - 2005

Baptêmes des plus de 7 ans

1990

1991

1992

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

13 504

14 170

14 853

19 415

15 023

17 701

20 779

19 388

20 370

21 932

2000

2001

2002

2003

2004

2005





20 961

18 826

20 353

16 964

22 535

23 197





Source : Annuaire statistique de l'Eglise - 2005

Naissances

1990

1991

1992

1993

1994

1995

1996

1997

1998

1999

762 400

759 100

743 700

711 600

711 000

729 600

734 338

726 768

738 080

744 791

2000

2001

2002

2003

2004

2005





774 782

770 945

761 630

761 464

767 816

774 600 *








constats :
  • Entre 1990 et 2005 le nombre de baptisés a diminué de 25 %.
  • Mais cela concerne surtout les 0-7 ans , car après 7 ans le nombre de baptisés reste faible (moins de 25 000 en 2005) mais est en augmentation forte (+71 %)
  • Néanmoins si 60 % des enfants étaient baptisés entre 0 et 7 ans en 1990, ils ne sont plus que 42 % en 2005 (une chute de 18 points en 15 ans )

L'évolution des baptêmes et des mariages

Baptêmes, mariages et funérailles sont les principaux rites de passage célébrés dans l'Église catholique. L'évolution des baptêmes et des mariages en France montre une érosion entre 1975 et 2000. .





1975


1980


1985


1990


1995


2000


Part des baptêmes
dans les naissances
de l'année (en %)

77,8

64,3

62,8

61,7

58,2

52


Part des mariages
catholiques parmi les
mariages civils sans
divorcé(e) (en %)

82,3

77,6

74,6

66,2

65,2

56,1

Source : Yves Lambert (Données Sociales 2002-2003).

Constat : le taux de mariage catholique a baissé de 31 % en 25 ans, on peut penser que ce taux chutera encore dans l'avenir puisque pour se marier à l'église il faut être baptisé .

ce phénomène traduit une perte d'influence de la pratique religieuse plus large :

une série d'enquêtes le démontre

la première : CSA - Le Monde des religions, janvier 2007

Sondage portant sur 2012 personnes. Quelques résultats publiés également dans "Le Monde" du 10 janvier 2007 : Les Français sont de moins en moins catholiques (Henri Tincq).

Question : "Quelle est votre religion, si vous en avez une ?"
Personnes se déclarant : 1994 2007
Catholiques 67% 51%
Protestants 3% 3%
Juifs 1% 1%
Musulmans 2% 4%
Sans religion 23% 31%

Parmi les catholiques, ceux qui vont régulièrement à la messe du dimanche :
1948 1968 1988 2007
37% 25% 13% 8%

la deuxième du Monde 2, 30 avril 2005 :


années 60 2004
Nombre de personnes se déclarant catholiques 80% 64,3%*
(*) : Ce chiffre de 64,3% semble provenir de l'enquête CSA - La Croix du 24 décembre 2004.


Fréquentation de la messe par ceux qui se déclarent catholiques, indépendamment de leur pratique.


Poids parmi les catholiques Poids parmi l'ensemble des français
Une fois par semaine 7,5% 4,8%
Au moins une fois par mois 5,3%% 3,4%
De temps en temps, quelques fois dans l'année 24,6% 15,8%
Seulement pour les cérémonies et les grandes fêtes 46,2% 29,7%
Jamais 16,4% 10,5%
Total des catholiques 100% 64,3%

Remarque :
  • Catholiques pratiquants : une fois par semaine ou au moins une fois par mois.
  • Catholiques occasionnels : de temps en temps, quelques fois dans l'année.
  • Catholiques non pratiquants : jamais ou seulement pour les cérémonies et les grandes fêtes.



1950 actuellement
Ordinations de prêtres par an environ 1000 120



la troisième : Sofrès - Le Pèlerin - Février 2005

Pratique religieuse des catholiques au cours des dernières semaines


Total Dont de 18 à 24 ans
Assister à la messe : 24% 13%
Prier : 24% 13%
Lire la Bible : 5% 2%
Réciter un chapelet : 4% 1%
Rien : 58% 74%

Pratique régulière le week-end


Total Dont de 18 à 24 ans
Assister à la messe : 14% 4%
Regarder la messe à la télévision 11% 0%
Prier : 16% 9%
Rien : 68% 85%

montrent que :
  • certes la majorité des français reste catholiques (65%), mais que le taux a chuté de 20% en 40 ans , le taux de personnes se déclarant sans religion a cru de 35%
  • le taux de pratique religieuse a fortement chuté depuis les année 60 : un catholique sur 10 est un pratiquant régulier, entre 1948 et 2007 le taux de pratiquants a chuté de 80 % , la majorité des catholiques ne vont à l'église que pour les grandes fètes et les cérémonies.
  • une explication est la désertification de l'encadrement religieux, les prètre vieillissent , le nombre d'ordinations a chuté de 90% entre 1950 et 2000
  • mais les pratiques s'opérant dans l'espace privée sont eux aussi devenus beaucoup moins fréquents : ainsi seulement 4% des catholiques ont récité le chapelet , un quart a prié, mais 58% n'ont rien fait au cours des deux semaines précédant l'enquête.
Finalement le dernier sondage : de l'institut TNS Soffrès pour le quotidien "La Voix du Nord" témoigne de cette distorsion entre l'appartenance sociologique à une religion et le sentiment de foi.

En effet, à la question "pouvez vous dire quelle est votre religion si vous avez une", 59% (France) des sondés répondent qu'ils appartiennent à la religion catholique, tandis que 29% de français disent n'avoir aucune religion.

Par contre, lorsque l'on pose la question "croyez vous en dieu", la réponse est tout autre.

De laquelle de ces affirmations vous sentez-vous le plus proche ?

France

Région

Je crois qu'il existe un Dieu, quel qu'il soit

38 %

39 %

Je ne crois pas qu'il existe un Dieu

22 %

24 %

Je ne sais pas s'il existe un Dieu

37 %

36 %

Ne se prononcent pas

3 %

1 %


Et cette évolution ne concerne pas que la France :


Enquête du Reader's Digest - Mars 2005

Sondage sur 8657 personnes dans 14 pays européens entre le 24/11/04 et le 07/01/05.
Voir Reader's Digest - Mars 2005 pour les comparaisons entre pays européens.
Pourcentage de réponse positive :

Croyez-vous en Dieu ? 60%
Croyez-vous à une vie après la mort ? 43%
Selon vous, a-t-on besoin de la religion pour faire la différence entre le Bien et le Mal ? 24%
Les grandes religions oeuvrent-elles pour le bien dans le monde ? 40%


On constate ainsi que un mouvement de défiance à l'encontre des grandes religions: seuls 40% des européens pensent qu'elles oeuvrent pour le bien, moins de la moitié croit à une vie après la mort .

Même en Italie les débaptèmes augmentent : selon courrier international :

" : L’“actus defectionis”, l’acte par lequel on demande à être débaptisé, en latin : voilà un nouveau problème pour l’Eglise. L’Italie à elle seule compte déjà 3 000 “débaptêmes”. “En réalité, il y en a davantage, mais il est impossible d’établir des statistiques car il y a beaucoup de gens qui demandent au prêtre d’être débaptisés sans nous en informer”, soutient Federico Sora, fondateur dans les années 1980 de l’Associazione per lo sbatezzo (Association pour le débaptême), à Fano, dans les Marches, qui met à disposition sur son site des formulaires de demande de débaptême (www.abaet.it/ papini/anticler/sbattezo.html). Pour faire face à cette situation, la Conférence épiscopale a conçu des formulaires de réponse destinés aux évêques et aux prêtres, dans lesquels les aspirants au “débaptême” sont invités à considérer les conséquences de leur décision, qui comporte la plus grave des peines canoniques : l’excommunication

On constate bien une perte d'influence de la religion.

Mais peut-on en conclure que cela signifie la fin des rites ?

le débaptème n'est-il pas en lui même un rite de passage : Prenon le cas d'Estelle cité par libération :

"Estelle, 27 ans, a utilisé. «Je voulais une lettre bien tournée, un peu menaçante. En me référant à une loi, j’avais l’impression d’engager une procédure de divorce.» Résultat, en deux semaines tout était plié. La jeune fille recevait un courrier du diocèse avec photocopie de son acte modifié. Dégoûtée : «Ils auraient pu me faire languir !» Sa seule consolation : l’annotation était en latin : Deficit a fide («a renoncé à sa foi»). «Ça en jette, vous ne trouvez pas ?»"

Pour Estelle le débaptème constitue une nouvelle étape (comme une procédure de divorce) dans sa vie .

l'église quant-à elle considère que le sacrement du baptème est indélébile :

"Le père Antoine de Vial, curé de la paroisse Saint-Marcel à Paris, est catégorique : «D’un point de vue théologique, le baptême constitue un acte d’adoption de l’homme par Dieu. De la même façon qu’il est impossible de nier que chacun d’entre nous est né d’un père et d’une mère, on ne peut effacer cette filiation divine.»

Une partie des athés(par exemple http://monblogathee.over-blog.com) pense que :

"Finalement, à quoi bon se faire rayer des listes de baptême lorsque l'on est comme moi un(e) athée convaincu(e). Au contraire, j'aurai tendance à y déceler une certaine forme d'incertitude, comme si un simple trait de crayon pouvait renforcer une conviction athée encore hésitante. Or, en ce domaine, j'ai toujours considéré que la meilleure attitude était l'indifférence plus que l'outrance. Je suis baptisée et alors, qu'importe, cela n'est pas un obstacle à l'expression de mon athéisme."

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